Revue

20e anniversaire du Café PhiloSophia de Daniel Mercier

Un anniversaire est une façon de jeter un regard sur une histoire, de faire un bilan, de pointer des évolutions, de tirer des leçons etc. Nous publions dans ce numéro un dossier sur le 20e anniversaire d'un café philo, nouvelle pratique philosophique dans la Cité depuis 1992 en France : le point de vue de son animateur, celui de quelques participants, et le compte-rendu de quelques activités : conférence, ateliers. Il y eut aussi un goûter philo, un café philo, des lectures de textes, autour d'une atmosphère très conviviale. Voir le détail de la manifestation en annexe.
Ci-dessous le point de vue des animateurs et de participants

A) Quelques réflexions sur mon fonctionnement au Café philo (Daniel Mercier, animateur du café PhiloSophia)

A l'occasion du compte-rendu des 20 ans du Café Philo Sophia, et dans le prolongement des nombreux témoignages de participants, je souhaiterais expliquer le plus clairement possible ce qui justifie à mes yeux les options que j'ai choisies concernant l'animation de ces cafés, à savoir une présentation assez longue du sujet (30'), nourrie de références philosophiques précises, et un style d'animation qui accueille les propos tenus, mais dialogue également avec eux... Avant d'aborder cette question sous un angle résolument philosophique, je dirai auparavant quelques mots personnels sur l'engagement qui est le mien

Le lancement de cette activité philo et sa longévité de 20 ans est inséparable pour moi d'un engagement résolu dans un travail philosophique quotidien. Les séances mensuelles de café rythment mon travail en lui donnant contenus et échéances précises. C'est cet ensemble qui donne son sens à ce que je fais et me permet de tenir ! Il se trouve que jusqu'à présent, ce fonctionnement rencontre des personnes intéressées. Mais j'ai conscience que bon nombre de personnes sont venues faire un tour au café philo et n'y ont pas trouvé leur compte. Notamment pas assez de spontanéité, d'interactivité, trop d'apports. Mais ce n'est pas un problème, ces personnes trouveront d'autres lieux où elles pourront s'exprimer plus librement. Sans doute aussi en se privant de ce tiers médiateur à la discussion que représente la référence "documentée" à l'héritage philosophique, aux "oeuvres". Ce que je vais expliquer. Pour fermer cette parenthèse plus personnelle, je fais ce que je sais faire (du moins je le pense), et ce que je désire faire. Venons-en à la façon dont je peux justifier philosophiquement ma manière de faire...

Je voudrais montrer ici pourquoi le voyage philosophique est aussi un voyage au Pays de la Philosophie et de ses habitants, je veux parler des philosophes. Les philosophes ne sont pas dans les bagages. Ils font partie intégrante des contrées à explorer ! Le voyage philosophique est aussi un voyage au pays de la philosophie. Le propos qui suit n'est pas vraiment organisé, mais les points suivants relèvent, je l'espère, d'une forme de cohérence interne...

"Penser par soi-même " (Kant), la formule est heureuse mais attention à sa complexité derrière sa trompeuse apparence. Une autre formule intéressante aussi, de Platon, décrit la philosophie comme "dialogue intérieur de l'âme avec elle-même". Il faudrait montrer qu'il ne s'agit pas d'un soliloque, malgré les apparences. Philosopher, c'est comme vivre : la constitution de ce que l'on est et devient passe par autrui. Nécessaire tribu de la pensée à ce qui la précède...

Le besoin impérieux d'expression personnelle et de communication entre égaux depuis 68, contre le vieux monde autoritaire, est patent. Cela est digne d'intérêt et bien sûr à promouvoir, mais il y a des dérives possibles en ce qui concerne notre projet ou visée philosophique (c'est l'objectif de cette activité telle que je la conçois) : prétendre philosopher en oubliant la philosophie. Je suis convaincu que la physionomie de nos discussions, leur teneur, leur orientation, doit beaucoup à l'apport philosophique introductif. C'est une façon de marquer en quelque sorte la précédence et l'antériorité de cet héritage par rapport à nos discussions ici-maintenant.

Faire coexister le "savoir-savant" et la réflexion collective, ne pas opposer philosopher et philosophie, reconnaître et faire connaître l'immense héritage que nous lègue l'histoire de la pensée philosophique, sont des tâches qui bien loin d'être antagonistes, doivent s'alimenter les unes les autres. Cela veut dire en particulier maintenir les exigences d'une réflexion philosophique de qualité, tout en relevant le défi d'une véritable "philosophie populaire". Je suis pour une fois d'accord avec la formule de Michel Onfray, la "philosophie pour tous" doit être un "élitisme pour tous".

Nous devons faire la différence à ce sujet entre une propédeutique philosophique et une réflexion philosophique qui s'appuie déjà sur l'édifice de la philosophie. Les deux étant légitimes.

