Revue

L'éthique dans l'enseignement en matière de religions en Suisse romande

En préparant cette contribution, j'ai lu avec intérêt le Rapport remis en avril 2013 par la Mission sur l'enseignement de la morale laïque au Ministre de l'Education nationale français, M.Vincent Peillon, et j'ai pu relever avec plaisir que, parmi les cas retenus en vue d'une comparaison internationale, figurait également la Suisse1. J'étais néanmoins un peu surpris du rôle de premier plan accordé à l'enseignement dans le canton des Grisons "où, de 2012 à 2017, l'un des deux cours hebdomadaires de religion sera progressivement remplacé par un cours d'éthique et de cultures religieuses" (p. 53)2. Bien sûr, l'organisation scolaire dans ce canton au coeur des Alpes est en soi très intéressante, mais l'accent mis sur ce cas peut sembler assez arbitraire. Dans ces pages, je me propose donc d'élargir quelque peu le cadre. Mon intention n'est pourtant pas de multiplier les exemples, mais de fournir - de manière succincte - une vision d'ensemble, bien qu'axée sur la partie francophone du pays.

Comme l'indique le document de synthèse annexé au Rapport, l'enseignement de la morale en tant que branche autonome n'existe pas dans le système scolaire suisse (p. 53). Cependant, des objectifs d'enseignement proches de ce sujet peuvent être clairement repérés dans plusieurs domaines de la formation scolaire. Mon attention se concentrera sur la place réservée à l'éthique dans le cadre d'un enseignement en matière de religions à l'école obligatoire3. Je chercherai en particulier à déceler les espaces qui pourraient "s'inspirer des nouvelles pratiques philosophiques, du type de la discussion philosophique".

Dans un premier temps, je présenterai les cadres juridiques qui régissent l'organisation de l'enseignement religieux scolaire sur sol helvétique, et esquisserai les traits distinctifs des réformes récentes dans ce domaine. Dans un deuxième temps, je me pencherai sur le rôle de la problématique éthique dans les processus politiques qui ont accompagné ces réformes, pour me tourner ensuite vers la présentation de l'éthique dans les programmes et les manuels scolaires à partir d'exemples choisis. Je terminerai avec quelques considérations à partir de ma discipline académique, la science des religions.

I) Les évolutions récentes de l'enseignement religieux en Suisse

En Suisse, le pouvoir du Gouvernement fédéral en matière de gestion scolaire et de réglementation des rapports entre Eglise et Etat est très restreint. Ces domaines peuvent être considérés comme de véritables bastions du fédéralisme et leur gestion revient aux cantons4. A fortiori, l'organisation d'un enseignement religieux à l'école est une question éminemment cantonale, la Constitution fédérale se limitant à garantir la liberté de conscience et de croyance des élèves, en précisant à l'article 15 que "Nul ne peut être contraint [...] de suivre un enseignement religieux" - ce qui signifie, concrètement, qu'une possibilité de dispense doit être prévue pour ces cours5. Historiquement, ces cadres juridiques ont permis le développement d'une grande variété de modèles cantonaux d'enseignement religieux, allant d'un cours sous la responsabilité de l'Eglise catholique ou réformée, à différentes formes de coopération entre l'Eglise et l'Etat, ou encore à l'exclusion de ces cours du programme scolaire.

Les différents modèles cantonaux se cristallisent vers la fin du 19e siècle et demeurent pratiquement inchangés tout au long du 20e siècle6. Toutefois, à partir des années 1990, la majorité des cantons suisses et la totalité des cantons romands entament des réformes de cet enseignement. Bien que les débats se déroulent de manière autonome dans chaque canton, il est possible d'observer des tendances communes à travers le pays. En premier lieu, tous les projets de réforme confèrent à l'Etat la gestion de l'enseignement religieux à l'école. L'organisation des cours, le choix des contenus et la formation des enseignants reviennent désormais aux autorités publiques. Deuxièmement, le programme des cours est révisé afin de présenter une pluralité de religions et, souvent, de visions du monde non religieuses. Troisièmement, la nouvelle branche s'adresse désormais à tous les élèves, indépendamment de leur appartenance (ou non-appartenance) religieuse. Finalement, dans la majorité des cantons, la possibilité de dispense est abrogée, car les nouveaux cours sous la responsabilité de l'Etat ne sont plus considérés comme un enseignement religieuxau sens de l'article 15 de la Constitution fédérale, mais comme un enseignement neutre et objectif en matière de religions7.

II) La problématique éthique dans les débats politiques

Les similitudes entre les réformes cantonales ne se limitent pas aux structures qu'elles mettent en place. Un "air de famille" se dégage également sur le plan des arguments mis en avant dans les arènes publiques pour légitimer les nouveaux cours8. D'après plusieurs acteurs sociaux qui participent aux débats, la crise des Eglises traditionnelles et la diversité religieuse croissante appellent l'intervention de l'Etat afin de garantir l'apprentissage de clés de lecture indispensables à déchiffrer les symboles religieux dans la culture et dans l'art, et afin d'assurer la transmission d'un savoir sur les différentes religions présentes dans la société.

