Cet article synthétise l’étude de trois textes apocryphes de Platon, Les Rivaux, Hipparque, et Clitophon, du point de vue de la pratique philosophique. Cet angle particulier nous permettra d’analyser l’attitude Socratique, sa psychologie, celle de ses interlocuteurs et d’en tirer des éléments de méthode que nous comparerons aux pratiques de l’Institut de Pratiques Philosophiques. Cette étude mettra spécialement en lumière l’importance du sujet pensant au sein de ces deux pratiques. Notre étude articulera pour ce faire une succession de concepts manifestés dans nos trois textes antiques et dans les NPP valorisant une subjectivation de la pensée. Cette succession conceptuelle suivra un ordre anagogique devant dévoiler le substrat commun à deux pratiques séparées par vingt-trois siècles.
Cet article synthétise l’étude de trois textes apocryphes de Platon (428 av. J.-C. 348 av. J.-C.) : Les Rivaux (Ἀντερασταί), Hipparque (Ἳππαρχος), et Clitophon (Κλειτόφων), du point de vue de la pratique philosophique. Cet angle particulier nous permettra d’analyser l’attitude Socratique, sa psychologie, celle de ses interlocuteurs et d’en tirer des éléments de méthode que nous comparerons aux pratiques de l’Institut de Pratiques Philosophiques[1]. Cette étude mettra spécialement en lumière l’importance du sujet pensant au sein de ces deux pratiques. Notre étude articulera pour ce faire une succession de concepts manifestés dans nos trois textes antiques et dans les NPP[2] valorisant une subjectivation de la pensée. Cette succession conceptuelle suivra un ordre anagogique[3] devant dévoiler le substrat commun à deux pratiques séparées par vingt-trois siècles.
Causes et filiation du travail sur l’attitude de l’IPP
Notre propos part de la distinction entre, d’un côté les pratiques philosophiques universalistes et, de l’autre, les pratiques philosophiques subjectivisantes. Pierre Hadot illustre bien cette division en affirmant que l’enseignement de l’histoire des idées tel que nous l’observons, entre autres, à l’université est « un enseignement qui s’adresse à tous, c’est à dire à personne »[4]. C’est un enseignement général, magistral, qui prend peu en compte le sujet particulier au sein duquel les idées sont reçues, travaillées et plus ou moins assimilées. Elle traite le penseur de façon indifférenciée, ce qui a bien sûr du sens compte tenu que la philosophie aspire à toucher les thèmes qui traverse l’humain par-delà les époques et les cultures. Cependant, si nous pouvons tous nous approprier les grandes idées, chacun les incorpore à sa manière. Il y a une particularité dans la rencontre entre un sujet et une pensée universelle, suivie d’un travail existentiel indissoluble dans l’universalité.
Les pratiques philosophiques comprenant un aspect subjectivisant ne font pas l’impasse sur l’universel, mais établissent des ponts avec le singulier, au sein même de leur didactique. Celui qui pense, son évolution en tant que penseur et son incarnation existentielle sont aussi importants que ce qui est pensé. La première conséquence de cet aspect subjectivisant d’une pratique philosophique, autrement dit de l’activité dialectique partant du sujet-pensant et visant une progression de ce sujet est le travail sur les attitudes, que l’on retrouve dans les dialogues de Platon, et dans certaines pratiques actuelles.
Dans la pratique philosophique que nous observons notamment à l’IPP on observe une mise à l’épreuve de la pensée d’un interlocuteur pour vérifier sa capacité à suivre la raison et à être conscient de soi comme sujet pensant, ce qui renvoie au “connais-toi toi-même". C’est à cette occasion qu’on rencontre des contradictions et des points aveugles chez le sujet, dont les réponses peuvent être surprenantes, voire illogiques. On ne peut néanmoins éviter de partir des évidences phénoménales afin de creuser, d’identifier les schémas fondamentaux. Durant le processus dialogique, le philosophe provoque le sujet qui répond avec des arguments rationnels ou irrationnels, de manière consciente ou non. Quelle que soit la nature des réponses produites, le processus clarifie sa pensée, la déplie, l’exhibe et l’exerce.
L’action et l’exigence philosophique sont des conditions nécessaires à la prise de conscience des attitudes qui font obstacle à la pensée. C’est ainsi que, au cours des ateliers de pensée critique ou des consultations, un grand nombre de sujets invités à effectuer des gestes cognitifs comme synthétiser une idée, considérer une opinion opposée à la leur, argumenter leur position, ou à simplement reformuler la parole d’un autre, se retrouvent confronté à certaines limites dont ils ignoraient tout. Cette découverte se manifeste souvent par de la colère envers le praticien, ou de la tristesse.
Certaines tendances communes sont en effet impropres au processus de pensée, et demandent une prise de conscience et un travail pour être modifiées. Nous énumérerons ci-après quelques-unes de ces attitudes courantes, problématiques, que révèlent la méthode de l’IPP et qu’on retrouve dans nos trois dialogues apocryphes.
