Une étude exploratoire auprès d'écoliers de troisième cycle en classes primaires (projet de doctorat en didactique de la philosophie)
Résumé
Ce projet de recherche se propose d'étudier les apports de l'image1 à l'apprentissage du philosopher à l'école, un outil au goût des enfants et construit au plus près de leur univers. Il part d'un intérêt pour les démarches mettant la discussion au centre du processus d'apprentissage. C'est le cas de la plupart des recherches jusqu'ici exécutées en contexte scolaire, en école primaire, attachées à la pratique orale, que nous analyserons dans notre thèse, dans le souci de développer des compétences langagières, cognitives et sociales. L'image en tant que telle n'a jamais fait l'objet d'une attention particulière.
La recherche émet l'hypothèse selon laquelle l'image peut être fondatrice de l'apprentissage du philosopher, dans la mesure où elle facilite l'intelligibilité de l'objet, sert de déclencheur de la parole et motive l'enfant. Elle a pour but de jeter les bases d'une démarche spécifique de l'apprentissage du philosopher en classe maternelle et primaire, en s'appuyant sur un dispositif visuel, tout en prenant garde de ne pas oblitérer les enjeux fondamentaux de la philosophie pour enfants.
Du point de vue méthodologique, l'expérimentation sera menée dans des classes primaires auprès d'enfants du CM1 d'âges différents. Afin d'évaluer l'impact de cet outil, ce projet prévoit un protocole expérimental, appuyé sur des instruments de mesure. Du point de vue théorique, un intérêt particulier sera porté aux approches didactiques, philosophiques ainsi qu'aux modèles pédagogiques faisant le lien entre l'image et l'apprentissage, entre la perception et la connaissance, ainsi qu'à l'articulation entre image, texte, pensée et langage. La recherche offrira alors une approche interdisciplinaire très variée : en didactique, philosophie, psychologie, sciences du langage, sociologie, etc. Les données seront recueillies par diverses techniques (questionnaires, observations...) et pourront être analysées de deux manières (analyse de contenu et description statistiques), avant un bilan.
Introduction
Avant d'engager toute recherche, il faut bien partir d'un travail préparatoire. C'est dans cette optique qu'il importe de saisir la présente ébauche, que Mace et Petry (1988) considèrent comme "l'étape préliminaire de la recherche au cours de laquelle il faut établir les limites de l'objet d'étude et préciser la manière de réaliser chacune des étapes du processus". En ce sens, notre étude s'intitule : "Mise en oeuvre et apports de l'image à l'apprentissage du philosopher à l'école : une étude exploratoire auprès d'écoliers de troisième cycle en classes primaires". Elle vise à réinvestir l'image dans le cadre de l'apprentissage du philosopher à l'école, et tente de répondre à la problématique suivante : quel intérêt peut présenter l'image dans le processus d'apprentissage du philosopher à l'école ? Pourquoi apprendre à philosopher à partir de l'image et surtout comment l'aborder avec les enfants ? Pour élucider ces interrogations, ce projet s'assigne une démarche descriptive.
I) Prismes de références théoriques et éléments de la problématique
A) Mise en contexte et justification de l'étude
Toute recherche mérite d'être placée dans son contexte, compte tenu du fait qu'elle ne peut partir d'ex nihilo, c'est-à-dire à partir de rien. Ainsi, il devient fondamental de l'épargner du risque de subjectivité en tant que tel, puis la justification de sa pertinence devient aisée. Le point qui suit répond à ce principe.
1) Contexte
Depuis le début des années 90, on assiste à un développement massif au sein de la philosophie et les sciences de l'éducation, des recherches sur l'éducabilité philosophique des enfants. La notion de "philosophie pour enfants" a été proposée pour désigner ce nouveau champ de recherche s'appliquant à accompagner les enfants dans leurs questionnements philosophiques. Pour désigner ces recherches, une expression est techniquement utilisée : "Nouvelles Pratiques Philosophiques" (Tozzi, 2012), englobant les approches diverses qui se développent aussi bien en contexte scolaire (de la maternelle au lycée, en accordant une part importante aux enfants, notamment lorsqu'ils se manifestent à l'école par des questionnements philosophiques), qu'hors du cadre scolaire (par exemple, dans les prisons, les maisons de retraite, les médiathèques, les hôpitaux), sous des dénominations multiples : débats-philo, ateliers-philo, cafés-philo, goûters-philo, etc. Ce développement exponentiel correspond sans doute à une multiplication de la demande, et l'instabilité des concepts laisse supposer une opacité du contenu et de l'acte professionnel. Ces nouvelles pratiques éducatives représentent actuellement le domaine de recherche le plus actif de la didactique de la philosophie à travers le monde. On ne peut alors nier leur importance et démarches pour l'éducation, surtout dans un monde comme le nôtre, dans lequel l'immoralité, l'irrationnalité, l'intolérance, l'injustice, la violence etc., sont des raisons permanentes de déséquilibre et d'inadaptation pour les enfants, tant l'attention apportée à ces enfants conduit le plus souvent les éducateurs vers la mise au point de diverses stratégies résolutoires. Cette rapide description tend à montrer à quel point les nouvelles pratiques philosophiques existantes reflètent les besoins réels des sociétés et ont pour but d'aider ces sociétés à bien se porter. De manière générale, c'est la démarche de certaines de ces pratiques qui intéresse ce projet, autant que leur légitimité philosophique.