Dans les discussions publiques et politiques, cette dimension cognitive s'accompagne cependant de préoccupations sociales normatives. Les phénomènes de sécularisation et pluralisation sont associés, entre autres, à la perte d'un principe unificateur souvent identifié aux "racines judéo-chrétiennes" du pays. Un cours sous la responsabilité de l'Etat qui puisse rappeler les valeurs dont ces traditions seraient porteuses est donc envisagé comme une contribution importante à la cohésion sociale. Mais les nouveaux cours se doivent également de présenter la diversité des croyances et des conceptions éthiques dans la société et plusieurs promoteurs des réformes soulignent l'importance de connaître la culture et les valeurs de "l'autre", afin de développer une attitude de tolérance et de respect. En outre, une orientation pluraliste est souvent considérée comme un garde-fou contre l'endoctrinement des jeunes et permettrait de discuter en classe les réponses apportées par différentes traditions aux "questions fondamentales" que les élèves se posent.

À titre d'exemple, il suffira ici de citer un extrait de la prise de position du Conseil de l'éducation du canton de Fribourg d'août 1993 en faveur d'un enseignement de culture religieuse sous la responsabilité de l'Etat :

"[T]oute vie communautaire se fonde sur des principes communs qui sont intégrés lors de l'éducation. Dans un cours de culture religieuse pour tous, l'ensemble des élèves recevrait une même formation religieuse, sur la base d'un même programme. Cet enseignement permettrait de tisser des liens entre les individus d'une même communauté : d'où une meilleure compréhension des autres cultures religieuses pour les élèves chrétiens et une connaissance des racines chrétiennes de notre civilisation occidentale pour les étudiants provenant d'autres traditions"9.

Dans les différents cantons, les promoteurs des réformes mettent un fort accent sur la distinction entre les nouveaux cours envisagés et l'enseignement religieux donné sous la responsabilité des Eglises. L'offre sous la responsabilité de l'Etat se veut résolument "non catéchétique", "non confessionnelle" et dépourvue de tout prosélytisme. Toutefois, dans les débats publics, la question des orientations didactiques n'est presque jamais discutée de manière plus précise. Pour cette raison, mon exploration continue en examinant les plans d'étude.

III) Les plans d'étude

Jusqu'à un passé très récent, parler de plans d'étude en Suisse signifiait comparer 26 programmes cantonaux. Cependant, à partir de la moitié des années 2000, un effort renouvelé dans le domaine de l'harmonisation scolaire a permis l'élaboration de plans d'étude communs dans les deux principales régions linguistiques du pays, nommés respectivement Lehrplan 21dans les cantons germanophones, et de Plan d'études romand (PER) dans la partie francophone du pays10.

Si le Lehrplan 21 est encore en phase d'élaboration11, depuis 2010 le PER est en train d'être progressivement implémenté dans les écoles de tous les cantons romands12. Dès les premières pages, les auteurs de ce document identifient l'éducation en vue du développement durable et l'éducation à la citoyenneté en tant qu'enjeux majeurs de la formation scolaire au début du 21e siècle13. Ainsi, de nombreux objectifs d'apprentissage ayant trait à l'exercice de la citoyenneté et à des questions d'éthique sociale et de l'environnement figurent parmi les domaines de formation générale qui clarifient "les apports qui ne relèvent pas uniquement des disciplines scolaires et qui font partie du projet de formation de l'élève"14.

Ces visées globales trouvent des ancrages disciplinaires notamment dans le cadre du domaine des sciences humaines et sociales, qui comprend la géographie, l'histoire et l'enseignement de la citoyenneté. Le PER spécifie que les conditions-cadre matérielles et organisationnelles de ce domaine doivent "permettre de concrétiser des formes de débats démocratiques dans l'école (débat visant à confronter des idées, à trouver un consensus, à prendre une décision, à élaborer et réaliser un projet)" et "donner l'occasion d'assister à l'exercice des pouvoirs démocratiques (législatif, judiciaire, votation,...)"15.

Au domaine des sciences humaines et sociales appartient également un enseignement en matière de religions appelé "Ethique et cultures religieuses". Cette branche constitue toutefois une "spécificité cantonale", ce qui signifie que les cantons peuvent choisir de l'intégrer ou non à la grille horaire de leurs écoles. A l'heure actuelle, tous les cantons francophones à l'exception de Neuchâtel et Genève ont choisi d'orienter, au moins en partie, leur enseignement en matière de religions en fonction des objectifs d'apprentissage proposés par le plan d'Ethique et cultures religieuses16.

L'enseignement d'Ethique et cultures religieuses, qui se veut fondamentalement distinct d'un "enseignement religieux apologétique", se présente comme un "lieu d'information et de connaissances factuelles sur les grandes traditions religieuses et humanistes mondiales". Il est également conçu comme "un lieu où l'élève, avec sa liberté de conscience, apprend à connaître ses propres valeurs, à réfléchir sur le sens de ces valeurs, à construire ses valeurs éthiques, à découvrir et respecter les valeurs et les convictions des autres, à développer une responsabilité éthique". Ce cours se propose en outre de "donner aux élèves une connaissance des diverses cultures religieuses, de permettre à chacun de trouver ses racines, de se placer dans un contexte interculturel et interreligieux toujours plus complexe et de se situer devant les questions existentielles"17.