Tendance à la facilité
Tout organisme tend spontanément à la facilité, selon le principe de moindre action[5]. Mais cette attitude naturelle est contre-productive à l’heure de penser. Ce penchant cognitif apparait par exemple dans le dialogue Hipparque, lorsque Socrate demande : « Qu’est-ce que l’amour du gain ? Et qui sont ceux qui se livrent à cette passion ? » L’interlocuteur répond : “Il me semble que ce sont ceux qui croient pouvoir gagner à des choses qui n’ont réellement aucune valeur”(225a).
Qu’observe-t-on ici ? L’interlocuteur répond à la deuxième question en éludant la première qui est plus difficile. Parler des personnes est en effet plus facile que de parler des idées. L’abstraction nous coûte. Reconnaître ce penchant est un premier pas vers sa compréhension. Ce premier pas nous offre la possibilité d’une réconciliation avec l’effort de la pensée.
Dans Les Rivaux, on observe une autre manifestation de cette tendance par la distinction entre l’être et l’apparaitre (chère à Platon). Le savant qui s’adresse à Socrate à ce moment du dialogue énonce qu’un bon philosophe doit : « paraître entendu dans tous les arts, ou du moins dans la plupart et dans les plus considérés » (135b). Pour l’opinion commune, ce qui importe est en effet de paraître sans prendre la peine d’être. L’apparence a cet avantage paradoxal et chatoyant de demander moins d’efforts. La proposition de l’IPP, à l’instar de l’invitation Socratique, consiste, à l’inverse, à valoriser l’authenticité, la transparence, quitte à révéler certaines facettes que nous préfèrerions cacher. L’exhibition, parfois joyeuse, parfois honteuse, de la réalité de notre pensée est la première impulsion qui motivera le sujet à abandonner la facilité au profit d’un travail authentique sur lui-même.
La paranoïa
Dans le dialogue Hipparque, une certaine paranoïa de l’interlocuteur de Socrate apparaît : autre attitude antiphilosophique assez commune. « Je ne puis me persuader que tu ne veuilles pas me tromper d’une manière ou d’une autre » (229e). La peur d’être manipulé et la crainte d’un examen rigoureux de nos propres paroles est en effet un effet pervers classique dans la tentative de penser en commun. Lorsqu’un échange ne va pas dans le sens de notre opinion, lorsqu’il met à l’épreuve nos idées, il n’est pas rare que l’on se braque et attribue de mauvaises intentions à notre interlocuteur sans prendre le temps d’examiner abductivement, autrement dit sans prendre la peine d’envisager les probabilités et les éléments fondant nos hypothèses.
Un autre exemple de cette paranoïa se trouve plus loin dans ce même dialogue, lorsque Socrate accuse ironiquement son interlocuteur de manipulation. Celui-ci se contredit en effet lui-même et Socrate veut refléter cette faille dans son raisonnement. Mais cette accusation déclenche alors un cri du cœur, et l’interlocuteur d’affirmer : « Non, Socrate, je le jure ; c’est au contraire toi qui me trompes et, je ne sais comment, me tournes et retournes sens dessus dessous. » (228a)
On retrouve cette même attitude dans de nombreux dialogues, lorsque les interlocuteurs de Socrate l’accusent de leur faire dire ce qu’ils n’ont pas dit, et de les manipuler par des raisonnements. On peut penser à la fameuse critique de Calliclès, féroce interlocuteur de Socrate, qui, dans la troisième partie du Gorgias, considère que la maïeutique est une méthode de manipulation.
La paralysie.
Toujours dans le dialogue Hipparque, Socrate invite son interlocuteur à prendre conscience de ses contradictions. L’anonyme (interlocuteur de Socrate) mis au pied du mur se retrouve sans voix, pétrifié, paralysé. « Reconnais donc le cercle dans lequel tu tournes » enjoint Socrate « c’est que le gain est un bien et la perte un mal. ». Et son partenaire de répondre : « Je ne sais plus que dire. » (231c-d)
Cette paralysie cognitive est un symptôme courant en consultation philosophique[6]. Elle doit être prise en compte et travaillée en tant qu’étape révélatrice d’une dissonance cognitive, signe d’une prise de conscience.
On la retrouve en de nombreux endroits des dialogues, notamment dans Les rivaux lorsque Socrate fait admettre à son interlocuteur les ultimes conséquences de sa thèse : « A ces mots, le savant, confus de ce qu’il avait dit, ne sut que répondre » (139a).
La subjectivité fermée
Tout au long du dialogue Hipparque on observe que l’interlocuteur de Socrate parle à la première personne du singulier quand il s’agit de lui, et à la deuxième personne du singulier lorsqu’il s’agit de Socrate. : « je pense, bien concevoir celui qui aime le gain », « Qu’en veux-tu conclure ? » en opposition à Socrate qui emploie le “nous”. Cette conjugaison révèle le paradigme commun de séparation ontologique. Au sein de tout dialogue l’attitude habituelle est de poser une scission entre les pôles du processus, entre deux sujets radicalement distincts.