Le "penser par soi-même" est en quelque sorte le porte-drapeau du credo rationaliste qui est celui de la Modernité, que nous ne pouvons qu'approuver : doté d'une raison commune à tous, nous avons tous vocation à philosopher dans le langage qui est le nôtre, sur des sujets qui nous concernent tous, et ainsi s'en prendre à tout argument d'autorité, à toute soumission aux dogmes du passé, à toute répétition non questionnée de la tradition. Mais cela implique-t-il que nous devions faire "table rase du passé" ? Entre l'oubli pur et simple et la vénération qui n'aide pas plus à penser, les oeuvres du passé et du présent ont beaucoup à nous dire :

  1. La philosophie est un univers symbolique qui a ses propres codes (comme d'autres disciplines), que l'on ne peut méconnaître totalement. Et l'on ne peut pas explorer ce monde sans se familiariser avec ses habitants que sont les philosophes, seuls capables de nous délivrer un certain nombre de cartes du territoire.
  2. La réflexion philosophique s'inscrit dans le temps long, de l'intelligence d'un dialogue continué depuis des millénaires, d'une histoire des idées qui est constitutive de notre monde humain. A ce titre, ce café philo, je le crois, n'est pas étranger aux enjeux d'éducation et de transmission dont nous avons parlé en novembre dernier à propos de l'héritage.
  3. Cela n'empêche pas qu'il est potentiellement inhérent à toute vie humaine de s'interroger sur cette vie, d'être "réflexif" ("Penser sa vie, vivre sa pensée"), et donc nous sommes tous peu ou prou des philosophes. Mais cela n'empêche pas non plus que l'apprentissage du philosopher soit lent et progressif, comme dans tout apprentissage, et qu'un enfant-philosophe ne l'est pas au même sens que Kant ou Spinoza. Cela ne signifie pas qu'il faut enseigner Kant ou Spinoza aux enfants, cela signifie qu'il faut mesurer la distance qui les en sépare et considérer que la philosophie est l'objet d'un cheminement personnel parfois laborieux où l'on se confronte à l'Autre, à des pensées qui nous résistent souvent, et dont l'appropriation (partielle) est souvent lente et progressive. Si "apprendre c'est sortir de soi", alors cela signifie que mon expérience doit accepter de se confronter à cet Autre pour s'enrichir.

Dire que chacun a toujours de "bonnes raisons" de penser et de dire ce qu'il pense est légitime. Mais à condition de ne pas confondre "les bonnes raisons" au sens psychologique avec la plus ou moins grande consistance d'un développement rationnel par rapport à tel ou tel sujet. Nous pouvons être tous égaux en dignité et très inégaux dans la façon dont nous exerçons notre réflexion.Ce n'est pas parce que la vérité au sens absolu est inatteignable que toutes les affirmations se valent et que nous ne pouvons pas les discriminer en fonction de leur degré de pertinence, de rigueur, et de profondeur : il y aura toujours des jugements plus ou moins vrais ou plus ou moins faux. Et surtout certaines erreurs sont plus intéressantes, par les horizons de pensée qu'elles ouvrent, que certaines vérités triviales qui ne nous apportent rien...

Montaigne est un de ceux qui placent le plus haut l'indépendance du jugement fondée sur la sincérité, et il est le premier aussi à prendre de la distance vis-à-vis de ses propres points de vue pour les mettre à la critique, à refuser toute complaisance de cette sorte en adoptant le point de vue des autres, en s'appuyant pour les retravailler sur les jugements des Anciens de l'Antiquité. C'est à ce prix que la pensée avance... Pensons à cet élève de terminale qui pensait avoir réussi une dissertation sincère et personnelle "en exprimant ses idées" et qui est déçu par sa note et les appréciations de l'enseignant qui mentionne "une suite de banalités". On peut faire l'hypothèse qu'il a effectivement enchaîné des lieux communs non questionnés appartenant à un certain type d'environnement, en ayant l'impression d'être très "personnel". Seule une confrontation intellectuelle avec une parole ou un écrit "autre", capable de le mettre à distance critique (au sens de l'examen) des premières idées qui affleurent spontanément, pourra le faire avancer dans la formation de son jugement. N'est-ce pas au fond la raison d'être de l'éducation et de la culture, en tant que médiation permettant d'avoir prise symboliquement sur le monde ?

L'art, comme la philosophie, sont souvent hantées par le fantasme du "point zéro", du retour aux choses mêmes dans la nudité de leur "premier commencement". Bref à la virginité du regard enfantin. Mais nous nous rendons compte que Cézanne ou Paul Klee qui rêvent de "peindre avec la naïveté d'un enfant", de "donner l'image de ce que nous voyons en oubliant tout ce qui a été fait avant" (Cézanne, 1904), Montaigne de préserver "la simplicité naturelle et la naïveté enfantine", Descartes de faire table rase de toutes les connaissances antérieures pour s'appuyer sur le "point zéro" de toute connaissance (le cogito) et reconstruire à parti de là, Husserl ou Merleau-Ponty qui veulent revenir à "la chair des choses mêmes" en les débarrassant de toutes les stratifications mentales ou sociales qui les recouvrent, sont tous sans exception pétris de notre vieille culture occidentale, et, pour les peintres, rompus à toutes les techniques de l'histoire de la peinture qui les ont précédées. La figure de l'enfance peut servir ici de métaphore, tout en sachant qu'aucun enfant ne pourra faire un tableau de Paul Klee, ou écrire les Méditations cartésiennes de Husserl... De telles recherches en direction d'une sorte de fraîcheur ou de créativité enfantine ne peuvent paradoxalement aboutir à un résultat qu'au prix d'arides et souvent douloureuses médiations sociales et culturelles dont le trajet personnel de tous ces artistes ou philosophes est l'illustration.