Sans pouvoir entrer ici dans le détail de toutes les apprentissages prévus par le plan d'études, il est néanmoins possible de signaler quelques orientations générales. Au degré primaire18, une partie importante du programme est dédiée à l'histoire biblique et à la découverte des personnages fondateurs des religions monothéistes et du bouddhisme19. Mais ces sujets ne sont pas seulement analysés dans une perspective historique ou comparative : souvent, ils constituent également des ressources pour thématiser des questions d'éthique. Par exemple, le programme de 3e et 4e année (degrés HarmoS)20invite à une "réflexion sur des comportements en rapport aux valeurs éthiques tels que respect, honnêteté, courage, solidarité, responsabilité, générosité à travers des contes et des textes religieux (Jacob, Joseph et ses frères, Ruth et Noémi,...) et des situations vécues en classe". Des objectifs comparables sont mentionnés également pour les degrés 5 et 6 :

"Observation de la nécessité de règles, de valeurs et de lois au travers du décalogue et de personnages religieux tels que Abraham, Moïse, David, Salomon, Marie, Jésus, Mohamed, Siddharta. Sensibilisation aux valeurs de justice, partage, liberté, dignité et paix en exploitant des situations vécues".

Aux degrés 7 et 8, des "témoins profanes et religieux d'hier et d'aujourd'hui" sont mobilisés dans un but semblable. Des "contes et textes religieux" (degrés 3 et 4) ainsi que des traditions et pratiques religieuses (degrés 7 et 8) servent également de base pour approcher des interrogations et des événements existentiels concernant la naissance, la mort, etc.

Au degré secondaire I (degrés 9 à 11)21, une perspective analytique plus poussée est introduite, entre autres par "l'approche et analyse des valeurs éthiques véhiculées dans les grandes chartes religieuses et humanistes (la Déclaration universelle des droits de l'homme, la règle d'or, le décalogue, la loi du talion, le sermon sur la montagne,...)". Mais les religions sont également envisagées comme ressources pour réfléchir "sur des situations éthiques liées au vécu des adolescents (paix-violence, tolérance-racisme, justice-injustice, dépendances,...)". Similairement, leurs "personnages importants" (Abraham, Moïse, David, Marie, Jésus, Mohamed, Siddharta, Confucius) ainsi que des "personnalités religieuses et humanistes marquantes" (Gandhi, Mère Teresa, Dalaï-Lama, Martin Luther King, Aung San SuuKyi,...)" sont présentés en tant qu'illustrations exemplaires de perspectives éthiques pouvant parler à l'expérience des élèves.

En ce qui concerne les indications pédagogiques, le plan d'Ethiques et cultures religieuses inclut de nombreuses références croisées aux autres domaines des sciences humaines et sociales et aux domaines de formation générale prévus par le Plan d'études romand. À ce niveau, il est possible de repérer plusieurs renvois à l'organisation de moments d'échange, à l'élaboration collective de règles, à la prise de rôles en classe, etc. Mais en ce qui concerne les spécificités pédagogiques de cette branche, le texte se limite à des indications assez vagues et superficielles (par exemple : "Privilégier le respect des différences pour vivre ensemble", "Utiliser des bibles illustrées pour enfants", "Dégager et comprendre les causes et les conséquences de la violence, du racisme et de l'injustice"). Néanmoins, une remarque en bas de page suggère une piste de recherche en signalant que "de nombreuses indications pédagogiques sont disponibles dans les moyens d'enseignement ENBIRO"22.

IV) Les manuels scolaires

ENBIRO (acronyme d'Enseignement biblique et interreligieux romand) est le nom d'une maison d'édition lausannoise devenue en 2013 les éditions AGORA. Dans leur quarante ans et plus d'activité, les éditions ENBIRO se sont imposées comme un acteur incontournable dans le domaine de l'enseignement religieux en Suisse romande, et ont contribué de façon importante à son évolution vers un enseignement en matière de religions sous la responsabilité de l'Etat. Les cantons qui s'appuient sur le plan d'Ethique et cultures religieuses recourent presque exclusivement à leurs moyens d'enseignement pour ces cours, notamment au degré primaire.

La création de cette maison d'édition au début des années 1960 est due en premier lieu à l'initiative des Eglises réformées romandes, en collaboration avec les Départements de l'instruction publique de quelques cantons francophones. Très vite, le projet intègre également des représentants de l'Eglise catholique et le premier manuel d'histoire biblique publié aux éditions ENBIRO en 1972 est d'emblée pensé dans une perspective oecuménique23. À partir des années 2000, les manuels s'ouvrent sur une approche interreligieuse notamment en incluant des chapitres sur l'islam et le bouddhisme dans les manuels pour les classes primaires. Dans leurs livres-guides, ces ouvrages insistent également davantage sur la nécessité de distinguer entre l'enseignement offert par les Eglises, chargées de transmettre une foi, et la mission éducative de l'école qui se doit de transmettre des connaissances et de mettre en évidence des points de vue. En même temps, les liens entre la maison d'édition et les Eglises se relâchent aussi sur le plan institutionnel. Ce processus aboutit en 2012 à une refonte complète des statuts, à la suite de laquelle la maison d'édition coupe les liens qui la rattachaient aux Eglises réformée et catholique, et change de raison sociale en poursuivant son travail de publication sous le nom d'éditions AGORA.

Presque tous les manuels ENBIRO / AGORA actuellement utilisés dans les cours d'Ethique et cultures religieuses au degré primaire appartiennent à une collection intitulée "À la découverte des religions" ; publiés progressivement à partir de 2002, ils s'articulent autour de six "domaines complémentaires" nommés : "biblique", "géo-historique", "socio-culturel", "éthique", "existentiel" et "interreligieux"24. Tout en gardant un accent sur l'histoire biblique (notamment dans les manuels destinés aux degrés 3 à 6 HarmoS), ils offrent également plusieurs repères permettant de situer différentes traditions religieuses dans le temps et dans l'espace, et de montrer leurs échos dans l'art et la culture. En outre, ils se proposent d'"indiquer les points de repère que les traditions religieuses ont apportés à la réflexion éthique", "signaler les réponses et les interrogations des traditions religieuses pour affronter la question du sens", et "ouvrir l'intérêt pour la connaissance [...] et le respect de diverses traditions religieuses".