Dans le cas de ce dialogue, l’interlocuteur de Socrate ne représente que lui-même et se considère séparé de Socrate : il n’a pas renoncé à son individualité au profit de l’avancée dialogique. Pour lui il y a deux positions adverses, qui s’excluent mutuellement. Il pense individuellement, sa subjectivité est fermée.
Cette crispation égotique est travaillée en pratique philosophique pour faire sortir le sujet de lui-même et l’inviter à une subjectivité ouverte à la réflexion commune, à la réflexion de l’autre, et au sens commun.
En opposition aux attitudes empêchant la pensée, le philosophe praticien employant une méthodologie fondée sur une subjectivation de la pensée, à l’instar de Socrate, produit et renforce certaines attitudes qui favorisent la pensée individuelle et collective. En voici quelques-unes.
Subjectivité ouverte :
Comme nous le soulevions précédemment, dans le dialogue Hipparque, Socrate pose la recherche à la première personne du pluriel : « Nous sommes aussi convenus que tous les hommes aiment le bien ? » (227c). « Laquelle de ces deux propositions adopterons-nous pour ne pas nous tromper ? ». Pour lui, il s’agit en effet d’une quête commune, d’un dialogue : il ne veut pas triompher, mais arriver à une vérité supérieure en compagnie de son interlocuteur. Cette attitude va contre l’habitude de voir dans le débat un affrontement égotique qui caractérise l’éristique que Platon condamne chez les sophistes. Socrate pense collectif, sa subjectivité est ouverte. C’est à cela que le praticien invite le sujet pensant : sortir de lui-même.
Savoir se positionner
La pratique philosophique met un point d’honneur à travailler le positionnement : faire un choix, savoir répondre à une question, apprendre à qualifier, à juger, et à choisir. Il s’agit tout d’abord de prendre conscience que se positionner n’est pas absolutiser. Exemple : ce n’est pas parce que je suis égoïste que je suis uniquement cela. Ce n’est pas parce que je choisis ce chemin que je ne peux pas changer d’avis ou en envisager d’autres.
Il s’agit également de cultiver le courage d’assumer une position, et de ne pas naviguer entre deux eaux, par anxiété, avidité, ou par crainte de l’erreur.
On retrouve ce souci de positionnement dans Les Rivaux, lorsque Socrate force son interlocuteur à répondre. « Ah ! Ne me dis pas cela, repris-je, il faut opter : lequel appellerais-tu le plus tôt et de préférence ? » (136 d).
On voit là la tendance naturelle de l’humain à ne pas vouloir se compromettre par une réponse tranchée. Choisir, c’est en effet aussi se limiter. Se réconcilier avec notre condition finie revient donc à comprendre la vertu du choix. Pour Platon faire des choix c’est grandir, c’est à dire sortir de l’infantilisme qui, en s’engageant partout, ne s’engage nulle part.
L’attitude philosophique à développer est donc le courage de l’engagement et l’acceptation de nos limites, à la fois pour l’être et la pensée. On ne peut pas tout avoir : il faut donc choisir et accepter la finitude.
La sympathie dialectique
Au cours du processus maïeutique, Socrate demande parfois l’accord de son interlocuteur pour poursuivre[7]. Il y a un genre de pacte entre les deux pôles du dialogue, qui s’initie par la sympathie naturelle de Socrate. La dialectique est certes un combat, mais il s’agit d’un combat fraternel, respectueux. Un exemple de cette sympathie apparait dans Les Rivaux, lorsque Socrate s’adresse par ces mots à son interlocuteur : « Oserai-je encore te demander quelque chose, lui dis-je, et n’y aura-t-il point de l’impolitesse à te faire tant de questions ? » (136 e)
La sympathie socratique porte directement ses fruits et l’autre s’ouvre entièrement au processus en répondant « Demande-moi tout ce qu’il te plaira » (136 e).
Cette attitude se manifeste également dans le dialogue Hipparque par les qualificatifs qu’emploie Socrate pour s’adresser à son interlocuteur : « mon très cher » (226d), « mon ami » (226 e), « ô le plus intrépide de tous les hommes » (232 a).
Cette sympathie est le reflet d’une distinction fondamentale chez Socrate et dans la pratique philosophique de l’IPP, entre éristique et dialectique. L’éristique (dont l’étymologie ramène à Eris, déesse de la discorde) vise à écraser l’adversaire, lorsque la dialectique vise à grandir à l’aide d’un adversaire que l’on aide en retour à grandir. D’un côté la lutte est mesquine, méprisante et sans règles. De l’autre, la lutte est respectueuse et se place sous l’égide de la raison.
