Dans le cadre du séminaire sur les Nouvelles Pratiques Philosophiques de juillet 2014 à Sorèze, a eu lieu une consultation philosophique entre Michel Tozzi et René Guichardan. Il nous a semblé utile de l'analyser comme exemple, de façon à développer la réflexion et des outils d'analyse sur cette nouvelle pratique. Ci-dessous l'autoanalyse du "consultant".
I) Consultation philosophique : de quoi s'agit-il ?
La consultation philosophique, même si elle revendique une filiation ancienne, est apparue sous sa forme moderne dans les années 1980, avec Gerd Achenbach (voir plusieurs articles sur cette pratique dans des numéros de Diotime). C'est une pratique qui s'inscrit dans la configuration des NPP (Nouvelles Pratiques Philosophiques). Elle vaut selon nous la peine d'être expérimentée, car elle teste la capacité d'une pratique philosophique à aider quelqu'un à approfondir une question qu'il se pose en relation duelle. Elle doit être de ce fait réfléchie et si possible théorisée.
Nous la définirons comme un entretien entre deux personnes où l'une demande à son initiative à un consultant qui a une formation philosophique de l'aider à approfondir une question qu'il se pose, pour qu'il trouve si possible sa propre réponse. Il ne s'agit en aucun cas, comme le faisait Socrate, de "coincer" quelqu'un qui croit savoir (du type du sophiste), ou de l'amener à une réponse à sa question (comme dans la dialectique ascendante de Platon), ou de répondre à la question à la place du demandeur (comme si l'accompagnateur détenait la solution), mais de l'accompagner dans une démarche à visée philosophique pour qu'il chemine dans sa propre réflexion sur cette question. La notion d'accompagnement nous semble appropriée, car il s'agit d'être à côté de quelqu'un (et non devant pour le tirer quelque part), de le soutenir dans un effort intellectuel, avec des moyens adéquats (ceux de la philosophie), et à son rythme. Accoucheur serait aussi une métaphore porteuse...
La consultation philosophique n'a pas un objectif thérapeutique, même si de tels effets peuvent se produire de surcroît. Elle ne travaille pas sur et avec l'inconscient, ni ne postule son existence ou non, simplement elle ne le prend pas en compte. Elle travaille avec les outils propres à la philosophie, qui préconise une démarche consciente et rationnelle, avec la mise en oeuvre d'un certain nombre de processus de pensée : une façon rationnelle de poser des questions, d'élaborer des problèmes, de construire des concepts, de configurer des distinctions conceptuelles, d'analyser des exemples ou des situations, de déconstruire des opinions, d'argumenter des réponses, de produire des objections, surtout à soi-même, de répondre aussi à des objections etc. Ce sont ces démarches et ces outils intellectuels, nourris par une culture philosophique de fond, qui me servent d'appui dans la pratique analysée ci-dessous, du point de vue de l'accompagnateur.
Je distinguerai dans l'architecture de cette consultation trois parties, qui scandent son rythme : après l'énoncé d'une question, une première réponse et ses explications ; puis un moment d'émotion qui neutralise la réflexion ; enfin, après la reprise réflexive, une seconde réponse est apportée, plus nuancée et plus ouverte. Le demandeur a donc évolué dans sa pensée. Il a aussi vécu une traversée de l'affect vers le concept... Le texte s'ouvre sur une question abstraite, et déploie deux réponses différentes, dont la seconde nuance la première, avec une pause émotionnelle au milieu. Il se conclut sur deux synthèses récapitulatives.
Je mettrai dans le texte en gras ce qui m'apparait comme des "gestes professionnels" de la visée philosophique de l'entretien.
II) La question posée, la première réponse et ses explications (des lignes 7 à 58)
A partir du moment où quelqu'un est volontaire pour s'impliquer dans une consultation (il s'agit dans le contexte d'un entraînement pour les deux protagonistes de l'entretien), la première étape consiste pour moi à faire préciser la question du demandeur. Partir d'une question me semble essentiel : une question, car l'interrogation d'une question met en recherche de réflexion, et une question que l'on formule soi-même, pour se mettre soi-même devant la question que l'on se pose, et s'y impliquer : quand on pose une question, on a envie d'une réponse. Quand on se la pose à soi, on a envie d'y répondre (motivation à cheminer, enrôlement dans une dé-marche).