Au succès de ces moyens d'enseignement contribue sans doute leur structure, qui offre aux enseignantes et enseignants des séquences didactiques "clefs en main" pour planifier les leçons. À titre d'exemple, je souhaite présenter une séquence d'enseignement pour la 6e année primaire (degrés HarmoS) consacrée à l'épisode biblique du veau d'or (Exode 32,1-29) et intitulée "l'alliance brisée et renouvelée". Elle est tirée du manuel Au fil du temps (vol. 2), un des premiers manuels parus dans la collection "À la découverte des religions", publié pour la première fois en 2003 et réédité en 200625. Il importe de souligner que cette séquence n'est pas représentative de l'ensemble des approches proposées dans les manuels, mais elle est à mon avis intéressante et révélatrice de certaines interactions entre un sujet d'histoire religieuse et la thématique des valeurs dans les cours d'Ethique et cultures religieuses.

Le but de la séquence est de permettre aux élèves, à travers l'épisode du veau d'or, de "constater à quel point il est difficile pour les Israélites de garder confiance en l'absence de leur guide et de toute manifestation divine". Le livre du maître invite tout d'abord l'enseignante ou l'enseignant à raconter l'épisode biblique en mettant en évidence différentes émotions ressenties par les Israélites (l'inquiétude pour l'absence de Moïse ; la joie une fois la statue achevée ; la colère de Moïse de retour du Sinaï). À ce propos, il faut relever que l'introduction au livre du maître (pp. XIII-XVI) signale que le "récit est constitutif de toutes les traditions religieuses" et accorde une grande importance à la narration en classe d'épisodes bibliques ou appartenant à différentes traditions religieuses26 :

"L'enseignement des cultures religieuses ne peut se borner à des textes et à des études de textes. Pour rendre justice à ces vieux récits, il s'agit de leur redonner vie, d'interpréter ces partitions, comme le ferait un musicien, tendu entre la rigoureuse fidélité à la composition d'origine et une grande liberté, indispensable pour rendre aux auditrices et auditeurs une musique ou une parole vivantes" (p. XIII).

Une bonne narration, en entrainant les enfants dans son mouvement, les inciterait "à faire preuve d'imagination et ingéniosité". L'important - relèvent à ce sujet les éditeurs - est alors "de ne pas couper l'effet d'une narration en cherchant à en tirer une morale ; il convient de laisser l'enfant réagir, proposer ses propres solutions ou ses rapprochements avec des événements qu'il a déjà vécus, ou encore de raconter d'autres histoires qu'il connaît" (p. XIV).

Après avoir observé l'image d'une statuette en forme de taureau présentée dans le manuel de l'élève et avoir brièvement indiqué la diffusion de ces représentations dans les religions anciennes, la séquence se poursuit par une discussion orientée sur les émotions et les sentiments qui habitent les divers protagonistes, en se demandant par exemple : "Que penser de la décision d'Aron de fabriquer un veau d'or ?" ; "Pour quelle raison Moïse réagit-il de cette manière ? Peut-on comprendre sa colère ?" ; "La réaction de Moïse est-elle justifiée, excessive" ?27L'entretien se conclut en demandant aux élèves ce qui à leur avis va se passer ensuite : "L'alliance sera-t-elle définitivement rompue? Que fera Moïse?".

En tant qu'activité facultative, les élèves sont invités à établir une comparaison avec une courte histoire intitulée "Je vous avais fait confiance !", qui raconte l'épisode d'une maîtresse qui, devant s'absenter un moment, nomme une élève responsable de la classe, mais qui à son retour constate avec énervement que l'ordre en classe n'a pas été maintenu. La séquence se termine par la lecture d'un résumé de l'épisode biblique devant permettre aux élèves de "prendre de la distance avec la narration et leurs propres représentations".

Cet exemple montre à mon avis une situation où la visée éthique et l'acquisition de connaissances sur les religions se confondent. Bien que le but annoncé de la séquence soit de comprendre, à partir d'un passage du texte biblique, un épisode de l'histoire sacrée du peuple juif, les élèves sont en fait invités à se mettre dans la peau des personnages du récit en formulant - de manière plus ou moins guidée - une appréciation à l'égard des actions et attitudes de ces personnages. À cette première "projection" fait suite une réappropriation qui sort le récit de son contexte et le replace dans une situation proche de l'expérience des élèves, en isolant les éléments de l'histoire qui se prêtent à une certaine lecture morale. Je reviendrai sur ce procédé dans ma conclusion.

La question des valeurs occupe une place particulière dans le premier volume du manuel Un monde en couleurs, publié dans la collection "À la découverte des religions" en 2007 et destiné aux élèves du 3e degré (HarmoS)28. À côté d'une introduction aux trois monothéismes et de plusieurs chapitres autour de personnages de l'Ancien et du Nouveau Testament, le manuel présente un module intitulé "Vivre ensemble", qui se penche sur des thèmes tels que le courage, le respect, ou l'honnêteté. Ce module, élaboré en collaboration avec le philosophe Oscar Brenifier, se propose d'aborder six valeurs à partir d'activités portant sur des situations tirées de la vie courante et en discutant avec les élèves des contes populaires de différentes cultures (africain, allemand, tibétain, finlandais...). Mais la méthodologie ne manque pas de proposer des liens entre les valeurs abordées et les récits bibliques présentés dans les autres chapitres du manuel, par exemple en signalant le courage de Ruth qui décide "de quitter son pays et sa famille pour aller vers une terre et une vie inconnues", ou l'appel à l'honnêteté adressé par Jésus aux accusateurs de la femme adultère (p. 249).