Les compétences
La pratique philosophique comprend un travail sur les attitudes, mais aussi les compétences[8]. Qu’est-ce qu’une compétence philosophique ? Il s’agit d’un outil de pensée que le philosophe emploie et dont il transmet l’usage. Nous avons listé ci-après quelques-unes de ces compétences qui apparaissent dans les trois dialogues et se retrouvent dans diverses pratiques philosophiques, notamment celles de l’IPP.
Définir
Dans Les Rivaux, Socrate demande à son interlocuteur de produire des définitions : « Sais-tu ce que c’est que philosopher ? - Sans doute, me dit-il, je le sais. - Qu’est-ce donc, lui demandai-je ? » (133 c). L’exercice de ce geste cognitif, que l’on retrouve dans la pratique philosophique actuelle, est aussi une invitation à penser l’utilisation préréflexive, la privatisation[^9] des termes et à retravailler les définitions apprises pour les reconstruire soi-même à partir du sens commun. Pour Socrate il s’agit d’un travail sémantique, mais aussi d’une recherche sur les essences car pour lui les hommes connaissent seulement l’image des choses, le reflet des idées : on en trouve un exemple au début du dialogue Hipparque, lorsque Socrate demande à son interlocuteur de définir l’amour du gain, concept au cœur du dialogue qui suivra. Dans le dialogue Clitophon, Socrate montre un autre exemple de définition en demandant « ce que c’est que l’amitié » (409 d).
Distinguer
Pour définir une chose, il faut la distinguer de ce qu’elle n’est pas ; sans cela on accepterait une définition indifférenciée. Il s’agit du principe d’identité : une chose est ce qu’elle est et pas autre chose. Socrate emploie toujours à ce titre des exemples frappants de dissemblance avec l’objet à distinguer. Ainsi, dans Les Rivaux, propose-t-il cette distinction : « Cela te paraît-il particulier à la philosophie, repris-je, ou crois-tu qu’il en soit ainsi des autres arts ? Par exemple, le goût de la gymnastique te paraît-il aussi utile que beau ? » La gymnastique est (à première vue) si éloignée de la philosophie que cela en est choquant. Le but est d’une part pédagogique, et d’autre part méthodologique : employer des antagonismes clairs et produire de la distinction par étapes, du plus grossier au plus subtil.
On trouve un autre exemple de distinction dans le dialogue Hipparque, lorsque Socrate invite son interlocuteur à associer explicitement deux concepts afin d’amener la distinction qu’il soupçonne. « Ainsi donc, aimer le bien, voilà ce que tu appelles aimer le gain ? » (227b). Ce que l’opinion commune appelle « gain » est en effet bien diffèrent de ce que Socrate appelle « bien » et c’est sur la route de cette distinction qu’il compte amener le dialogue.
Transvaluer
La pratique philosophique invite fondamentalement à une réflexion sur les valeurs. Cette remise en question peut déboucher sur une réévaluation de ce qui est important dans notre vie, et à réajuster notre éthique, de là l’importance du sujet-pensant dans le processus. Cette invitation à la transvaluation[^10] imprègne les trois dialogues de Platon. Il s’agit d’une compétence centrale de la pratique socratique et des Nouvelles Pratiques Philosophiques comme le caring thinking de Lipman et Sharp, la consultation philosophique, et autres pratiques impliquant une subjectivation de la pensée.
Le dialogue Les Rivaux est justement introduit par une transvaluation. Socrate invite son interlocuteur à revisiter la valeur de la philosophie : « Je lui demandai donc, en le poussant un peu du coude, de quoi ces deux jeunes gens étaient si fort occupés. Il faut, lui dis-je, que ce soit quelque chose de grand et de beau, pour exciter une application si sérieuse ? Bon ! me répondit-il, quelque chose de grand et de beau ! Ils sont là à bavarder sur les astres, et à débiter quelques niaiseries philosophiques. Surpris de cette réponse : Comment ! lui dis-je, jeune homme trouves-tu donc qu’il soit ridicule de philosopher ? » (132 b-c). Pour Socrate seule les activités grandes et belles méritent qu’on y exerce notre application et notre sérieux. La philosophie étant l’activité la plus grande et la plus belle, c’est à elle qu’il faut consacrer le plus d’application. On peut aussi penser que, implicitement, Socrate montre que les activités dont on conclurait qu’elles ne sont véritablement ni belles ni grandes méritent qu’on les délaisse ou qu’on n’y applique que peu d’application.
Socrate oppose donc sa valorisation de la philosophie à l’idée commune édictant que la philosophie ne sert à rien, que c’est du bavardage sans valeur. Rappelons que ce qui nous intéresse ici n’est pas tant l’idée que le geste, à savoir : questionner la valeur et savoir opérer un renversement.
Nous donnerons ci-après deux autres exemples de transvaluations socratiques que l’on retrouve dans nos dialogues, afin de saisir les champs d’action de cette compétence.