En conclusion

Peut-être y a-t-il implicitement dans la manière de présenter ma pratique un ressenti personnel (mais pas seulement...) que deux "cultures" se confrontent aujourd'hui : les médiations de communication entreraient de plus en plus en conflit avec les médiations d'éducation : d'un côté, communication immédiate et horizontale, utilisation d'un savoir externalisé dans la boîte de l'ordinateur que l'on utilise en self-service selon les besoins, et goût pour la spectacularisation de ce savoir ; publicité, désir de divertissement, goût pour la polémique. De l'autre côté, communication hiérarchisée, lente, coûteuse ; appel à la mémoire comme moyen et comme hommage, dans le cadre d'un rapport vivant à son passé. Changement de logiciel en perspective ? J'ose espérer que non !

Même si la solitude intérieure est un passage obligé du retrait réflexif, le dialogue avec les autres est tout aussi nécessaire. Et en particulier le dialogue virtuel avec tous ceux qui se sont avérés être des figures incontournables de la réflexion que l'humanité n'a jamais cessé d'opérer sur elle-même, et donc les philosophes notamment. C'est eux que je tâche de faire vivre dans ma présentation.

Je ne reviendrai pas sur la précédente conférence sur l'héritage, mais je rappellerai seulement ces paroles d'André Comte-Sponville : "On ne possède jamais que ce qu'on a reçu et transformé, que ce qu'on est devenu grâce à d'autres ou contre eux" ; et celles de Derrida : "Hériter, c'est reconnaître "que nous devons recevoir ce qui est plus grand, plus vieux, plus puissant, plus durable que nous". Il n'y a pas de pensée véritable qui ne s'inscrive dans un héritage, même les pensées les plus innovantes...

Je peux maintenant essayer de répondre aux trois questions que m'a posées Diotime.

1) Comment t'est venue cette idée d'animer un Café philo, et pourquoi es-tu passé à l'acte ?

Je pense avoir déjà répondu dans la première partie de mon précédent propos : il s'est agi pour moi de renouer avec mes anciennes amours interrompues (en surface) un long moment par l'histoire de ma vie. Achever ou "réparer" en quelque sorte quelque chose qui était inachevé et s'était interrompu prématurément, et "manquait" à ma vie...

2) Que représente pour toi un Café philo ? Et plus particulièrement le tien ?

Un lieu de discussion nourrie, alimentée par la pensée qui nous précède, d'où mon travail de présentation. Pourquoi faire ? Tenter d'avoir une compréhension et donc aussi un usage du monde qui nous élève au-dessus de la nature et au-dessus de la barbarie spontanée. Un lieu aussi qui essaie de construire un équilibre autour d'une double exigence : celle d'une nécessaire initiation/éducation (qui passe qu'on le veuille ou non par une transmission), la précédence étant constitutive de l'expérience humaine, mais aussi la nécessaire démarche active du "nouvel individu" qui revendique justement son autonomie dans la construction et l'appropriation subjectives de sa pensée et de ses connaissances. Le café philo tente ainsi de proposer un équilibre entre indépendance et appartenance...

3) Tu passes le cap de tes vingt ans d'animation. Quel bilan peux-tu faire ? Quelles sont tes satisfactions ? Y aurait-il d'après toi des aspects à améliorer ?

J'ai le sentiment d'avoir tenu bon du côté des médiations d'éducation, sans négliger les médiations de communication ! Mais je sais que beaucoup des personnes qui sont passées au café philo depuis 20 ans ne se sont pas arrêtées longtemps parce que leurs attentes étaient ailleurs : pouvoir "être soi-même" et parler en dehors de tout code un tant soit peu contraignant, sans s'embarrasser de toute forme d'antécédence dans la pensée (du moins le croient-ils). Ne pas souhaiter se confronter à une pensée dont l'altérité première nécessite l'effort d'une compréhension parfois laborieuse. Privilégier plutôt l'expression de soi à la découverte d'une autre pensée qui résiste à la spontanéité des premiers jets. Bref, chacun a pu se prononcer en connaissance de cause et je suis à posteriori satisfait de cette décantation. Ceux qui viennent aujourd'hui au café philo le font en sachant précisément ce qu'ils peuvent y trouver. Les insatisfactions ou satisfactions inhérentes à la pratique que je viens d'évoquer tournent surtout autour d'une préoccupation centrale pour moi : celle du bon "dosage" ou équilibre entre les deux exigences que j'ai essayé d'identifier : transmettre une pensée philosophique de qualité, et faire vivre une activité réflexive authentiquement populaire. Double exigence qui recouvre en partie un double souci : celui de la transmission et celui de conditions de communication et d'échanges les plus fonctionnelles possibles. Voilà en fin de compte ce qui me sert de thermomètre intuitif à l'issue de chaque séance...

En ce qui concerne les aspects à améliorer, sans doute sera-t-il nécessaire de revoir l'organisation temporelle, beaucoup de personnes profitant de la pause pour s'en aller (il faut dire que c'est l'heure du repas, 19H30 ou 19H45, parfois 20h !). Notre café philo, entrecoupé par une pause de 20', s'étire un peu trop en longueur et devrait gagner en "dynamisme" en raccourcissant le temps global de discussion et en reportant l'apéritif à la fin... Un changement facilement réalisable, même si les personnes "fidèles" sont très sensibles à l'aspect très ritualisé et habituel des séances ! Enfin pour terminer, il faut constater au cours du temps un certain tassement de la participation du Café Philo Sophia, alors que d'autres cafés philo sur le territoire naissent et se développent (avec mon concours). Cette tendance sera à suivre de près.