Les orientations didactiques qui inspirent ce module trouvent une nouvelle place dans les manuels plus récents publiés dans la même collection pour les élèves des dernières classes du degré primaire (7e et 8e classe HarmoS)29. Dans le livre du maître, la section consacrée à la narration de récits n'apparaît plus ; en revanche, des "recommandations pour animer une discussion" ont été introduites dans l'introduction générale30. Dans cette section, les éditeurs signalent que "les ateliers de discussion et de réflexion occupent une place certaine dans la présente publication", tout en précisant qu'"il s'agit de discussions formalisées (comportant un certain nombre de règles) et 'guidées' par l'enseignant-e, et non de débats qui nécessitent une maîtrise de l'argumentation que les élèves ne possèdent pas encore".

Dans ce cadre, les enseignantes et enseignants doivent, entre autres, "créer un climat de confiance", et se porter garants des "règles du jeu". Ils doivent veiller à "faire circuler la parole" en s'assurant qu'elle est "équitablement répartie à travers les élèves", "recadrer les élèves qui digressent" et "gérer rigoureusement la durée de l'activité". Ils doivent en outre inciter les élèves à suivre un certain nombre de règles, par exemple : "attendre que la personne qui parle ait terminé avant de lever la main (ne pas être centré-e sur soi et mieux écouter)", "pouvoir reformuler la parole d'un-e camarade, en particulier si l'on veut exprimer son désaccord", "respecter les propos de chaque personne qui s'exprime (chacun-e a des idées intéressantes)". Les enseignantes et enseignants qui souhaitent des compléments d'informations ou de nouvelles ressources pour les cours sont aiguillés vers des ouvrages d'Oscar Brenifier et Anne Lalanne, ainsi que vers les collections "PhiloZidées" et "Les goûters Philo"31.

Dans le manuel Sur les traces d'Abraham, publié en 2011 et adressé aux élèves du 7e e 8e degré primaire (degrés HarmoS), cette approche est intégrée par exemple dans un chapitre intitulé "Abraham mis à l'épreuve", qui prévoit plusieurs séquences didactiques (lectures de textes bibliques et coraniques, observation d'oeuvres d'art...) autour de l'épisode du sacrifice d'Isaac. Dans le cahier de l'élève, la discussion est encadrée par le préambule suivant :

Dans la Bible comme dans la tradition musulmane, un animal est offert en sacrifice à la place du fils d'Abraham. Pour les juifs, les chrétiens et les musulmans, cet épisode témoigne de la confiance absolue d'Abraham, qui est prêt à offrir son fils à Dieu ; il montre aussi que Dieu, en épargnant l'enfant, s'oppose à tout sacrifice humain. Voilà un récit qui soulève bien de questions. Donne ton avis !

Le cahier de l'élève propose trois questions : "La vie d'un être humain est-elle plus précieuse que celle d'un animal ?", "Doit-on tout accepter par respect pour quelqu'un ?", "Pourquoi certaines épreuves nous font-elles grandir ?" (p. 18). D'autres questions sont proposées dans le livre du maître, par exemple: "Faut-il obéir à tous les ordres ?", "Est-il nécessaire de croire en Dieu pour bien agir ?" (p. 35).

Néanmoins, une approche didactique semblable à celle illustrée par l'exemple de la séquence autour du veau d'or n'est pas absente du même manuel32.

Conclusion

Dans cette contribution, j'ai montré que ces vingt dernières années, dans la majorité des cantons suisses et dans la totalité des cantons romands, l'enseignement religieux a été au centre d'importantes réformes, qui visaient l'introduction d'un enseignement en matière de religions sous la responsabilité de l'Etat. La convergence des modèles cantonaux a sans doute favorisé l'inclusion de cette branche dans les processus d'harmonisation des plans d'études. De plus, les manuels ENBIRO / AGORA constituent une référence commune, au moins au degré primaire, dans la majorité des cantons romands. Quel bilan peut-on tirer de cette évolution en ce qui concerne la création d'espaces pour "de nouvelles pratiques philosophiques, du type de la discussion philosophique" ?

Dans sa vision pédagogique globale, le Plan d'études romand identifie l'éducation à la citoyenneté et au développement durable en tant qu'enjeux fondamentaux de la formation scolaire, et insiste sur l'échange, la réflexion collective et l'engagement à l'intérieur et à l'extérieur de la classe en tant qu'outils didactiques essentiels à ce projet éducatif. L'encadrement de l'Ethique et cultures religieuses dans les sciences humaines et sociales et les nombreuses références aux objectifs de formation générale dans le plan de ces cours, indiquent la volonté d'orienter cette branche d'après les mêmes conceptions didactiques, et les moyens d'enseignement plus récents semblent bien prendre en considération ces perspectives33. Cependant, plusieurs indices signalent également une approche des questions éthiques qui diffère du débat à visée philosophique et qui n'est pas sans soulever des interrogations. En fait, aussi bien des objectifs d'apprentissage du plan d'études que certaines séquences d'enseignement dans les manuels scolaires incitent plutôt les élèves à actualiser des situations tirées de la Bible ou provenant d'autres traditions religieuses (ou profanes), en tissant des liens avec leur vie quotidienne. D'un côté, ces histoires deviennent des sources pour thématiser des règles de conduite ; de l'autre, elles donnent l'occasion aux élèves d'exprimer des jugements moraux à partir de leur vécu. Cependant, l'étape successive vers une réflexion éthique, à savoir une discussion raisonnée visant à proposer des critères pour ces jugements moraux, n'est pas systématiquement explicitée34. Bien sûr, elle n'est pas non plus exclue, mais une grande responsabilité dans ce sens est alors laissée aux enseignantes et enseignants.