La qualité contre la quantité
Dans Les Rivaux, Socrate poursuit son renversement en remettant en cause le primat de la quantité : « Et crois-tu, lui dis-je, que le goût de la gymnastique consiste à vouloir s’exercer le plus possible ? Sans doute, me répondit-il, comme le goût de la sagesse, la philosophie consiste à vouloir savoir le plus possible » (133 e).
La question de Socrate est ici ironique ; elle cache une volonté d’opérer une distinction entre le quantitatif et le qualitatif. Socrate valorise l’approprié doublée de la juste mesure, et non la quantité. On voit là que les idées de Socrate vont encore à l’encontre de l’opinion commune. On voit aussi apparaitre l’hubris de l’interlocuteur de Socrate qui n’hésite pas à donner pour mesure un terme aussi démesuré que “le plus possible”: reflet de la tendance humaine à n’être jamais satisfait et à vouloir se remplir sans soucis de la qualité du remplissage.
En général, on oppose plutôt à la quantité la pénurie ; ce qui revient à rester sur le plan de la quantité. Socrate doit ici trouver un moyen de faire sortir son interlocuteur de son paradigme par une problématisation… Geste classique du praticien philosophe.
La vie et la mort
Dans le dialogue Clitophon, Socrate propose une transvaluation métaphysique remarquable : « celui qui ne sait pas se servir de son âme doit la laisser inactive et ne pas vivre plutôt que de vivre abandonné à lui-même » (408 a).
Il vaut donc mieux mourir que de vivre abandonné à ses passions. On voit là deux choses : tout d’abord Socrate considère que la vie ne vaut la peine d’être vécue que dans la puissance de la vertu, et d’autre part on voit un certain détachement socratique face à la mort envisagée comme une option rationnelle dans certains cas. La vie vertueuse est au-dessus de tout, même de la subsistance somatique.
Cette dernière transvaluation marque de façon forte la volonté socratique de renverser jusqu’aux valeurs les plus sacrées. Tout, même la vie et la mort, peut faire l’objet d’un examen et d’un renversement. C’est ce même travail que se propose la pratique philosophique actuelle en examinant les valeurs du sujet-pensant, à l’aune de la raison, et en les remettant en cause.
La trans-formation du sujet
La question de la finalité semble étrangère au travail de philosophie pratique. Le processus est en effet une fin en soi. Mais si aucune fin n’est à attendre au bout du dialogue il n’en va pas de même du sujet dont nous avons convenu qu’il est au cœur du processus. Quels sont les effets de la pratique sur le sujet-pensant ? Qu’est-on en droit d’attendre du travail sur les attitudes et les compétences dont nous avons parlées précédemment ?
Désidentification à la parole
L’un des effets frappants de la pratique philosophique est la désidentification au discours. Nous sommes notre discours, nous sommes nos idées, et en même temps nous ne les sommes pas. Nous pouvons en effet changer d’idées. Si l’ego mondain peut être objectivé, le sujet transcendantal peut se distancier et observer son discours.
L’une des finalités métamorphiques de la pratique est donc de provoquer une distance à soi.
Distance du philosophe
Nous nous identifions émotionnellement à notre discours. C’est ce qu’on observe notamment dans le dialogue Clitophon dans lequel Clitophon attribue à Socrate des émotions qui en disent plus sur lui que sur Socrate : « tu es fâché contre moi » (406 a), « tu es si fort irrité ». Pour Clitophon, toute critique est personnelle, et la réfutation implique émotionnellement l’auteur des idées. Mais contrairement à ce que pense Clitophon, Socrate n’est pas irrité devant le critique, car il cherche à se corriger et à cultiver ce qu’il y a de juste en lui : « J’aurais tort de m’opposer au désir que tu montres de me rendre service. Dès que tu m’auras découvert ce qu’il y a de bien et ce qu’il y a de mal en moi, je poursuivrai l’un, et j’éviterai l’autre de toutes mes forces » (407 a). Socrate cherche la critique, apprécie la critique, du moment que celle-ci est argumentée et a du sens. Pour Socrate, contrairement à ce que dirait l’opinion commune, la critique est positive, c’est un service que l’on rend à la personne critiquée. Socrate ne s’identifie donc pas émotionnellement à son discours ou à la critique portant sur son discours ; il est distant, rationnel et désidentifié.
Socrate semble considérer que tout discours mérite d’être critiqué et modifié par son auteur. Il y a donc dissociation entre l’auteur du discours et le discours en tant qu’objet.
Ce basculement identitaire est l’un des effets de la pratique philosophique. Le sujet est invité à sauter d’un paradigme à l’autre, d’idée en idée, jusqu’à ce qu’une prise de conscience de la plasticité surgisse. L’identification aux idées (consistant pour un sujet à considérer que lui et ses idées n’étant qu’une seul été même chose, remettre en question ces dernières revient à remettre en question le sujet, ontologiquement et moralement), a été problématisée.
La pratique philosophique invite ainsi à apprécier la critique, à en goûter la valeur par-delà les crispations égotiques.