B) Quelques réactions de participants dans la phase témoignage

Témoignage de Patrice

Je suis un peu frustré de ne pouvoir trop parler et d'intervenir peu souvent. Mais c'est la règle et je la respecte. Souvent les sujets qui m'inspirent peu sont parfois ceux qui m'apportent le plus, car je n'avais pas d'attentes extraordinaires, et je suis surpris favorablement. Ce sont toujours les mêmes personnes qui interviennent. Nous ne parvenons pas à fidéliser de nouveaux membres qui ne font que passer. J'avais l'illusion qu'en changeant régulièrement de lieu (à travers la communauté de la voie domitienne), nous arriverions à élargir et à enrichir le cercle. J'aime bien le concept établi par Daniel et les fondateurs : bonne organisation, bonne régulation de la parole, bonne préparation du sujet avec un contenu riche qui lance bien la discussion.

Pour moi le charme de la philo est constitué par les interactions souvent inattendues du public ; on ne sait jamais à l'avance ce que cela va donner en termes de "production". C'est très souvent au delà de mes espérances ; à plusieurs, c'est tout de même plus roboratif. Par contre, par opposition avec le café philo, au niveau d'un atelier philo, on peut intervenir plus souvent et plus longtemps. On peut davantage préparer, car on pourra utiliser cet apport ; c'est donc plus approfondi.

Témoignage de Jean-Jacques

Je me souviens d'un temps lointain, où avec deux ou trois copains, nous nous réunissions autour d'une bière à la brasserie du bowling de Nancy. Nous passions l'après-midi à refaire le monde (il faut dire que nous étions en 68), ou bien nous discutions de sujets tels que la finalité de l'existence, déterminisme ou liberté. Beaucoup plus tard, mon intérêt pour la physique quantique m'a amené au questionnement sur ce qu'est le réel. Depuis 4 ou 5 ans, mon approche de la biologie et notamment de l'épigénétique m'interrogea sur "Qu'est-ce-que le vivant ?" C'est dire que mes relations avec la philosophie ne datent pas d'hier.

Mais venons-en à la question "Qu'est-ce que m'a apporté le café-philo Sophia ?" que je fréquente depuis plus de 15 ans ?".

Ma première réponse est : une ouverture d'esprit.

Il n'est plus question d'une réunion à 2 ou 3, mais de l'opinion d'une vingtaine de personnes. La diversité des interventions m'a permis de cerner un sujet d'une manière holiste ; un dé n'est plus pour moi un rectangle avec un point mais un cube avec des points allant de 1 à 6...

Ma deuxième réponse est le plaisir de la convivialité des séances.

En effet, le café philo est un lieu de rencontres où, au fil du temps, des relations amicales se sont formées au cours des pauses et des prolongements festifs autour d'un repas.

Ma troisième réponse est l'apprentissage à la discipline organisationnelle d'une pensée.

Le café philo est aussi un lieu d'échanges, proposant à chacun le droit à la parole. Ce principe exige des réponses courtes et peu fréquentes. De ce fait, il est nécessaire d'organiser mentalement son intervention de manière synthétique, mais tout de même compréhensible avant de l'exprimer. J'avoue avoir encore du travail à faire dans ce domaine.

Ma quatrième réponse est la transformation de moi-même.

Au fil du temps, je suis convaincu d'avoir acquis une vision plus globale, non seulement sur les sujets traités, mais aussi sur l'ensemble de ma réflexion. La répétition continuelle d'une pratique quelle qu'elle soit, entraîne, lentement mais surement, une transformation interne, une alchimie sur le pratiquant. Je suis donc devenu un être différent.

Ma cinquième réponse est une aide à ma recherche de vérité scientifique.

Ma quête reste cependant et avant tout scientifique. Pourtant je dois reconnaître que l'approche philosophique m'est une aide non négligeable. Elle me permet de borner la zone inconnue qui réside et résidera toujours entre les valeurs de la connaissance et l'asymptote de la vérité absolue (s'il y en a une).

D'autre part, ma mémoire volatile ne me permettant pas de mémoriser tous les sujets, un retour sur les textes "Ecrits philo" de Daniel m'est souvent bénéfique.

Témoignage de Michèle

Pourquoi suis-je venue au Café philo organisé à Maureilhan?

Au départ j'ai aimé la Philosophie dès la classe de terminale. Je garde des cours de philo un souvenir très précis. J'avais une jeune enseignante qui savait nous passionner et, élève de Mathelem, je regrettais de ne pas avoir plus d'heures de philo dans la semaine. Plus tard, j'ai toujours aimé le débat et ma rencontre au Collège de La Dullague avec Marie Pantalacci m'a fait découvrir une autre facette à travers des cafés philos pour enfants. Marie m'a parlé du Café philo qui avait débuté depuis peu à Maureilhan. J'y suis venue "pour voir" et... je n'ai jamais envisagé d'arrêter. Je trouve les échanges très riches et j'aime l'écoute bienveillante de tous. J'apprécie que le public soit très divers avec des amateurs de philo comme moi mais aussi des "spécialistes" qui permettent d'enrichir les débats. Après les séances, je repense à ce qui a été dit et mon avis devient plus nuancé après la confrontation avec les autres. J'aime les introductions de Daniel qui nous permettent de cerner le sujet. Lors des cafés philo, j'aime retrouver le noyau des "fidèles" enrichi par des participants qui viennent, disparaissent un temps puis reviennent. Ainsi selon le thème le public est différent et on peut avoir de belles surprises.