À ce propos, je dois apporter un amendement important au cadre global que j'ai dressé jusqu'ici. Dans cette contribution, en parlant d'un enseignement en matière de religions, j'ai insisté sur la convergence des modèles, des plans d'études et des manuels. Ces rapprochements ne doivent pas cacher les différences qui demeurent entre les cantons. En particulier, en fonction des cantons, la formation des enseignants censés donner ces cours peut être assumée par des théologiens, des philosophes ou par des personnes formées en science des religions ; elle peut comprendre un nombre très variable d'heures et, dans certains cas, elle n'est proposée qu'aux enseignants du degré primaire. L'intégration d'outils didactiques orientés vers la discussion philosophique, par exemple la philosophie pour les enfants, dépend des curricula des Hautes écoles pédagogique, voire des choix de chaque formatrice et formateur. En outre, la place réservée au programme à l'Ethique et cultures religieuses dépend de l'aménagement cantonal des grilles horaires. En particulier au degré secondaire, ce cours peut être donné en tant que branche autonome avec une dotation horaire propre, ou être intégré aux leçons d'histoire. Dans le second cas, le nombre de périodes d'enseignement annuelles consacré à cette matière est souvent laissé à la discrétion des enseignantes et des enseignants, ce qui entraîne une qualité d'enseignement très variable d'un cas à l'autre35.

N'étant moi-même ni philosophe, ni pédagogue, mais chercheur en science des religions, je n'entends pas pousser trop loin mes propos en matière de didactique, mais j'aimerais néanmoins formuler quelques remarques qui relèvent de ma perspective disciplinaire.

Globalement, l'enseignement d'Ethique et cultures religieuses tel qu'il est actuellement pensé et proposé en Suisse romande paraît partagé entre deux manières de concevoir et d'approcher la religion. D'un côté, la religion est considérée comme un objet d'étude qui doit être situé, compris et expliqué dans le cadre des différentes cultures, dans l'espace et dans le temps. De l'autre, elle est envisagée comme un réservoir dans lequel il est possible de puiser des ressources éthiques et existentielles pour les individus et la société. Si les traditions religieuses peuvent bien constituer des points de départ pour une discussion à visée philosophique, l'idée de la religion en tant que ressource renvoie plutôt - dans le cadre des réformes récentes de l'enseignement religieux - à une volonté politique de garantir une base morale commune dans la société. Elle est en outre compatible avec les conceptions d'une tradition pédagogique chrétienne libérale qui - tout en mettant entre parenthèses l'enseignement des dogmes à l'école - souhaite éveiller un sens religieux chez les enfants à partir de leurs questions existentielles (qu'elle présume être universelles)36.

Pour terminer, je souhaite exprimer une dernière considération de nature plus normative. Je suis de l'avis qu'aussi bien l'enseignement en matière de religions que l'enseignement de l'éthique pourraient tirer profit d'une séparation plus claire entre ces deux domaines, non seulement dans les manuels, mais également dans le plan d'études. Une telle distinction est préconisée entre autres dans le Lehrplan 21 37. Dans la perspective d'une étude scientifique des religions, elle faciliterait l'adoption d'une attitude distanciée et analytique à l'égard des différentes traditions religieuses. Dans ce sens, elle favoriserait la réflexion méthodologique, en évitant que les élèves transposent leurs émotions et sentiments sur des textes religieux en les utilisant comme clés de lecture, tout en faisant abstraction du contexte historique et des interprétations actuelles au sein des communautés religieuses. Cette distinction ne signifierait en aucun cas l'exclusion du plan des cours de l'éthique des religions, mais elle permettrait de mettre l'accent sur les individus et les groupes qui en sont porteurs dans différentes traditions, en montrant qu'aussi à l'intérieur d'une même religion existent une pluralité d'interprétations et un vif débat éthique. Elle pourrait même renforcer le discernement entre un enseignement en matière de religion et un enseignement religieux, en contribuant à éviter que les élèves soient implicitement portés à adopter un code communicatif religieux au moment de commenter des textes issus d'une tradition religieuse38.

Dans la perspective de la promotion d'un débat à visée philosophique dans le cadre de l'école, cette distinction aiderait probablement également à réduire le risque que la discussion de sujets éthiques soit bridée d'avance pour mieux intégrer une certaine perspective religieuse ou pour n'en offenser aucune. En fait, elle permettrait peut-être de mieux intégrer les religions dans une vraie discussion à visée philosophique, en clarifiant les positions et les finalités respectives de la philosophie et de l'histoire des religions.