Il faut six tours de parole pour qu'un simple intérêt manifesté devienne une question. Je reformule la question dans les termes même du demandeur, pour qu'il entende lui-même sa question et la valide. Entendre sa propre question dans la bouche d'un autre lui donne un statut de question posée. L'entendre devant témoin engage à tenter d'y répondre, à prendre l'autre à témoin d'un effort de réflexion, comme un contrat implicite déjà inclus dans le volontariat de la démarche.
Cette question sera pour moi le fil directeur de l'entretien, et je ne la lâcherai plus : tout doit en partir et y ramener, pour qu'il y ait approfondissement réflexif... Je reprendrai plusieurs fois cette question de départ ("Est-ce que philosopher, c'est possible pour chacun ?"), comme un motif périodique (récurrence spiralaire), qui scande la séance comme fil directeur du questionnement (13, 19, 80, 82, 86, 103, 123).
Cette question est essentielle pour René, qui est animateur de café philo et webmaster d'un site sur les cafés philo, contribution qu'il pense devoir à la société. Mais aussi pour moi, car les enjeux sont forts : cette pratique implique un postulat d'éducabilité philosophique, et le remettre en question oblitérerait l'intention démocratique de la démarche ("Rendre la philosophie populaire" selon Diderot). Or l'entretien montrera dès le début que René en doute... ce qui me dérange et me motive à la fois !
Je demande pourquoi il se pose cette question, et il oppose, en maniant des métaphores spatiales, la verticalité qui lui semble nécessaire pour philosopher à une circularité plutôt stagnante, plutôt horizontale malgré une spiralité souvent convoquée : j'acte son doute (17), premier indice pour moi d'une réponse négative, mais à confirmer. Je le remets alors devant sa question, et teste s'il a déjà une réponse, à laquelle je donne un statut d' hypothèse (22), pour l'examiner. Toute affirmation ou réponse doit avoir et garder un statut épistémologique d'hypothèse, dont je suis le garant, qui assure sa condition de sa discutabilité. Pour qu'il se détermine clairement, je demande s'il répond plutôt oui ou non, et il prend alors clairement une orientation négative. L' intérêt de l'alternativeest de le confronter à deux réponses contradictoires, qui l'obligent à pencher d'un côté. Ayant formulé une thèse ("plutôt non" 27), il faut maintenant qu'il l' argumente (Pourquoi ? 28). Il reprend l'argument d'une pensée circulaire, et je lui demande de définir cette circularité (30). Il répond tourner en rond, expliquer sans éclaircir. Je reformule "sans progrès ou étape". Il ajoute sans clarté ni recul. Difficile d'aller plus loin... sans tourner en rond !
Je demande alors une exemplification (36). L'exemple permet de sortir de considérations trop générales ou d'une stagnation de la pensée, en fournissant un matériau d'analyse pour avancer. René n'en trouve pas immédiatement. Pour l'aider, je contextualise : et au café philo ? (39). Il trouve une personne qui se répète. Il tente une description : pas d'intériorisation d'elle-même (43), et des explications extérieures (45).
Je demande ce qui permettrait à cette personne de sortir de cette circularité, puisqu'elle enferme la pensée (48). C'est de laisser dit-il, avec le temps, "plus d'espace à la discussion" (51). René énonce ici une première condition d' "élargissement de la pensée" (Kant) : entrer dans la discussion. Je reformule par la notion d' "ouverture" (54). Mais René poursuit sur les raisons de la fermeture par l'hypothèse de "divisions structurelles" internes (57). J'acte et réoriente sur les conditions de l'ouverture (58).