Témoignage de Françoise

Vingt ans, le bel âge.....

Ce que je suis venu chercher au café philo ? Comme une étudiante un peu attardée que je suis, je suis venue chercher la poursuite d'un savoir, le plaisir de retrouver auteurs et thèmes que j'avais abordés autrefois. Et les présentations de Daniel, les références à tel ouvrage, tel auteur, m'ont apporté cette matière et encouragé à lire davantage. Mais cette dimension seulement "scolaire" n'est qu'une infime partie de ce que ce café philo m'apporte.

Mes petits camarades du samedi soir ne mesurent peut-être pas à quel point leurs interventions sont importantes pour moi. Que je partage leur point de vue ou pas, leur apport, leur éclairage sur le sujet du jour alimentent ma pensée et ce, durablement. Et de ces échanges, au long du temps, s'est créé un collectif chaleureux, bienveillant, je crois accueillant à tout nouvel arrivant, curieux des différences exprimées, respectueux du jardin secret de chacun.

Longue vie à ce café philo. Il m'est précieux. Vous m'êtes précieux.

Témoignage de Francine

Lorsque j'envisage le thème de la soirée, le parcours est parfois rapide... Daniel (l'animateur) élargit ce thème dans des zones que nous découvrons avec grand intérêt. L'âge moyen au café n'est pas très jeune me semble-t-il. Il y a un grand intérêt de retrouver à notre âge les hypothèses qui émerveillaient notre intellect en fin de lycée. L'animateur ne prend jamais parti, et je l'ai entendu stopper la "déviance politique" d'une jeune femme. Quand je remets mes clés de contact sur la voiture, il me semble que mon esprit s'est élargi. L'année dernière ma belle-fille et ses trois filles (14, 16, 21 ans) étaient en vacances chez moi, et avaient envie de me suivre au café philo. Elles y ont trouvé un grand intérêt, et l'une d'entre elles m'a dit : "Tu as de la chance d'avoir ces "conférences" chez toi"...

Témoignage de Michel

Mon intérêt pour participer à ton café philo

  • Intérêt pour le café philo comme nouvelle pratique philosophique dans la cité depuis la création du premier en France en 1992. Figure socratique du philosophe dans la cité, non enfermée dans l'école ou l'université, dans une version académique de la philosophie et de son enseignement, avec un public captif. Responsabilité du philosophe d'accompagner des personnes volontaires dans leur réflexion. Prendre tout son sens dans un pays démocratique, où le citoyen, et plus largement tout humain, doit avoir une opinion éclairée sur les grands problèmes sociétaux, le Bien commun, le Juste, et les problèmes plus personnels...
    Depuis plus de 21 ans, j'anime le café philo de Narbonne. Quand on est animateur, on a une certaine place, du côté de celui qui introduit le sujet par une introduction problématisée, lance et conduit les échanges, reformule ce qui se dit et relance pour approfondir, ne dit pas son point de vue pour laisser ouverte la discussion.
  • Intérêt d'être ailleurs participant d'un autre café philo que le sien, pour ne pas oublier cette autre place, celle du participant, qui s'imprègne de l'introduction, et élabore sa propre pensée en entendant celle des autres ou réagissant à leurs propos. Intérêt donc d'un lieu privilégié, qui donne l'opportunité de construire sa pensée et de la communiquer.
  • Intérêt enfin, à un niveau plus méta, de pouvoir observer un autre café philo, le style spécifique de son animateur, la dynamique particulière du groupe ici rassemblé.

Témoignage de Dominique

Dominique est mon nom et voici comment je fais usage du ''Café Philo Sophia !''. Je dis comment et non pourquoi parce que les cafés-philos ne sont pas des remèdes (les philosophes grecques disaient pharmakon) pour soigner une pathologie fantasmée de l'Etre. Mais un outil de musculation intellectuelle, fortifiant et jubilatoire, pour esprit en besoin de stimulation. Un mois calendaire, un thème d'actualité, une observation du genre humain, une interrogation conceptuelle. C'est LA question du Café Philo.

Cette question va tenir en éveil permanent mon attention aux faits du monde qui en font l'écho, et l'effet révèle combien mon écoute était superficielle et improductive.

C'est ma nouvelle audition de la rumeur du monde.

L'excitation si un mot, une réflexion, une attitude verbale viennent remplir mon carnet d'éléments, source et fondement du modèle représentatif pour la question.

La fébrilité si l'intuition, la logique ou quelques lectures savantes, pour le béotien que je suis, valident la véracité des données, ces briques constitutives de l'édifice interprétatif de la question.

L'étonnement que ces nouveaux savoirs comblent le vide, la béance de mes connaissances initiales.

La déception de ma lente traduction d'une langue philosophique pas facilement accessible pour mon entendement.

Puis la joie de parvenir laborieusement au décodage de concepts que je pensais, pour certains, connus, mais certainement non compris.

Alors, fort de ces connaissances, peut-être pourrais-je même dire savoir, arrive l'expérience concrète et active du café philo.

Ici vont s'exposer, se comparer, se confronter les avis, les opinions, les idées, les interprétations des participants dont peu sont philosophes de métier, mais dont tous aiment la dialectique. C'est l'instant frustrant et magique.