(1) Pour un enseignement laïque de la morale, Rapport remis par la Mission sur l'enseignement de la morale laïque à Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale, 22 avril 2013. Document consulté en ligne à l'adresse :
http://www.education.gouv.fr/cid71583/morale-laique-pour-un-enseignement-laique-de-la-morale.html

(2) L'intitulé officiel du cours, en allemand, italien et romanche, est "Religionskunde und Ethik - Scienza delle religioni ed etica- Enconuschientscha da las religiuns&etica".
Cf. : http://www.gr.ch/DE/institutionen/verwaltung/ekud/avs/projekte/religionskundeethik/Seiten/default.aspx

(3) Le terme d'"enseignement en matière de religions" que j'emprunte à Uehlinger et Frank (2009) permet d'éviter quelques ambiguïtés liées à l'expression "enseignement du fait religieux" plus courante en France (Cf. Borgeaud, 2005). Dans cette contribution, le terme d'"enseignement en matière de religions" n'a pas de connotation normative et sert à rendre compte d'une distinction usuelle dans le discours politique et didactique qui vise à démarquer ces cours d'un enseignement religieux.

(4) Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999, art. 62 et 72.

(5) Cf. : Loretan, 2005.

(6) Des changements importants interviennent néanmoins sur le plan des programmes qui, à partir des années 1960, sont de plus en plus orientés dans un sens oecuménique, puis interreligieux. Cf. : Bräm 1978.

(7) Cf. Jödicke et Rota, 2010.

(8) Cf. Rota, 2013 ; Rota, 2014 (en préparation).

(9) Conseil de l'éducation du canton de Fribourg. L'éducation religieuse dans les cycles d'orientation (document remis à la Direction de l'instruction publique du canton de Fribourg), Fribourg, le 20 août 1993, p. 4 (souligné dans l'original).

(10) En Suisse, la problématique de l'harmonisation scolaire a une longue histoire. Des institutions pour la coopération intercantonale en matière d'école sont fondées déjà à la fin du 19e siècle afin de permettre l'échange d'informations et d'expériences sans compromettre l'autonomie des cantons. Ce n'est toutefois qu'à partir des années 1960 que ces organismes assument un rôle actif dans la coordination des cursus scolaires. L'élaboration entre 2001 et 2007 du concordat intercantonal HarmoS et l'acceptation par le peuple et les cantons d'une modification de l'article sur l'instruction publique de la Constitution fédérale en 2006 constituent des étapes fondamentales dans ce processus. L'introduction de plans d'études communs dans les principales régions linguistiques est une des clauses du concordat HarmoS. Cf. Criblez, 2008.

(11) Une version complète du Lehrplan21a été soumise à une consultation publique entre juillet et décembre 2013 et peut être téléchargée à l'adresse : http://www.lehrplan.ch.

(12) Toutes les références au Plan d'études romand sont tirées de la version électronique disponible en ligne à l'adresse : http://www.plandetudes.ch

(13) PER : présentation générale > contexte >la place de l'éducation en vue du développement durable et de l'éducation à la citoyenneté dans le PER. En tant qu'enjeu global, l'éducation citoyenne est conçue autour de trois pôles dont les articulations évoluent au cours de la scolarité. L'élève doit pouvoir acquérir des connaissances permettant son engagement au sein de la société (Citoyenneté et institutions), prendre conscience de sa responsabilité citoyenne envers l'environnement proche et le monde entier (Citoyenneté et enjeux de société) et "s'impliquer de manière citoyenne dans l'école, notamment à travers des structures participatives (conseil de classe, conseil d'école) ainsi qu'à travers l'organisation et la participation à différentes actions citoyennes (travaux d'intérêt public...)".

(14) PER : présentation générale >formation générale.

(15) PER : commentaires généraux du domaine Sciences humaines et sociales>Conditions cadre matérielles et organisationnelles.

(16) Le canton de Genève prévoit un enseignement en matière de religions intégré dans les cours d'histoire du degré secondaire I et basé sur l'étude des "grands textes" religieux et profanes de l'humanité. Envisagé en tant que spécificité cantonale, cet enseignement ne se base pas sur le plan d'Ethique et cultures religieuses. Le canton de Neuchâtel propose également un enseignement en matière de religions intégré aux cours d'histoire du secondaire I et intitulé Enseignement des cultures religieuses et humanistes. À leur initiative, les enseignantes et enseignants d'histoire peuvent y intégrer des sujets compatibles du plan d'Ethique et cultures religieuses.

(17) PER : Sciences humaines et sociales > Ethique et cultures religieuses > intentions.

(18) PER : Sciences humaines et sociales > Ethique et cultures religieuses > SHS 15 et SHS 25.

(19) Qu'il me soit permis d'attirer l'attention -en passant, et sans vouloir pousser trop loin l'interprétation - sur quelques choix sémantiques. Le Plan invite à découvrir et identifier "des étapes de la vie de Mohamed" et de Siddharta, mais prévoit l'"identification et signification des grandes étapes de la vie de Jésus-Christ" (je souligne). En outre, le Plan prévoit l'"identification et signification de quelques aspects de l'islam (5 piliers,...)" et "du bouddhisme (libération de la souffrance, réincarnation,...)", mais invite à la "découverte du message de Jésus-Christ (amour, pardon, prédilection pour les petits et les pauvres,...)" (je souligne). PER : Sciences humaines et sociales > Ethique et cultures religieuses > SHS 25

(20) À la suite de l'introduction du concordat HarmoS, la scolarité obligatoire en Suisse compte 11 années et inclut l'école enfantine (1re et 2e année) intégrée au premier cycle de l'école primaire. Le début de celle qui est couramment appelée l'école primaire correspond ainsi à la 3e année de scolarité. L'école secondaire commence en 9e année.

(21) PER : Sciences humaines et sociales > Ethique et cultures religieuses > SHS 35.