2) Justification
Dès cette date en effet, promouvoir des méthodes d'apprentissage adaptées à l'âge des enfants, en écartant les approches relatives à la formation destinée aux adultes, devient l'objectif d'expériences et de travaux variés : "la méthode "démocratico-philosophique" de Tozzi, la méthode dite "socratique" d'Oscar Brenifier (2002), le courant psychanalytique de Jacques Lévine, etc." (Unesco, 2007), etc. Lorsque ces travaux font l'objet d'une description systématique, d'une mesure de leurs effets et de leur faisabilité en classe, ils participent à un processus de recherche qui apporte des savoir-faire nouveaux sur le développement cognitif et la formation de l'enfant durant la scolarité obligatoire. Ils contribuent à la mise en place de dispositifs efficaces d'apprentissage du philosopher. À ce sujet, de nombreuses études ont porté, avec raison, une attention supérieure à la discussion, qui comporte abondamment d'enjeux (social, épistémologique, philosophique et cognitif). Mais si l'on regarde de près l'état de l'enfance, on peut remarquer qu'il s'agit d'une partie de la vie marquée particulièrement par les fresques, les peintures, les caricatures, etc. Par conséquent, c'est aussi le lieu de favoriser l'enseignement visuel. En parcourant les travaux existant jusqu'alors, on conçoit qu'il n'y a guère d'intérêt porté à la question. Cette absence quasi générale de ce dispositif d'apprentissage signale l'existence d'un fort potentiel non exploré et mérite que la recherche s'y intéresse davantage. Le présent projet part de cet intérêt, et vise à étudier l'image comme dispositif d'apprentissage adapté à l'âge des enfants et à leurs possibilités cognitives, les moyens d'action qu'elle offre et les effets qu'elle est susceptible de produire. C'est ce caractère non clos de la recherche sur l'apprentissage du philosopher en général, l'apprentissage par l'image en particulier ainsi que l'interaction de l'enfant avec son environnement qui donne à ce travail toute son importance. Il ne s'agira certes pas d'étudier l'image distinctement de l'oral, mais, d'associer à l'oral une représentation concrète, pouvant servir de déclencheur de parole, etc. L'étude relève à la fois de la recherche fondamentale et de la recherche en didactique. Recherche en didactique, puisqu'elle tentera une expérimentation en situation de classe de longue durée qui exploitera le dispositif d'apprentissage sous la forme visuelle de l'image. Mais aussi recherche fondamentale, car elle prend en compte le fonctionnement de la mémoire et le développement cognitif des enfants pour interpréter leurs difficultés et leur progrès, en accordant une place importante au développement lent et parfois difficile de leurs capacités d'abstraction. En effet, on le constatera, l'objet de cette recherche va au-delà de la question d'adéquation entre les outputs de l'apprentissage du philosopher pour s'intéresser à son impact social.
B) Un état de la question : lecture globale des travaux antérieurs et positionnement épistémologique
1) Recension préalable des travaux antérieurs
Sur le plan de la construction théorique, nombre de débats classiques en cours et d'analyses critiques et militantes sont engendrés par le rapport fondamental qu'a l'image avec l'apprentissage du philosopher à l'école. Une synthèse d'ouvrages, d'articles et travaux ayant participé à ce débat, centrés sur ce dispositif, permettra qu'on puisse rapidement prendre connaissance de leurs contenus afin d'identifier clairement le problème essentiel que traite la recherche et de pouvoir prendre position. Parmi ces auteurs, il est vrai que tous ne sont pas philosophes et un certain nombre d'entre eux sont spécialistes de psychologie, de langue et de sociologie. Slah (2007) et Martin (1982) sont sans doute les plus connus et les plus révélateurs de cette tendance. L'annexion d'autres domaines relèvera de l'interdisciplinarité. Mais les analyses philosophiques seront en première ligne.