Frustrant de voir mon château de cartes mentales qui construisent ma réponse s'effondrer en morceaux conceptuels sur mes pieds de pensée (d'où l'expression penser comme un pied). Pieds que j'aurai mieux fait de mettre sur le chemin du relativisme. Ceci, pour cause d'une synthèse impossible des possibles présentés par le pédagogue didactique et durkheimien, l'artiste imaginatif et épicurien, ma voisine soirée sensible et anti hégélienne parce que féministe, l'agent public légaliste et cartésien, le scientifique logique et platonicien, l'animateur rusé et nietzschéen, le commerçant pragmatique et stoïcien, mon camarade à l'humour cynique, de fait un microcosme en action.

Magique puisqu'ici pas d'absolu, mais le foisonnement d'échange singuliers. Car s'il y a une Vérité, il me reste à la construire avec ma cueillette d'expériences et d'arguments tels-les qu'énoncés-ées en ce moment. (Pardon pour l'écriture inclusive pas facile d'usage, mais à la lecture cela ne verra pas.)

Encore comblé du doute, et toujours fidèle à la question jusqu'à ce qu'une nouvelle interprétation émerge, qu'une autre question devienne nécessaire, pour en outre, continuer à douter.

Attention, douter n'implique pas, pour moi, l'absence de conviction et du besoin d'agir. Juste de rester en éveil philosophique (et non bouddhique) sur mes (in)certitudes interprétatives du monde ; en attendant le prochain Café Philo.

Témoignage d'un participant occasionnel qui n'est pas revenu au café philo

Bonjour,

J'avais envie de vous adresser ce message, après ma venue au café philo de Maraussan.

C'était ma première fois, suite à la lecture de Midi Libre, et je crains qu'elle ne soit sans suite. Pourtant, à l'issue de votre introduction, fort documentée, je me disais que je pourrais peut-être, à un moment ou un autre, témoigner d'un sentiment qui m'a longtemps poursuivi à propos de "ma vie", que jusqu'à trente ans j'ai eu l'impression de vivre "à moitié" ou "en dehors d'elle", jusqu'à ce que j'aie un fils, puis que j'ai perdu mon père...

J'avais bien compris les règles du jeu, et notamment qu'on s'inscrive à l'avance, et puis que nos interventions soient concises dans la mesure du possible.

Seulement, ma timidité a fait que j'ai préféré laisser quelques personnes s'inscrire en premier, pour "sentir" si l'utilité de ma parole s'imposerait, et quand... Plusieurs doctes messieurs ont donc commencé.

Mon Dieu... Puis-je vous dire que j'ai eu l'impression, pendant toute cette première partie, qu'un dialogue fermé s'était instauré entre des "abonnés" qui se connaissent bien et se fréquentent depuis longtemps (vingt ans, peut-être ?), s'interpellent à un niveau de science bien supérieur au nôtre, nous laissant simples spectateurs muets d'une sorte de partie de ping pong verbal...

Les seules personnes intelligibles, à mon sens, furent les dames, notamment celle assise au fond à gauche, près de moi, qui au lieu de se faire briller à elle-même, a exposé de manière concise une idée pour enrichir la réflexion, et clairement pour que chacun la comprenne bien.

Finalement, la pause décrétée, je m'en fus, craignant de devoir subir une seconde partie analogue à la première...

Pour conclure, ne voyez pas dans mon message une quelconque attaque, la vie est trop courte pour se fourvoyer dans de futiles querelles. Non, c'est juste un témoignage.

C) Quelques réactions de participants après connaissance du texte de l'animateur

Merci beaucoup pour ces précisions et mises au point, très intéressantes.

Je n'ai assisté qu'une fois à un café Philo car je suis dépendante pour mes déplacements. Sa forme m'a d'abord interrogée mais pas gênée et à la réflexion je m'y retrouve bien : j'anime une activité musicale d'éducation populaire et je retrouve dans votre introduction des questions que je me suis posée, qui m'ont été "envoyées" et auxquelles j'ai trouvé mes formes de réponses, proches des vôtres.

C'est vrai que cela se termine un peu tard pour ceux qui nous attendent chez nous ou qui se lèvent le matin.

Merci infiniment

Cordialement

Jacqueline Alekan

Sans avoir pu être présente à tous les évènements du 20e anniversaire, je tiens à souligner que, participant depuis quelques mois, je suis totalement satisfaite. Peut-être les différentes formules de café-philo sont-elles plus ou moins adaptées à l'attente de chacun. La vôtre me convient plutôt plus que celles que j'ai rencontré jusque là. Pour moi, l'objectif " Transmettre une pensée philosophique de qualité et faire une activité réflexive authentiquement populaire" est atteint. Le dosage apport des philosophes/écoute/expressions personnelles et échanges me satisfait. Sans doute y a-t-il des améliorations à apporter. J'ai été frappée en effet du nombre de participants qui partaient à la pose. Mais quant aux présentations, je n'y vois qu'un rappel bienvenu de la pensée des philosophes. La médiation est parfois nécessaire sur les propos échangés librement et la réflexion est recentrée de manière pertinente. Et je trouve remarquable d'avoir tenu le cap pendant 20 ans !

Amicalement,

Djinn Lefèvre

"C'est cet ensemble qui donne son sens à ce que je fais et me permet de tenir !"

Cette phrase résume le cadre et le sens de ton engagement assidu depuis 20 ans.

Cette assiduité, cet engagement sont un cadeau offert, un acte politique au sens non dévoyé du terme qui fait de toi un citoyen d'envergure, un exemple. Je pèse mes mots.