(22) PER : Sciences humaines et sociales > Ethique et cultures religieuses > SHS 15 et SHS 25.

(23) D'Abraham a` David. Histoire d'un peuple, Lausanne, ENBIRO, 1972.

(24) Les citations sont tirées de l'introduction au livre du maître du manuel Au fil du temps, volume 2 destiné aux enfants du 6e degré primaire (HarmoS).

(25) Au fil du temps, volume 2, manuel de l'élève pp. 16-17 ; livre du maître, pp. 43-44.

(26) L'introduction mentionne également la narration de contes "profanes" (par exemple des contes des frères Grimm), mais souligne la spécificité du texte biblique qui, en citant Paul Ricoeur, est défini "parole ouverte et ouvrante" (p. XIV). La partie de l'introduction au livre du maitre dédiée à la narration et aux récits a été rédigée en collaboration avec Alix Noble Burnand.

(27) Le livre du maître suggère des "réponses" à certaines de ces interrogations, par exemple : "[Moïse] est déçu, il se sent trahi. Le peuple, Aaron y compris, n'est pas capable de respecter les commandements en son absence".

(28) Un monde en couleurs (vol. 1), Lausanne, ENBIRO, 2007.

(29) À ces manuels il faut ajouter un ouvrage intitulé Parler de la mort à l'école adressé aux enseignantes et enseignants et pensé pour leur offrir "quelques repères pour ouvrir un espace de parole avec leurs élèves sur la question de la mort" dans les premières classes primaires.

(30) Je me réfère ici au manuel Sur les traces d'Abraham, Lausanne, ENBIRO, 2011, pp. 10-11. Ces indications apparaissaient déjà sous une forme très semblable dans le livre du maître qui accompagne le premier volume du manuel Un monde en couleur, mais aux pages 208-212.

(31) Brenifier, Oscar (2002), Enseigner par le débat. Rennes, CRDP de Bretagne ; Lalanne, Anne (2004), Faire de la philosophie à l'école élémentaire. Issy-les-Moulineaux, ESF éditeur ; Collection 'PhiloZidées' (textes d'Oscar Brenifier et illustrations de Jacques Després), Paris, Natan ; Collection 'Les goûters Philo' (textes de Brigitte Labbé et Michel Puech), Toulouse, Milan.

(32) Dans une séquence consacrée à l'épisode de Agar, après avoir constaté que "la première partie du récit biblique [...] ne dit mot des émotions de Sara et d'Agar, encore moins de celles d'Ismaël", les élèves sont invités à réfléchir en collectif aux émotions que ces personnages auraient pu ressentir. Parmi les prolongements possibles, le livre du maître propose la rédaction individuelle d'un texte en invitant les élèves à "imaginer les paroles d'Abraham à l'adresse d'Agar et Ismaël ainsi que leurs possibles réponses ; sans oublier ce que pourrait dire et/ou faire Sara ce matin-là". Les différentes histoires produites pourront être comparées en collectif afin de "constater que ce texte permet une foule de lectures et d'interprétations (comme de nombreux récits bibliques d'ailleurs), ce qui le rend passionnant à le lire !".

(33) En plus des manuels ENBIRO / AGORA, l'on peut signaler le recueil de séquences didactiques pour l'Ethique et cultures religieuses produit par des enseignantes et enseignants du canton de Fribourg pour la dernière classe du degré secondaire I. Cf. : Awais, Nicole, Chobaz, Benoît, Descorges, Currat, Jeann, et Simonet, Olivier (dir.), Ethique et cultures religieuses. Dix séquences d'enseignement. Fribourg, Service de l'enseignement obligatoire de langue française du canton de Fribourg, 2009, part. pp. 1-3.

(34) Ma compréhension des rapports entre éthique et morale s'inspire de Luhmann, 2008.

(35) Même dans les cas où ces cours disposent d'une dotation horaire propre, il est difficile de savoir comment et dans quelle mesure ils sont effectivement donnés. Malheureusement, il n'existe à ma connaissance aucune étude globale sur les pratiques en classe en lien avec l'enseignement de cette matière dans les écoles romandes, ni au degré primaire ni au secondaire.

(36) Cf. Späni, 2003 ; Desponds, Fawer, Caputo& Rota, 2014 (en préparation).

(37) Dans la version soumise à consultation publique en 2013, le Lehrplan 21prévoit un domaine d'enseignement interdisciplinaire appelé Nature, Homme, Société ( Natur, Mensch, Gesellschaft, NGM)qui inclut également un enseignement en matière de religions. Au degré primaire, ce domaine NGM explore de manière intégrée les interactions entre l'Homme et son environnement naturel et social ; la distinction entre différentes branches se dessine seulement à partir du degré secondaire I qui prévoit, entre autres, un enseignement d'Ethique, religions et société ( Ethik, Religionen, Gemeinschaft, ERG). Malgré l'accent mis sur la perspective interdisciplinaire, au moment de préciser les objectifs d'apprentissage, les auteurs du plan d'études distinguent (assez) clairement entre l'acquisition d'un savoir sur les religions et l'exploration et réflexion d'expériences fondamentales, valeurs et normes - entre autres à l'aide de questionnements et instruments philosophiques. Cf. Lehrplan 21>Fachbereich NMG (1./2. Zyklus)> NMG 11 ; NMG 12, ainsi que Lehrplan 21>FachbereichEthik, Religionen, Gemeinschaft (mit Lebenskunde).

(38) Cf. Frank, 2010.

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