Du drame de la recherche à l’examen du drame
La désidentification au discours est concomitante d’une autre transformation du sujet : la dédramatisation conduisant à une attitude de chercheur. Cet enjeu de la pratique philosophique contemporaine se retrouve dans le dialogue Clitophon ou la dramatisation commune est exhibée sous deux angles :
Le désir de réponses
L’interlocuteur de Socrate veut des conseils : « qu’y a-t-il après cela ? Par où commencerons-nous l’étude de la justice ? » (408 e). Mais Socrate frustre ces attentes en ne répondant jamais et en questionnant toujours. Socrate voit en effet la philosophie comme une dynamique, une attitude : c’est un homme qui habite le mouvement, l’instable, la recherche… Cela va contre la tendance humaine à vouloir s’établir sur du fixe, et à trouver des réponses définitives. Son attitude montre donc implicitement que le chemin dialectique est une fin suffisante, et que la soif de réponse peut être un frein au déploiement de la pensée.
La dramatisation de la contradiction
Dans ce même dialogue, Clitophon dramatise la contradiction. Pour lui, se contredire c’est avoir tort : « tu m’as dit que la justice consiste à servir ses amis et à nuire à ses ennemis. Mais plus tard tu as reconnu que le juste ne devait jamais nuire à personne » (410 a-b). Au contraire, pour Socrate il s’agit d’étapes du cheminement de la pensée. Socrate ne craint pas la contradiction temporaire.
La pratique philosophique est frustrante car elle questionne au lieu de répondre. Elle remet en question et déstabilise au lieu d’établir des fondations. Son but n’est pas de rassurer mais au contraire d’inquiéter. Le philosophe n’est pas un conseillé en sagesse qui nous dirait comment vivre et nous donnerait des recettes de bonheur. Ce n’est pas un coach.
La pratique philosophique enseigne au contraire à accepter nos contradictions, à jouer avec nos questions, à les dépasser et surtout à les dédramatiser.
Qualités du philosophe praticien
Derrière le travail d’attitude et d’aptitudes, apparait un enseignement bilatéral que nous qualifieront de didactique de l’exemplarité. Autant que faire se peut, le philosophe praticien montre l’exemple, ou du moins y tend. Nous nous pencherons ci-après sur les attitudes et compétences déployée par le philosophe dans les trois dialogues et les comparerons à l’exemplarité requise chez le philosophe praticien contemporain.
L’Auto-correction
Dans le dialogue Les Rivaux on observe une auto-correction de Socrate qui va contre l’idée répandue du philosophe encyclopédiste qui est sensé avoir toujours raison. Socrate n’a pas de plan défini au moment d’engager le processus, et se laisse l’opportunité de changer de voie. « D’abord, cette réponse me parut satisfaisante” (133 c) dit-il, mais « quand je vis qu’ils désespéraient de trouver ce que nous cherchions, je pris un autre chemin » (135 a).
L’exigence
Un exemple de fermeté dialectique et de détermination apparait dans ce même dialogue : « je le forçais de convenir que c’est le juste milieu qui est utile, et point du tout le trop, ni le trop peu ; et il en convint avec moi » (134 d).
La pratique philosophique évite en effet la complaisance. Il ne s’agit pas de brosser le sujet-pensant dans le sens du poil. Le philosophe invite le sujet à être exigeant avec lui-même, quitte à le forcer un peu quand cela est nécessaire.
L’étonnement :
Nous l’évoquions précédemment, au début du dialogue Hipparque, Socrate questionne une évidence : “Et qu’est-ce donc que l’amour du gain ? Et qui sont ceux qui se livrent à cette passion ?” (225 a).
Socrate interroge la définition d’un concept banal, qui cache une ignorance partagée par la majorité. On voit là l’attitude socratique habituelle de chercher derrière les représentations admises la vraie nature des choses, par un questionnement sur l’essence. Il questionne comme un enfant. Invitation, donc, à adopter une attitude d’étonnement, caractéristique de la philosophie.
Confiance en la raison :
Dans ce même dialogue, L’anonyme se sent acculé par le raisonnement. « Le raisonnement ne nous a-t-il pas forcé d’avouer que tous les gains, grands ou petits, sont bons ? anonyme : Il m’y a forcé, Socrate, plus qu’il ne me l’a persuadé. Socrate : Peut-être la persuasion viendra-t-elle ensuite » (232 b).
L’interlocuteur de Socrate s’oppose ici par un désaccord de principe. Il n’aime pas la logique car celle-ci va contre son opinion. Son critère de validation est doxique, égotique, mais pas rationnel. Il est pressé, anxieux. Sa temporalité est celle de l’émotion.
Socrate au contraire a pleinement confiance en la logique et en son pouvoir de persuasion à long terme. Il faut pour cela du temps « la persuasion viendra ensuite » : Socrate n’est pas pressé, il évolue sur une autre temporalité, un temps plus lent : celui de la raison.