Nous partirons d'abord des analyses critiques sur l'usage didactique de l'image en philosophie. Cette voie nous mènera d'abord à Platon (1986)2, étant donné que la question de l'image n'était pas absente dans l'antiquité. En ayant recours à sa théorie des idées, il conçoit que ""l'image barre l'accès au savoir" (Renonciat, 2009). Sa critique conteste l'idée que l'image peut susciter l'apprentissage de la philosophie et féconder le savoir. Il établit que l'image est une réalité qui, s'adressant aux sens et non à l'esprit, fait obstacle à la pensée abstraite puis détourne l'apprenant des efforts nécessaires à l'acquisition de la connaissance. Mais l'image présente deux faces chez Platon : celle qui fait apprendre (eikôn/eikastikê) parce que juste et conforme (prepon) à son but, et l'image simulacre (eidon/phantastikê) en tant que représentation issue de la perception ou de l'imagination, est source de préjugés. Pourtant, si Socrate parlait par image, c'est parce que celle-ci a une valeur pédagogique. La conclusion de cette mise en question de l'image reste néanmoins optimiste car elle suggère la mise en oeuvre d'une image qui fait apprendre. De son côté, Postman (1981) a rejeté le pouvoir de l'image pour, au contraire, invoquer les effets puissants de la conceptualisation au même titre que Platon. Ces auteurs supposent que l'image se révèle néfaste, parce qu'elle est stérile dans le processus d'apprentissage. Descartes, dans son approche rationaliste, développe-lui aussi une analyse critique de l'image, même si les premières lignes de la Dioptrique (1637) l'inscrivent d'emblée au sein d'un réseau où résonnent les échos de la Renaissance pour laquelle se mêlent éloge répétée de l'oeil et valorisation des sens. Le problème de Descartes (1641) provient du fait que nos sens n'étant pas constants et fidèles à l'esprit, ils peuvent nous conduire dans des erreurs. Par conséquent, l'image, en tant qu'objet de la perception, demande de la mémoire, c'est-à-dire qu'elle doit supposer l'inspection de l'esprit. Sous ce même rapport de l'image à la connaissance, Kant (1781) montre que l'image, en tant qu'elle relève de la sensation, est peut-être nécessaire pour qu'il y ait perception, mais elle ne suffit pas pour apprendre, car elle ne constitue que la matière de la perception, et par conséquent ne peut être connue a priori. Plus attentif à la question de l'image, Sartre considère qu'on ne peut rien apprendre d'une image (1936). Mais il aboutira à une conclusion nuancée : il constate bien les limites de l'image, mais aussi la nécessité de rendre l'image intelligible. Prenant pour point de départ la doctrine élaborée par Husserl (1985)3, la phénoménologie, entendue comme une démarche qui part de l'expérience en tant qu'intuition sensible des phénomènes afin d'essayer d'en extraire les dispositions essentielles des expériences ainsi que l'essence de ce dont on fait l'expérience, Sartre pense que "connaitre, c'est s'éclater vers" (1939), c'est-à-dire qu'il y a là une présence extérieure de l'objet à connaître. Sous l'influence de Husserl donc, il invoque la notion d'intentionnalité dans le but d'établir une théorie phénoménologique de l'image : "un travail sur l'image doit donc se présenter comme un essai pour réaliser sur un point particulier la psychologie phénoménologique. On doit chercher à constituer une eidétique de l'image, c'est-à-dire à fixer et à décrire l'essence de cette structure psychologique telle qu'elle apparaît à l'intuition réflexive. Puis, lorsqu'on aura déterminé l'ensemble des conditions qu'un état psychique doit nécessairement réaliser pour être image, alors seulement il faudra passer du certain au probable et demander à l'expérience ce qu'elle peut nous apprendre sur les images telles qu'elles se présentent dans une conscience humaine contemporaine", précise-t-il dans les premières pages de L'Imaginaire (1940). Un intérêt sera également porté à d'autres de ses publications, notamment La Transcendance de l'Ego: esquisse d'une description phénoménologique (1936) et Esquisse d'une théorie des émotions (1939), L'Imagination (1936). Bref, c'est un long répertoire d'ouvrages, d'articles et de travaux qui vont à l'encontre de l'usage didactique de l'image en philosophie que feuillettera cette recherche, en plus des ouvrages que nous venons d'énumérer.
Un autre aspect de la recherche portera sur les nombreux travaux qui tranchent avec les avis défavorables à l'égard de l'usage didactique de l'image. À leur tour par exemple, Aristote (1978), Comenius (1658), Érasme (Renonciat, op. cit.), Locke (1992), Leibniz (1990), Alain, Dagognet (1996), Meirieu (2006), Slah (2007), Chirouter (2011), Heinzen (2017) et bien d'autres, démontreront la légitimité de l'usage didactique de l'image. Ces dispositions à la fois fermes et nuancées contrastent en fait avec les thèses précédentes qui se sont adonnées à l'éjection de l'image du champ de la connaissance. La question de la liaison que l'image et l'apprentissage ont ensemble rebondira avec Aristote, car il entend apporter un correctif à la thèse de la théorie de ses devanciers, des présocratiques à Platon. Parallèlement à son maître Platon, l'attention qu'Aristote porte à l'image est inestimable. Son réalisme favorise, fort à propos, un enseignement visuel. Si Platon a douté de la pertinence de l'image par rapport à ce dont elle est image, Aristote trouve que l'image doit être définie plutôt comme une forme de connaissance. Le point de mire de sa thèse est le réalisme. Relevant d'une chose sensible(pragmata), a fortiori l'image fait de son rapport à l'intelligible ce qu'il y a de plus fondamental dans l'apprentissage. Il ne faut donc pas envisager leur "séparation(le Korimos)". On connaît à cet effet la fortune des travaux de Leibniz (1990), qui ne conteste pas l'idée des empiristes selon laquelle rien n'est dans l'intelligence qui ne vienne des sens (Berkeley, 1985 ; Locke, 1992 ; Hume, 1991), mais qui, au contraire, établit la passerelle entre les sens et l'intelligence "nihil est in intellectu, quod non fuerit in sensu, excipe : nisi ipse intellectus" [Rien n'est dans l'intelligence qui n'ait auparavant été dans les sens, si ce n'est l'intelligence elle-même]. Husserl et Sartre conduisent encore plus en avant ce "progrès considérable" de la pensée réaliste d'Aristote, à savoir qu'il ne faut pas "séparer" image et intellect. Ainsi, ils n'envisagent pas la "séparation" entre l'essence (l'intellect) et l'apparence (l'image) : l'apparence ne cache pas l'essence, bien au contraire, elle la met en évidence. Voilà pourquoi Husserl insiste sur la nécessité d'une psychologie phénoménologique. Selon lui, l'image mentale n'est qu'un simple reflet de sa stimulation externe : la conscience n'est donc pas un simple entrepôt d'images, de sentiments, de perceptions ou de souvenirs, car elle est "intentionnelle", elle est un acte de mise en relation.