III) La pause réflexive avec le moment-émotion (58-75)
Surgit alors un moment d'émotion, totalement imprévu pour moi dans cette discussion rationnelle. Il y a là ce que l'on peut appeler un "incident critique", dont je n'ai pas la clef, qui rompt la progression réflexive engagée, entraine une rupture de rythme. Quelque chose est ravivé chez René par rapport à l'attitude de fermeture/ouverture, qui résonne affectivement, qui lui appartient, que j'ignore et qui m'échappe. L'accueil de l'émotion dans le silence et la mise en mots de ce qui arrive me semble la seule attitude éthique en la matière, en assumant dans ce moment ma propre émotion empathique, afin de continuer notre entretien. Je suspends un temps l'orientation cognitive de l'entretien, et acte ce moment : je dis ce que je fais ("J'accueille l'émotion" (67), je décris "Tu accueilles en toi l'émotion" (64) (René dira qu'il a lui-même été surpris par cette montée émotionnelle (77).
Puis partant de l'expression de cet affect, et sans tenter de le traiter psychologiquement, je tente de le réintégrer dans un processus réflexif, de réenclencher de la pensée : que produit une situation d'écoute (des affects) sur une personne (65) ? Et sur la construction de sa propre pensée (68) ? René analyse finement que le fait d'être écouté et de parler donne une forme symbolique à des affects non symbolisés (69). Il découvre qu'en parlant d'une autre personne il parle de lui, et qualifie ce processus de "transfert" (73). Il convoque ici un savoir psychanalytique qui lui donne des clefs pour sa propre compréhension. On est ici dans un moment de connaissance de soi. René est-il alors dans son propre désir de philosopher ou dans le mien, et comment les deux s'articulent-ils ? Je ne m'engagerai pas plus avant sur le processus de transfert dans l'entretien lui-même. Car ce qui m'intéresse en tant que philosophe, c'est le travail intellectuel accompli en commun...
Cet épisode significatif m'amène à formuler les questions suivantes, d'ordre plus général : comment traiter dans une consultation philosophique l'irruption d'un affect, imprévue mais toujours possible quand il y a implication dans la question posée ? Comment, au-delà de l'expression d'un vécu et de son accueil, tenter si c'est possible de l'articuler conceptuellement ? Comment réorienter et poursuivre l'entretien philosophiquement, et ne pas emprunter la voie de son traitement spécifiquement thérapeutique (je suis incompétent sur ce point), alors que le demandeur évoque explicitement cette voie par ses allusions au transfert en 73, et à la thérapie en 77 ("Tu es dans une relation aussi thérapeutique") ?
IV) La deuxième réponse plus nuancée et les conditions à réunir pour philosopher (76 à 130)
Je reprends alors la réflexion sur les conditions d'une ouverture de la pensée (76). Et je propose d'explorer ce dont il vient d'être question, l'écoute. René relaie sur l'estime qu'elle crée et l'intimité qu'elle procure (77). J'interroge sur leurs effets possibles sur la capacité à conceptualiser (78), et sur le lien entre l'écoute des affects et le désir de philosopher (80). René apprécie l'aspect libérateur de l'expression des affects, mais pense qu'il faut quelque chose de plus pour penser (83). Je demande de préciserquel est ce plus ? Il répond une exigence avec soi-même de cohérence. Je reformule : dont l'absence, ce serait une seconde hypothèse, empêcherait certains de philosopher (88). - Je demande pourquoi. - Parce que la rigueur ne les "tient" pas (90). - C'est-à-dire ? ( Demande de précision) - Il n'y a plus de régulation de la pensée (92). Je demande si on peut être aidé dans ce cas (93). - Seulement si on pense que la cohérence est importante dans la construction de soi (94), rapprochée de la construction de sa pensée (96). Comme René associe verticalité et tenir droit (96), j'associe alors avec l'idée de tuteur (97), qui aide à tenir debout. La métaphore est toujours stimulante, car elle amène des associations d'idées, qui, si elles ne sont pas d'emblée conceptualisées, ont cependant une fonction heuristique. René évoque dans cette perspective l'intérêt du groupe, et de l'observation de sa propre pensée (98). Je note cette autre hypothèse : ne pas pouvoir observer celle-ci serait un obstacle à sa propre pensée (99). Il ajoute que l'on peut aider la personne, mais seulement si elle le demande (102), je dis désir, il reprend volonté. - Mais même avec le désir, ça n'arrive pas parfois à construire (106). On peut être sincère et tourner en rond (112), d'où l'intérêt d'une aide extérieure. Je reformule la nécessité d'une extériorité. René y apprécie la bienveillance et la cohérence.