Double jeu de miroir
On constate donc une constante didactique au sein de la maïeutique socratique et la pratique philosophique de l’IPP. Un double jeu de miroir est en jeu : l’attitude du sujet-pensant est reflétée par le philosophe qui en même temps reflète son attitude philosophique sur le sujet-pensant. Cette dynamique est loin du model « traditionnel » ou l’enseignant déverse un savoir dans un récipient « vide ».
Cette didactique demande tout d’abord du courage de la part de philosophe mais aussi du sujet interrogé. Il faut assumer ses pensées face au philosophe qui de son côté doit assumer sa position parrèsiastique[^11]. C’est une situation agonistique, où l’on se dit tout, en face à face, sans demi-mots et sans secrets, ou l’on doit rendre raison de ce qu’on dit. C’est le moment d’examiner la parole à l’aune de la raison. Pour ce faire, cet exercice demande de la distance.
Un praticien philosophe doit s’oublier lui-même et n’être qu’un “il”, représentant du genre humain doué de raison, sans importance personnelle particulière. Sans cela comment pourrait-il se tourner vers l’autre et comprendre sa façon de penser ? Pour entrer dans le dialogue, l’ipséité doit se dissoudre en une conscience plastique, mobile, naviguant entre l’universel et le singulier.
Le philosophe invite, par cette attitude, le sujet qu’il interroge à se distancier, à ne plus coïncider avec sa parole mais à l’observer, comme s’il s’agissait des mots d’un autre.
Cette distance à soi cultivée dans les deux pôles du dialogue est la condition de possibilité d’un examen serein.
Ce double jeu de miroir se manifeste de diverses manières dans les trois dialogues soumis à notre analyse. Nous avons retenu six exemples que nous exposeront ci-après :
Assumer sa parole:
Dans le dialogue Clitophon, Socrate demande à son interlocuteur de rendre compte des critiques qu’il a proférées sur lui avec d’autres personnes. « On m’a rapporté dernièrement que Clitophon, fils d’Aristonyme, dans un entretien avec Lysias, a blâmé les conversations philosophiques de Socrate » (406 a). Il s’agit d’une invitation à assumer ses propos, à avoir le courage d’affirmer ses jugements devant les personnes directement concernées et donc, à entrer en dialogue. Socrate considère qu’une parole blâmée doit pouvoir se défendre pour que l’un et l’autre des pôles dialogiques puissent s’élever. La parole blâmée, dans ce cas, est l’ensemble des conversations que Socrate a tenues dans sa vie. Ces conversations demandent un droit de réponse pour ne pas être des discours morts mais des bases de réflexion. En engageant cette recherche, Socrate reflète la lâcheté de son interlocuteur, tout en montrant son propre courage parrèsiastique. Socrate n’a pas peur de confronter et d’assumer ses paroles.
L’agôn
Par des formulations comme « je trouvai à propos de pousser un peu mon athlète » (134 a-b), « veux-tu donc combattre contre deux ? » Socrate montre une vision du dialogue en tant que combat, dans Les Rivaux. Le concept d’Agôn est sous-jacent : Socrate invite à combattre, certes, mais de façon fraternelle. C’est à une lutte philosophique à laquelle il convie ses interlocuteurs. Cela est explicite dans le dialogue Hipparque lorsque Socrate se défend des mauvaises intentions qu’on lui prête en affirmant : « je n’oserais jamais te tromper, toi qui es mon ami » (229 b). Socrate reflète bien souvent l’attitude paranoïaque et belliqueuse de ses partenaires, tout en montrant par sa conduite comment il faut combattre.
La parrhèsia produit la parrhèsia
Dans Les Rivaux, l’interlocuteur de Socrate avoue que face à un autre il disputerait en sophiste pour triompher. Mais la présence de Socrate l’empêche de discourir de la sorte. Deux hypothèses peuvent expliquer ce comportement : 1. L’œil de Socrate produit la honte de se comporter en rhéteur, car chacun sait que Socrate voit clair dans ce petit jeu. 2. Socrate est trop intelligent pour être manipulé : nul n’ose l’affronter en combat rhétorique.
Dans les deux cas, le double jeu de miroir pédagogique apparait encore. Socrate reflète l’attitude de son interlocuteur tout en cherchant à refléter la sienne.
Le Courage De L’ignorance
Dans le dialogue Les Rivaux, on observe un procédé ironique de Socrate lorsque celui-ci parle de honte. « Puisque nous ne saurions nous tirer de là, leur dis-je en badinant, voulez-vous que nous appelions à notre aide ces deux jeunes garçons ? ou peut-être en aurions-nous honte ? » (135 a). Il est bien évident que pour lui il n’y a aucune honte à ne pas savoir, au contraire, il semble plutôt nous inviter au courage d’assumer notre ignorance. Par cette question sur la honte il compte sans doute éveiller le sens philosophique de ses interlocuteurs en écartant toute dynamique d’infatuation narcissique ou l’on tenterait de cacher son ignorance, comme s’il s’agissait d’une chose honteuse.