En effet, nous nous intéresserons également au tout premier ouvrage remarquable dans l'histoire de la pédagogie par l'image, l'Orbis sensualium pictus (Tableau du monde sensible) de Comenius, paru en 1658, évoquant d'ores et déjà un dispositif d'apprentissage pour enfants en image. Partant d'une analyse de la fonction motivationnelle de l'image, la recherche s'intéressera également à Erasme (Desiderius Erasmus Roterodamus), théologien Néerlandais, "qui recommandait en 1529 de motiver l'enfant à travers l'image" (Renonciat, Ibid.).
Nous étendrons le portefeuille des écrits à d'autres travaux spécialisés, en l'occurrence le moyen d'enseignement les "Zophes", réalisé par Samuel Heinzen et Christine Fawer (2017), préconisant une dynamique de l'apprentissage fondamental par l'image. Ce travail s'est focalisé sur les "grandes questions" philosophiques en classe par les apprenants du cycle 1, mais beaucoup plus sur des questions d'éthique et de culture religieuse. Il fait écho de quelques enjeux dans l'apprentissage du philosopher, entre autres l'incitation à l'interprétation des messages latents des images en vue de leur socialisation. La recherche approchera aussi activement des articles de Slah (2007) et Martin (1982) qui ont établi un lien intime entre l'image et l'apprentissage. Un ouvrage d'Edwige Chirouter (2011) nous permettra de conforter l'idée selon laquelle on reconnaîtra en l'image un outil d'apprentissage du philosopher.
La recherche portera en même temps l'attention sur des travaux de Philippe Meirieu (2006) et Dagognet (1996) qui tranchent avec les avis défavorables vis-à-vis de l'image. Le travail approchera également les auteurs qui ont travaillé à l'identification des facteurs impliqués dans la motivation scolaire à l'instar de Viau et Barbeau (1991). Dans l'analyse de ce courant psychologique, nous serons conduits, de manière générale, à aborder beaucoup d'autres auteurs.
En ce qui concerne les revues, leur sélection ne se fera pas au hasard. Plus généralement, plusieurs autres travaux qui abordent le lien entre l'image et l'apprentissage du philosopher seront examinés.
2) Positionnement épistémologique
Nous choisissons pour notre part la position qui reconnaît l'intérêt didactique de l'image, dont la particularité est d'impacter la philosophie avec les enfants.
C) De la problématique
Pour exposer ce point précis, nous nous servirons de la définition proposée par Michel Beaud (2006) à savoir que la problématique est "l'ensemble construit, autour d'une question principale, des hypothèses de recherche et de lignes d'analyse qui permettront de traiter le sujet choisi".
1) Identification du problème spécifique de la recherche
L'attention portée au problème mène d'abord à un constat de fait : lors d'un atelier de discussion à visée philosophique menée pendant une trentaine de minutes dans une classe du troisième cycle primaire (CM1), avec les enfants dans la fourchette d'âge de 7 à 9 ans, sur la condamnation des actes de "violence physique et verbale entre élèves" en milieu scolaire, nous avions pu observer une certaine apathie, c'est-à-dire un manque d'activation dans l'échange. Pour preuve, certains mettaient plus de temps pour répliquer. En même temps, ils éprouvaient une difficulté à se représenter exactement l'objet visé par la discussion, tant leurs points de vue ne correspondaient pas effectivement avec ce qui devrait constituer la matière de leur réflexion. Le problème survint justement quand ces enfants ne parvenaient pas à prendre clairement conscience du phénomène de la violence, de façon à rester vigilants envers les possibilités de la décrire. À tel point que leurs jugements faisaient surgir des idées visant à expliquer autre chose, parce que totalement distraits. Nous nous sommes interrogés et surtout avons cherché à identifier les problèmes réels de ces enfants et leurs besoins objectifs du moment. Davantage qu'un problème d'attention, leurs difficultés réelles étaient celles de compréhension associée au manque d'intérêt pour l'activité en cours qu'ils considèrent comme une corvée. Un travail spécifique sur ce plan nous a paru pertinent. Nous nous sommes demandé par quel moyen ces enfants pourraient être intéressés à l'apprentissage. Dès lors, nous avons joué sur l'environnement social, en prenant un exemple précis et simple et en posant des questions claires pour éviter les débordements inutiles. Partant du principe de Claparède (1905) selon lequel : "il faudra aménager l'environnement de telle sorte que le besoin correspondant à l'apprentissage à réaliser soit activé ; il faudra réaliser une désadaptation, créer un manque, de telle manière que la réadaptation, le recouvrement de l'état d'équilibre exigent nécessairement l'émission des réponses caractérisant l'objectif", nous avons estimé que, pour les mettre en appétit et différencier notre pratique pédagogique, il ne serait pas vain de choisir un stimulus visuel, afin de construire méthodiquement l'objet à connaître, si bien que des images vidéo leurs avaient été projetées, montrant d'une part des écoliers en train de se frapper et d'autres en train de s'échanger de violentes paroles. Non seulement les images les ont captivés, mais elles les ont aussi aiguillonnés, ils sont devenus attentifs, participatifs et interactifs. En termes clairs, ce projet de recherche part de l'observation de la difficulté de compréhension et de motivation des apprenants dans l'apprentissage du philosopher. L'image vient comme moyen d'améliorer leur compréhension et de les motiver, afin qu'ils prennent facilement conscience de l'objet d'apprentissage.