En 117, je fais une longue synthèse en trois pôles : motivation, appui extérieur et rigueur, et demande comment les articuler. La demande d'articulation d'idées entre elles renforce la cohérence d'une pensée, et oblige à trouver de nouveaux liens. René articule alors en voyant dans l'appui extérieur à la fois une reconnaissance (des affects) de la personne et une consistance logique de la pensée (119). Il indique que la reconnaissance par l'autre permet dialectiquement la reconnaissance de soi (122).A ma demande de reformulation de là où il en est sur sa question, celui-ci répond que chacun peut philosopher : "c'est possible avec beaucoup de conditions" (124), modifiant ainsi sa position première négative, la nuançant. Il a donc évolué depuis le début. Je lui demande une synthèse : énumérer ces conditions, sorte de récapitulation de ce qu'il a découvert en cheminant. Et il résume : écoute des affects, reconnaissance, cohérence, sentiment de construction, d'avancée (128). Le demandeur liste lui-même ainsi les acquis de son cheminement. J'ai ouvert la voie par ma synthèse antérieure en 117 : ne fait-il que répéter ce que j'ai dit, où (se) reconnait-il lui-même dans son cheminement en nommant ses trouvailles ? Il termine sur le fait que c'est le désir de philosopher qui est déterminant, car à l'origine du processus (130).
V) Quelques éléments structurants de la consultation
1) Les gestes professionnels de l'accompagnateur
Ce que j'observe, c'est que René construit sa propre pensée avec mon aide, qui consiste en " gestes professionnels" d'une visée philosophique de la réflexion. Dans cette consultation par exemple : faire préciser une question, son origine dans la vie intellectuelle de la personne ; donner le statut d'hypothèse, jamais de vérité , à une idée, une réponse à une question ; demander de définir un mot, une expression employés, ou de distinguer des notions ; toujours partir de ce qui vient d'être dit en le reformulant, et en demandant d'aller plus loin ; demander un exemple (ce pourrait être un contre exemple), contextualiser pour trouver un exemple, et le faire analyser ; demander un argument à l'appui d'une affirmation ; poser des questions ; pointer des concepts amenés, des distinctions conceptuelles esquissées ; travailler sur les conditions à réunir pour que ; revenir périodiquement à la question de départ (spirale) ; ouvrir de nouvelles pistes ; garder en mémoire ce qui a été déjà dit pour faire des liens, et une synthèse récapitulative du cheminement ; associer et filer des métaphores, demander au demandeur de faire la synthèse de son cheminement...
Les procédés récurrents de ma conduite sont la reformulation et le questionnement, souvent d'ailleurs enchaînés/enchâssées dans cet ordre dans la même intervention. La reformulation parce qu'elle renvoie en miroir ce qui vient d'être dit, et l'acte comme un acquis, un jalon dans la progression. Ce renvoi a une fonction d'ancrage pour le demandeur dans sa propre pensée, et de repère pour le meneur, facilitant ainsi sa mémorisation du parcours effectué. Le questionnement fait toujours suite à ce qui vient d'être dit (d'où l'image de rebondir), pour enclencher des processus variés, sélectionnés dans le répertoire des opérations réflexives : préciser, définir, développer, distinguer, argumenter, exemplifier etc. Ce questionnement est le moyen didactique d'exercer une influence sur la pensée de l'autre, non pour qu'il donne une réponse attendue, mais pour qu'il construise et déploie sa propre pensée par la mise en oeuvre de processus réflexifs (définition, conceptualisation, mise en relation du concret-vécu-particulier et de l'abstrait-général, analyse, argumentation..).