Ton choix est noble, respectable, gratuit, et personnellement je n'avais pas besoin de ces explications pour en comprendre la cohérence, l'importance.

A travers tes propos, je mesure la distance que tu sais prendre avec la modernité, qui n'est pas du tout à mes yeux un sommet dans le progrès de l'humanité mais une option très hasardeuse, une dérive logique (Jean-Claude Michéa) d'une belle idée libérale, que l'actualité nous invite à réviser, parce qu'elle est certainement une voie sans issue.

Je ne vais pas commenter tes déclarations, dans le seul sens qu'elles m'inspirent, qui serait celui de la surenchère, et je peux t'assurer que pour le malentendant que je suis c'est un crève coeur de ne pouvoir cerner ces échanges au Malpas, parfois laborieux, qui peuvent s'égarer sur des chemins de traverse, mais... c'est le prix que je paierais si j'entendais.

Le chemin que tu offres est incompatible avec le si pratique clic qui nous donne instantanément les réponses consommables immédiatement, certainement pas facteurs d'édification d'une personnalité "accomplie", mais toujours utiles aux producteurs/consommateurs que les institutions s'emploient à produire.

Tocqueville s'est montré très tôt bien visionnaire sur la dérive que présentait le système démocratique, où les gens sont encouragés à croire que la parole de quelqu'un qui ne connait rien à un phénomène a la même valeur que celle de l'érudit rendant compte du résultat d'un travail de longue haleine dans le cadre d'une rigoureuse méthodologie.

Après ces propos, que les gens qui ont besoin de catégories qualifieront de pessimistes, je fais une incursion dans le champ opposé : il est fort possible que tu ne mesures pas l'impact de ton action, et le nombre de personnes auxquelles tu as montré l'utilité de la référence à ces géants, pour nous les nains juchés sur leurs épaules (Bernard de Chartres ? Bon là j'ai cliqué !), et si nos regards ne se portent plus sur un horizon à découvrir, qui par définition ne sera jamais atteint, tu as certainement contribué à ce que des gens fassent de leur vie autre chose que ce qui caractérise la modernité, le renoncement (Alasdair Macintyre), et l'adoption de l'ambition humaine la plus pauvre qui soit.

Moi, je te remercie. Profondément.

Déjà pour m'avoir donné envie de lire Paul Ricoeur entre autres, tu ne t'en doutais pas, comme pour beaucoup d'autres certainement, mais aussi pour ton positionnement et action pour la survie d'un de ces nombreux piliers que nos dirigeants ne voient que comme obstacle à leur seule préoccupation qui est notre surconsommation. Je parle de la transmission, en laquelle Michel Lacroix voit le sens de la vie. Ton cadeau à des inconnus est le plus somptueux qui soit, même s'il ne pèse pas lourd face au choix veule de la servitude volontaire (La Boétie).

Gérard Malavialle

Salut Daniel, Beau contenu riche en argumentation. Je suis globalement très satisfait des séances auxquelles j'ai assistées. Le contenu est très fouillé, très riche, peut-être trop, mais bon faut pas se plaindre de quelqu'un qui tire le niveau vers le haut. C'est probablement une des raisons qui font fuir ou dissuadent certains de revenir. Je me souviens au début où je venais, je n'osais pas intervenir. Je me sentais très léger. J'ai pris de l'assurance et même si ce n'est pas toujours très mûrement réfléchi, je me lance. pavé dans la mare histoire de faire réagir l'ensemble des participants. Je crois que tu as raison. Il faudrait faire l'apéritif à la fin, même si on s'est habitué à ce rythme : 18h30-20h puis apéro ou repas. Poursuite de la discussion de manière plus informelle en off autour d'un verre etc.

Ayant participé à de multiples café philo selon différentes configurations, je me sens mieux dans ce type de café philo. Le seul bémol est le SAV : les commentaires sur le forum, le blog... Mais il est vrai que cela demanderait un travail colossal.

Patrice Padilla

Mon cher Daniel, chère Marie... pleine de grâces,

Merci de votre travail entrepris depuis 20 ans. Merci de votre dévouement et surtout de votre modestie.

Pendant 3 ans, je vous ai suivis assidûment et avec passion.

Mais, avec l'âge (83 ans) et les fatigues dûs aux soins de Médecine Chinoise que je donne chaque jour, en fin de semaine, je n'ai plus la force de me rendre à vos si sympathiques cafés-philos.

Je le regrette, parce que j'y ai beaucoup appris et rencontré des personnes de haut niveau intellectuel et humain.

Vous faites oeuvre d'humaniste et méritez notre reconnaissance.

De mon côté, depuis 6 ans, je dirige un petit groupe café-théo, très humble, très discret.

Nous approfondissons nos connaissances de la Bible et particulièrement de l'Evangile.

Ce partage, apparenté au partage d'Evangile, est devenu un vrai partage de vie, où tout peut se discuter : philosophie, religions, psychologie, médecine, éducation, politique.

Nous y ajoutons méditation, moments de silence, de recueillement et de prières.

Je m'y dévoue beaucoup avec passion.

A votre suite, j'ai appris à me taire, à écouter, à donner la parole et à accueillir en silence et modestie l'avis de chacun.

Félix Bothéra

Bonjour,

J'ai lu avec grand intérêt ton texte. Il ne faudrait pas que tu penses avoir besoin de te justifier sur le choix du fonctionnement de ce café philo; mais nous l'expliquer est très intéressant.