2) Questions de la recherche
Deux modalités de questions serviront de fil conducteur de cette recherche : la question principale et les questions secondaires.
La question principale
Selon Beaud ( op. cit.), la question principale se situe "au coeur de la problématique", c'est pourquoi "il n'y a pas de bonne thèse sans question principale" (Ibid). La grande question suivante orientera le travail : la mise en scène de l'image peut-elle être fondatrice de l'apprentissage du philosopher à l'école ?
Les questions secondaires
Elles permettront d'aborder le problème sous plusieurs angles pour mieux le dénouer. La recherche devra donc répondre à trois autres questions qui découle de la principale :
Qs1 : l'image pourrait-elle servir de déclencheur de la parole ?
Qs2 : l'image pourrait-elle faciliter la compréhension de l'objet d'apprentissage ?
Qs3 : l'image serait-elle une source de motivation pour l'enfant ?
Les réponses à ces questions mènent à la construction d'hypothèse, que Claude Bernard (1978) définit comme une "explication anticipée et rationnelle du phénomène étudié". Elle servira de point de départ théorique de notre test, parce que l'expérimentation ne peut être réalisée que "sur les ailes d'une hypothèse" (Ibid.).
3) Hypothèses de travail
La recherche sera constituée par une hypothèse générale et trois hypothèses spécifiques.
L'hypothèse générale
L'hypothèse suivante orientera le travail :
Dans la mesure où elle est susceptible de déclencher la parole, d'inciter l'enfant à la réflexion et de le mettre en appétit, l'image peut générer un réel apprentissage du philosopher à l'école. Autrement dit, nous supposons qu'un système d'apprentissage du philosopher à l'école intégrant l'image doit conduire, à travers des activités et analyses, à l'amélioration de l'apprentissage, c'est-à-dire de la compréhension.
Ces trois facteurs mesurables s'appuient sur les enjeux majeurs de la philosophie pour enfants, à savoir le développement cognitif, avec sa clé de voute qui est la conceptualisation, ainsi que l'éveil des enfants au goût de la philosophie.
Les hypothèses spécifiques
Voici les hypothèses que nous proposons de vérifier dans le cadre de cette recherche :
Hs1 : L'image peut servir de déclencheur de la parole dans la mesure où elle pousse l'enfant à exprimer sa pensée. Parce qu'elle peut donc enclencher la parole chez l'enfant par l'interprétation de ce qu'il voit, l'image est un outil fondamental d'éducation philosophique à l'école.
La précision qu'on peut apporter ici est que l'image servira d'élément de mise en route en tant que référentiel, puis poussera l'enfant à décrire, à commenter, à expliquer et à construire des jugements critiques du point de vue de ce qu'elle est capable de transmettre. Car elle, renferme des signes, contient un message qu'il suffit de décrypter par le moyen de l'imagination et la réflexion : elle est source de connaissance. Pour y parvenir, nous nous servirons du schéma de la communication de Roman Jakobson. Ainsi, les images didactiques permettront d'inciter l'enfant à la réflexion, elles participeront à la stimulation de son imagination, au développement de sa faculté de représentation, puis l'aideront à s'exercer oralement par l'interprétation. L'image peut donc servir de stimulus, d'instrument de conditionnement d'apprentissage.
Hs2 : la mise en scène de l'image est une circonstance favorable à la compréhension dans la mesure où l'enfant peut bien se représenter clairement et saisir fort judicieusement l'objet d'apprentissage.
Précisons qu'en tant que construction et véhicule iconique, l'image devrait faciliter la saisie claire et distincte de l'objet d'apprentissage. En cela, elle répondra aux besoins des enfants en difficulté de se représenter mentalement l'objet. C'est pourquoi un intérêt sera porté au rôle de la mémoire visuelle et à l'apprentissage factuel qui sont nécessaires dans la construction du savoir.
Hs3 : l'image peut apporter de la motivation et une attitude positive dans la mesure où, par son aspect ludique, elle agrémente l'apprentissage et met en appétit les enfants désinvestis au cours de l'apprentissage.
En cela, elle pourrait aussi logiquement conduire à développer une réelle activité d'apprentissage, car l'image met en relation l'enfant et le désir d'apprendre. Là encore, l'analyse du champ conceptuel de la motivation scolaire que nous aborderons apportera plus de lumière sur ce point. Nous nous servirons de la pensée de Sophie Godard (2016) pour illustrer cette question. Mais tout autant que les hypothèses, des objectifs découleront du problème.
4) En marche vers les objectifs
C'est le but à atteindre par la recherche. Il s'agira comme tel d'un objectif général et d'objectifs spécifiques.
Objectif général
L'objectif de la présente recherche consistera à tester l'image dans l'apprentissage du philosopher à l'école. Il sera question de montrer comment l'image pourrait être un puissant levier pour apprendre à philosopher, lorsqu'elle est associée à l'expression orale. Plus spécifiquement, cette recherche estimera l'impact ou les effets de l'image sur la compréhension et la motivation des enfants pendant leur activité d'apprentissage.