En guise de parallèle, l’un des moments clefs de la consultation philosophique est la prise de conscience de l’ignorance, quand le sujet-pensant est surpris en flagrant délit de faire semblant de savoir. Ce moment émotionnel est la base servant à éveiller un intérêt pour ce dont on manque (la connaissance) et inviter à penser véritablement.
Le double jeu de miroir est encore présent : le philosophe reflète l’ignorance inconsciente du sujet tout en l’imbibant de son propre courage d’ignorant conscient.
Être présent au dialogue
Dans le dialogue Hipparque, Socrate invite son interlocuteur a une attitude de présence : « Prends garde de parler avec cette vivacité, comme si quelqu’un t’avait fait tort : efforce-toi plutôt de m’écouter avec attention et de me répondre » (225 b). Socrate invite à la retenue dans le dialogue. Il critique l’empressement de celui qui a des choses à défendre et se sent attaqué, car cette attitude empêche de penser librement. La solution qu’il propose contre cette attitude chaotique est l’attention. Il invite à la concentration et à l’écoute ; à se focaliser sur le processus.
Prendre Son Temps
Dans ce même dialogue, on observe que Socrate avance par étapes. Il fait admettre chaque pas du processus, d’abord appliqué aux vérités générales, puis en ramenant le thème au sujet qui parle, passant de l’universel au singulier, de sorte que ce qui est admis dans la discussion est solidement fondé. Socrate est prudent, lent et méthodique. Il connaît les subterfuges du langage et ne veut pas se perdre dans les méandres de discussions aériennes : il veut avancer, pour ce faire, il va lentement.
Une critique commune contre la pratique philosophique de l’IPP porte justement sur son côté laborieux. Cette lenteur irrite ceux qui voudraient des résultats et des réponses. La pratique ne propose qu’un lent processus sans finalité préétablie. Cette lenteur implique donc un travail sur soi-même : il s’agit de se tranquilliser, en faisant fi du désir d’excitation et d’efficacité.
Cette attitude, une fois de plus, doit être celle du philosophe qui, en même temps reflète l’impatience du sujet questionné : double jeu de miroir.
CONCLUSION
Nous avons donc vu en quoi la pratique philosophique contemporaine centrée sur le sujet-pensant (telle qu’elle est pensée à l’IPP) se greffe sur la pratique socratique par ses outils, et ses priorités processuelles. Le travail d’attitude, d’aptitudes, la position du philosophe, la didactique de l’exemplarité et le double jeu de miroir sont autant de marques de cette similitude diachronique. Il va de soi que la maïeutique socratique ne saurait s’identifier à la pratique philosophique de l’IPP. Notre objectif n’est point d’établir une comparaison d’expert mais bien de montrer certaines similitudes intéressantes, d’une part pour confirmer l’idée que la littérature platonicienne ou pseudo-platonicienne se fonde sur une pratique qui a eu lieu (l’expérience des praticiens actuels arrive à des méthodes et des conclusions similaires) ; d’autre part pour montrer la similitude épistémologique entre deux pratiques qui, par-delà vingt-trois siècles, coïncident et considèrent que l’exercice de la pensée fonde la théorie, non l’inverse.
Platon. (2008). Œuvres complètes. Sous la direction de Brisson Luc. Paris. Éditions Flammarion. Platon : Clitophon. En ligne : http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/cousin/clitophon.htm ↩︎
Platon. Les Rivaux. En ligne : http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/cousin/rivaux.htm ↩︎
Platon. Hipparques. En ligne : http://remacle.org/bloodwolf/philosophes/platon/cousin/hipparque.htm ↩︎
Platon. Gorgias. La Bibliothèque électronique du Québec. En ligne : https://beq.ebooksgratuits.com/Philosophie/Platon-Gorgias.pdf ↩︎
Brenifier, O. La pratique philosophique. En ligne. Lien: http://www.pratiques-philosophiques.fr/wp-content/uploads/2015/07/La-pratique-philosophique-last-version.pdf. ↩︎
Foucault, M. (2009). Le gouvernement de soi et des autres II. Le courage de la vérité. Cours au collège de France, 1984. Lonrai. Seuil. ↩︎
Tozzi, M. (janvier 2008). De la question des compétences en philosophie. Sur la didactique de l’apprentissage de philosopher. Philotozzi. En ligne : https://www.philotozzi.com/2008/01/de-la-question-des-comptences-en-philosophie/ ↩︎
Leibniz, G. W. Lettre de 1707. Publiée par Samuel Koenig en 1752 dans son Appel au Public. En ligne: https://fr.wikisource.org/wiki/Samuel_Koenig,_Appel_au_public,_1752/Lettre_de_Leibniz_contest%C3%A9e_par_Maupertuis ↩︎