2) La question de temporalités distinctes
a) Le temps de l'entretien était contraint en tant qu'exercice, dans le cadre d'un emploi du temps plus global (macro du séminaire). Je gérais donc le temps méso limité de la séance : faire advenir une pensée co-produite en un capital-temps déterminé, sans précipitation, en trouvant le bon rythme, avec une conclusion récapitulative si possible probante, c'était le challenge. Ne pas se stresser, partir de l'idée positive que l'on y arrivera, et cheminer, sans trop savoir ce qu'il adviendra (j'ignore au départ la question qui sera choisie, et j'accompagne quelqu'un là où il veut bien aller, et non là où je veux qu'il aille), mais confiant (car je crois savoir faire en sorte qu'il n'aille pas n'importe où)...
b) Je constate dans l'entretien des temps de parole et des temps de silence. Mes questions produisent le plus souvent de la parole, et parfois du silence. Mais il y a deux types de silence : le silence émotion, temps de l'émotion (58), et le silence réflexif, temps de la pensée (47). Dans le temps de l'émotion, la pensée semble court-circuitée. Il faut réfléchir à l'articulation de ces deux temporalités, comment elles se neutralisent, mais parfois s'étayent. De même, il y a différents temps de la pensée : il y a celui de la parole, où la pensée se construit dans et par le langage oral, et celui du silence, où la pensée se construit dans un langage intérieur, dans le face à face avec soi-même, mais en présence d'un témoin attentif qui joue le rôle d'interlocuteur intériorisé.
c) Il faut creuser aussi la façon dont se vit la temporalité selon la place des acteurs, ce qui est peu perceptible pour un observateur extérieur. J'ai vécu l'irruption de l'émotion comme une pause dans la réflexion, sa mise entre parenthèses, et même un dérangement dans la progression que j'installais. Il fallait accueillir, donc cesser mes questions.
Par ailleurs, avant et après ce moment, quand j'accompagne la réflexion et co-construis une progression, je gère ( multiagenda), l'engrangement du nouveau qui est apparu et que je garde en mémoire à moyen terme (temps méso), et le temps-micro des tours de parole pour relancer et faire avancer, d'une part avec en fond de mire les processus de pensée à activer chez mon interlocuteur, et d'autre part à l'affût du kairos toujours potentiel.
d) Je distinguerai enfin un temps psychologique, celui du vécu émotionnel et son partage, et un temps cognitif, celui de la co-production d'une pensée.
J'insiste sur cette co-construction, car René réagit en permanence par rapport à mes questions, mais celles-ci n'ont de sens qu'à partir de ce qu'il vient juste de dire. Comme il s'agit d'un dialogue à deux et non à plusieurs, qui alterne systématiquement les tours de parole, il y a une grande cohérence interphrastique et intellectuelle dans le texte tissé, ce qui lui donne au total une consistance intertextuelle, les processus de pensée assurant la tenue cognitive de l'ensemble. Les deux synthèses finales ponctuant rétrospectivement le chemin parcouru, en articulant le chronologique et le logique.
3) L'isomorphisme entre le discours tenu et la situation vécue
Je fais enfin l'hypothèse que l'homologie entre la situation vécue et le discours tenu, qui en est pour ainsi dire la formalisation conceptuelle, est un facteur d'efficacité de la consultation. René met en forme discursive ce qu'il éprouve : sur fond d'un désir de philosopher, et donc de dépasser des obstacles à cette exigeante activité intellectuelle, notamment les troubles émotionnels, il trouve une forme d'écoute bienveillante qui, d'une part en accueillant son affect et reconnaissant sa personne, d'autre part en maintenant un tutorat externe fondé sur une rigueur cognitive (tenir un fil directeur, incitation vigilante sur les processus de pensée...), lui permet de construire sa pensée.
Conclusion
Une consultation est une aventure à deux. Nul ne sait ce qui va advenir, et ce serait forcément différent avec un autre des deux. A chacun sa question particulière, son désir d'approfondir et le degré de son implication, ses compétences réflexives ; à chacun sa conception et sa pratique de la consultation, son style d'animation, ses gestes professionnels, ses exigences intellectuelles. Là est tout l'intérêt d'une coproduction. S'il y a bien deux places spécifiques, leur articulation donne un cheminement inédit, dont nul ne peut prédire ce qu'il en sortira, car on combine deux singularités...