Objectifs spécifiques
La recherche vise également à :
Os1 : démontrer que l'image peut servir de déclencheur de la parole pour l'enfant ;
Os2 : prouver d'une manière évidente et convaincante que l'image peut faciliter la compréhension de l'objet d'apprentissage ;
Os3 : démontrer que l'image est une source de motivation et d'apprentissage positif pour l'enfant.
Au total, trois fonctions de l'image seront expérimentées.
D) Éclairage théorique
La recherche rassemblera sous son toit quelques théories explicatives. L'approche interdisciplinaire étant celle privilégiée aujourd'hui, plusieurs approches formeront une chaîne pour expliquer la démarche par l'image. D'abord, une référence majeure sera faite aux modèles didactiques, à savoir l'enseignement explicite (Hattie, 2009) et l'enseignement expérientiel de Kolb ( op. cit.), dans la mesure où ce dernier postule que l'immaturité de l'enfant n'est pas un manque, elle est plutôt la base à partir de laquelle il va pouvoir faire des expériences ; c'est selon lui "une force positive, une capacité d'agir, une possibilité de croissance qui ne demande qu'à être stimulée et dirigée". Ces deux modèles présentent un intérêt certain. L'un suggère de rendre l'objet d'enseignement clair, l'autre propose qu'on se serve de l'observation afin de développer l'intelligence.
Nous serons ensuite amenés à aborder certains modèles pédagogiques et psychologiques à l'instar de la pédagogie par l'image, encore appelée "enseignement par les yeux" ou "par l'aspect". L'interactionnisme sera aussi privilégié. Notre démarche intègrera aussi la théorie instrumentale du "hands-on Learning" ("apprendre par l'action") de Dewey (1938). Puisque les thèmes à aborder partiront d'un outil matériel et technique en rapport avec l'environnement de l'enfant, cette recherche s'appuiera également sur le modèle socioconstructiviste de Vygotski (1985), qui insiste sur le rôle des outils sémiotiques et matériels dans l'apprentissage, en tant que véritables productions culturelles susceptibles de véhiculer des schèmes de pensée et de valeur de la société dans un cadre d'interaction. Afin de bien conduire l'expérimentation, seront attendus des enfants, l'émulation et le plaisir d'apprendre (Bandura 1994), de façon à être acteurs de leur propre apprentissage, c'est-à-dire co-constructeurs de leurs savoirs. Nous nous servirons à cet effet des théories de la motivation scolaire et celles du conditionnement (Pavlov, Skinner) qui insistent toutes sur le rôle central de la stimulation dans l'activité de l'apprentissage. Cette réflexion théorique s'appuiera conséquemment sur la théorie constructiviste qui met en avant l'activité du sujet pour se construire un savoir, une représentation de la réalité qui l'entoure. Les approches philosophiques telles que l'empirisme-associationniste anglais, le rationalisme, l'idéalisme, l'herméneutique, etc., éclaireront notre analyse.
II) MÉTHODOLOGIE
A) Le type de recherche à réaliser
Le type de recherche qui se prête à la rédaction de ce projet est exploratoire. À cet égard, le design choisi est la recherche expérimentale. En utilisant cette méthode, il s'agira pour nous de tester l'image dans un contexte d'apprentissage. Mais notre démarche ne sera pas uniquement une expérimentation, elle relève aussi d'une recherche fondamentale, puisque l'un des objectifs majeurs demeure celui d'étudier, de comprendre, puis de communiquer les conditions et les résultats du test.
B) Mise au point de l'échantillon
C'est l'opération par laquelle se constituera l'échantillon de l'étude, c'est-à-dire les sujets destinés à l'enquête. Cette étape prend en compte :
1) Les caractéristiques de la population d'étude
La recherche s'intéressera à l'ensemble d'enfants-apprenants du cours moyen première année, dont l'âge varie de 7 à 9 ans, qui correspond à l'avant-dernière année du troisième cycle du primaire. La sélection des participants s'effectuera au terme d'un entretien direct avec les Directeurs des différentes écoles sollicitées, consentant à faire participer les enfants du CM1 à l'atelier. Dans la classe d'expérience, 15 enfants vont participer au total et 10 pour la classe contrôle. L'enquête ne pouvant pas être appliquée sur l'ensemble de la population parente très large, il s'agira, à travers cet échantillon, de généraliser les résultats sur l'ensemble de la population parente.
2) La technique d'échantillonnage
Pour constituer l'échantillon, nous procèderons par randomisation, c'est-à-dire en choisissant de manière aléatoire les sujets, ainsi que leur répartition dans les groupes. Cette technique offre à tous les apprenants la possibilité de participer à l'enquête, c'est-à-dire de faire partie de l'échantillon. Nous déterminerons la taille de l'échantillon en indiquant à Modalisa (logiciel de traitement de données) le nombre de questionnaires (n) que nous souhaitons sélectionner. La combinaison CnN permettra de calculer le nombre d'échantillons qu'il conviendra de former à partir de la population totale composée de N enfants. Cette technique d'échantillonnage présente l'intérêt d'obtenir une estimation de la moyenne et de la variance de la population non biaisée.
3) Les variables
Le test devra manipuler la variable indépendante (l'image) dont on s'attend à ce qu'elle produise un effet présumé sur la variable dépendante (l'apprentissage du philosopher chez les enfants), si l'on s'en tient à la théorie de (Hess, Sénécal et Vallerand, 2000). C'est pourquoi pour isoler les effets de l'image, nous nous appuierons sur un groupe contrôle.
C) Données de terrain : source et moisson
Les données recueillies proviendront directement des sujets. Concernant les instruments d'investigation de terrain, l'approche mixte sera privilégiée, parce qu'elle combine différents types de données, quantitatives et qualitatives :
- les données quantitatives : elles seront recueillies à base des questionnaires qui seront administrés aux enfants. Il s'agit des modèles validés de la motivation scolaire de Denise Barbeau, le TSIMS4 (1993) forme papier-crayon et le QACCS (5) (1991) forme papier-crayon). Le TSIMS évaluera le degré de motivation des enfants. Quant au QACCS, il évaluera l'enclenchement de la parole par l'image au début de l'expérimentation. Il sera donc attendu de ces outils des informations fiables sur les résultats de l'apprentissage. On fera aussi appel à l'échelle d'intelligence pour enfants de Wechsler (1996), le WISC-III, pour évaluer le degré de compréhension des sujets.
- les données qualitatives : elles seront moissonnées ad intra par l'observation participante (qui permet la prise d'information approfondie et fournit du matériel de première main) et l'enregistrement audio-visuel. Ces deux modes de collecte de données (qualitatif et quantitatif) apporteront des informations complémentaires.
D) Traitement et analyse des données
Au regard de chacune des qualités de données à recueillir, l'analyse de contenu sera employée pour l'observation. L'enregistrement audio-visuel sera transcrit afin d'être analysé dans son contenu. Les données quantitatives feront appel à l'analyse statistique, après dépouillement des questionnaires et le test psychométrique.
E) Planification et déroulement de l'expérimentation
La démarche didactique reposera sur le modèle d'apprentissage expérientiel de David Kolb (1984). L'idée serait de réaliser sur une certaine durée une série intermittente d'expérimentations (un apprentissage multi-épisodique) au cours desquelles des planches images ou des vidéos seront abordées. Le protocole expérimental comprendra trois étapes : pré-test, test et post-test. Ces phases proprement dites se dérouleront successivement dans le cadre normal d'une séquence didactique aménagée pour la circonstance. À cet effet, la population d'enquête sera répartie, grâce à la randomisation, en deux groupes : un groupe de contrôle (ou groupe témoin) constitué de 10 sujets et un groupe test fait de 15 sujets. Pour les trois expériences, le plan de recherche est le suivant :
Tableau 1 : le plan des trois expériences (élaboré à partir des travaux de Clairelise Bonnet et al., 2012).
  | Pré-test | Test | Post-test |
---|---|---|---|
Classe d'expérience |
Évaluation : - déclenchement de la parole -compréhension - motivation |
Séquence "innovante" Apprentissage du philosopher par l'image |
Évaluation : - déclenchement de la parole -compréhension - motivation |
Classe contrôle |
Évaluation : - déclenchement de la parole -compréhension - motivation |
Séquence "traditionnelle" Apprentissage ordinaire (sans image) |
Évaluation : - déclenchement de la parole -compréhension - motivation |
La feuille de route prévoit aussi une planification de la séquence d'enseignement-apprentissage, avec un calendrier d'activités à mener uniquement dans la classe d'expérience. C'est pourquoi le plan indique que la classe contrôle ne subira pas de test. L'intervention proprement dite durera quatre semaines (dont 45 minutes par séance et pour chaque atelier). Lors de la phase exploratoire, les outils de collecte de données seront testés, ainsi que le dispositif expérimental. Les enfants travailleront dans leurs salles de classes selon le calendrier adopté. Un double dispositif d'enseignement-apprentissage sera mis en place avec en liaison avec les conclusions de la phase pré-expérimentale. Le premier volet sera destiné au groupe de contrôle. En présentiel, ils suivront une leçon sur des thèmes variés. Le second volet concernera les groupes test qui travailleront également en présentiel. Le troisième concernera encore le groupe témoin, pour vérifier s'il y a eu changement.
F) L'évaluation
Autant que possible, elle se fera au moyen d'une même tâche qui sera utilisée pour mesurer l'effet de l'image. Des épreuves ad hoc seront construites à cet effet à base d'une combinaison de l'échelle verbale et l'échelle de performance du WISC-III. L'échelle verbale portera sur les références catégorielles, la capacité du sujet à conceptualiser et, permettra d'apprécier si le sujet se concentre sur l'essentiel ou sur le détail. Elle permettra de voir la capacité à ranger les images dans des catégories. Les facteurs à mettre en jeu sont les suivants : l'abstraction, la conceptualisation, les références / référenciation catégorielle(s), le raisonnement logique et la capacité de synthèse. L'échelle de performance quant à elle renseignera sur la capacité de se représenter et d'interpréter l'image dans sa totalité. Les facteurs impliqués seront : la perception fine et attention au détail, l'organisation spatio-temporelle, la conceptualisation / abstraction, la capacité d'analyse et de synthèse, l'anticipation. Pour chaque question de subtest, le sujet recevra soit zéro, soit un ou deux points. Ainsi, la somme obtenue tiendra office de note définitive qui sera comparé aux autres réponses des deux questionnaires.
Afin de ne pas s'en tenir à des impressions subjectives vis-à-vis de l'intervention, les avis des enfants sur la façon dont ils perçoivent l'impact de l'image sur leur apprentissage seront recueillis avant et après l'intervention, à base des tests de questionnaires. Dans leur élaboration, les questionnaires contiendront 08 items divisés en deux sous-échelles correspondant aux indicateurs de la fonction de l'image : comme déclencheur de la parole, comme facilitatrice de la compréhension de l'objet d'apprentissage et comme stimulus. Lors de la passation, nous lirons et expliquerons chaque item aux enfants, qui doivent répondre sur une échelle de type Likert en trois points : "tout à fait"1, "légèrement"2 et "pas du tout"3. Chacun des points sera accompagné d'image sous forme d'émoticônes, le but étant de leur offrir une expression symbolique de leurs sentiments. Le premier questionnaire sera fait à l'aide d'une grille préliminaire et sera réalisé lors de la première séance. Cette évaluation concernera les impressions des participants face à l'apprentissage sans image. Le questionnaire comprendra huit affirmations sur la démarche utilisée, leur propre compréhension et l'intérêt suscité par l'outil. Pour chacun de ces points, il sera demandé à chacun des participants de donner son avis. Lors de la seconde évaluation de questionnaire pendant la deuxième séance, chaque participant récupèrera son premier questionnaire afin de comparer ses propres réponses pré et post-intervention. Cette démarche permettra de recueillir le degré de satisfaction et l'impression des participants quant à la méthode utilisée et l'enrichissement personnel procuré par l'apprentissage par l'image.
Au bout du compte, l'échelle d'apprentissage sera obtenue par l'addition des résultats des questionnaires, des tests et l'observation ; ce qui veut dire que chaque évaluation et mesure représente le même poids. Le score brut sera utilisé pour effectuer les analyses statistiques.
G) Méthode de présentation des résultats et discussion
Les résultats obtenus au terme de l'expérimentation seront présentés par rubrique, c'est-à-dire par test. Ensuite, ils seront confrontés à chaque hypothèse pour vérifier la validité de celles-ci : ils confirmeront ou infirmeront nos hypothèses. Enfin, ces résultats seront débattus. Nous ferons aussi état des limites et difficultés de l'étude, puis une recommandation.
H) Intérêt de la recherche
Ils sont d'ordre méthodologique, cognitif, social et didactique :
- L'enjeu cognitif : la recherche s'intéressera aux processus mentaux qui se rapportent à la connaissance : les opérations logiques, le développement cognitif. Car, il s'agira, à partir de l'image, de stimuler l'imagination et d'inciter l'enfant à la réflexion.
- L'enjeu social : la recherche permettra de mieux comprendre comment les images reçues peuvent éduquer les enfants aux valeurs fondamentales de la citoyenneté : elle a une visée éthique.
- L'enjeu didactique : il est évidemment central, parce que le sujet vise à réinvestir l'image dans l'apprentissage et développe une nouvelle démarche en matière de philosophie pour enfants.
III) ÉCHÉANCIER
Concernant la progression du travail, nous proposons, dans l'ordre des temps, le déroulement suivant :
Première année
Il sera question, dans cette première phase de la thèse, de faire une bonne revue de la littérature, en parcourant les bibliothèques physiques et électroniques. Mais la condition sera, sans doute, de participer à tous les séminaires, en s'impliquant dans diverses recherches du laboratoire. Cette même année, sera entamée l'étape du paramétrage du dispositif expérimental.
Deuxième année
Nous passerons alors à l'étape dite d'expérimentation "par laquelle s'effectue un va-et-vient entre l'expérience de pratique et la réflexion sur cette expérience" (Desgagné, 2007). Le travail théorique se poursuivra durant cette deuxième année. L'objectif sera de réaliser l'expérimentation.
Troisième année
C'est l'étape finale qui consistera à traiter et présenter les résultats. Desgagné (Ibid.) précise qu'il y a deux instances de coproduction : la première qui correspond à la phase de reconstruction des récits et qui se réalise avec les personnes ; la seconde qui correspond à la phase d'analyse, et où le chercheur est seul au travail. Cette étape conduira au dépôt de la thèse et à son évaluation finale par le jury.
Ajoutons, enfin, que chaque étape sera supervisée par les Directeurs, par le moyen d'un compte rendu quotidien qui leur sera fait.
En guise de conclusion
Le présent projet doit être vu comme une forme préparatoire de la recherche dont seules les parties saillantes sont abordées plus ou moins sommairement, mais qui a la prétention de donner l'idée de la recherche, quant aux étapes, conditions, temps et moyens de sa réalisation. C'est donc le stade embryonnaire de la recherche.
(1) L'image n'est pas à comprendre ici au sens de ressemblance ou d'idée. Elle est, bien au
contraire, à saisir au sens empirique, c'est-à-dire en tant que représentation matérielle
d'individus ou d'objets, par le dessin, les fresques, les gravures, les sculptures et
enluminures qui sont aussi des objets d'art, les photographies, les vidéos, etc.
(2) Cratyle, La République (Livre 10),
Le Sophiste (235d), Phédon (72e),
Ménon (80d), etc.
(3) De 1933 à 1939 par exemple, il se consacra à l'étude de Husserl : La
Théorie de l'intuition à la phénoménologie, les Méditations
cartésiennes et les Idées directrices pour une
phénoménologie.
(4) Test sur les Sources et les Indicateurs de la Motivation Scolaire.
(5) Questionnaire sur les Attributions Causales en Situations Scolaires.