J'ai remarqué quand même sur la durée une évolution: je suis arrivée, je crois en 2000. Ta présentation était plus courte (mais je crois que tu avais encore une activité professionnelle) et à la mi- temps, Marie faisait une relative longue synthèse de la première partie.

Puis progressivement, ta présentation s'est approfondie, la reformulation et les échanges se sont établis après chaque intervention et la synthèse intermédiaire n'a plus eu lieu. Ceci dit, on était déjà dans le schéma que tu décris là.

Cette présentation fouillée est une nourriture pour moi indispensable à la suite. Je ne prends pas de note : j'ai la chance d'avoir assez de mémoire, mais surtout, je sais que je pourrai plus tard reprendre ce texte tranquillement. Je ne crois pas que l'on puisse "philosopher" exclusivement avec sa propre pensée, en s'excluant de ceux qui nous ont précédés. Cette transmission qui est culture, n'empêche pas l'originalité d'une pensée personnelle. Mais sans cette culture, on tourne vite en rond.

Dans un domaine différent, c'est ce que je voulais dire à Suzanne lors de la séance sur la musique, qui s'émerveillait du génie créateur ex nihilo du compositeur. Mais il ne crée pas à partir de rien. Il utilise un langage codé, une grammaire (les règles harmoniques) et il s'appuie sur la musique qui l'a précédé. L'art ne sort pas comme çà d'un chapeau, comme un lapin blanc.

La part personnelle de réflexion est alimentée (parfois inconsciemment) par l'appris, le transmis, l'avalé, le digéré, le ruminé. Après, s'ajoute souvent à la réflexion philosophique, une expression psychologique ramenant à son propre vécu qui, elle, ne relève pas de la transmission culturelle. C'est la part spontanée, qui peut paraître simpliste, mais qui est humaine, de nos interventions parfois peu "intellectuelles". Les divers registres se mélangent.

J'avoue être épatée par le sérieux de ton engagement et j'imagine ce que cela représente au quotidien : point de pause ou de repos, un travail régulier pour la beauté du geste. Même si tu y trouves un enrichissement personnel, c'est très généreux!

Bonne journée,

Françoise

Bonjour Daniel,

Merci pour ce texte. Il va de soi que j'adhère totalement à tes propos sur notre héritage philosophique. Voilà pour le versant "médiation d'éducation". Comme je te l'ai déjà dit, ma requête va en direction de la "médiation de communication".

Dans nos séances au moment du débat, je ressens la prise de parole comme un numéro de funambule hasardeux, avec parfois beaucoup de difficulté pour pouvoir exposer son propos (Ce qui peut me conduire à des formules parfois lapidaires pour me faire comprendre). En cause ici selon moi la procédure aléatoire de prise de parole, source d'une discontinuité très dommageable : je m'inscris à t 0 ; j'ai la parole à t +15 ; depuis, ce que je voulais dire l'a été (tout ou partie) par un autre à t +5/. Mais surtout beaucoup plus grave, entretemps les prises de parole sont parties pêle-mêle dans d'autres directions. Sensation de gâchis décourageant, alors qu'une vraie réflexion collective aurait pu permettre un progrès. Comment parvenir à une authentique "discussion" ? Dépasser une suite de "tirades" qui doivent être à chaque fois reformulées, resituées par l'animateur, en une gymnastique au coup par coup, qui de ce fait s'apparente parfois à du bricolage.

Pour remédier à ce dysfonctionnement, j'ai une proposition simple : l'animateur doit être plus directif, en sériant les thèmes et en veillant au respect de cet ordre. Pourquoi alors, tout simplement, ne pas reprendre le canevas de l'exposé précédant la discussion ? Canevas qui peut être plus ou moins large/serré (3, 5, 7, n... parties, sous-parties ?), autrement dit avec la possibilité de doser cette directivité.

Philippe

Annexe : Déroulé de la manifestation

Mercredi matin 7 mars (9H30 - 11H) : goûter-philo enfants (dernière année de Maternelle école de Maureilhan) à la Médiathèque de Maureilhan : "L'homme est-il un animal comme les autres ?", animé par Chantal Ferrier et Marie

Vendredi 9 mars à partir de 17H : soirée philosophique à la Salle du Temps Libre (Colombiers)

  • 17H Ouverture de la Fête de la Philo
  • Projection d'un diaporama des affiches de Richard Breton qui ont accompagné nos séances de ces dernières années.
  • Témoignages de participants au café philo : "Pourquoi venons-nous et que nous apporte cette activité ?". Discussion et témoignage de l'animateur.
  • 18H Lecture de textes choisis sur le sujet du café philo pour introduire la discussion (lecteurs issus du café philo)
  • 18H30 Café Philo + apéro (sujet en lien avec thématique générale sur l'humain et l'inhumain), animé par Michel Tozzi.
  • 20H30 Auberge espagnole. L'association fournira le vin et les couverts

Samedi 10 mars 9H30 - 12H : Atelier Philo et Atelier Pause-Pensée

  • Atelier Philo : "Jusqu'où pouvons-nous transformer notre condition humaine ? Humanisme et transhumanisme", animé par Daniel Mercier
  • Atelier Pause-pensée sur l'animal, animé par Chantal Ferrier et Marie Pantalacci. Médiathèque de Maureilhan

Samedi 10 mars 18H30 - 20H45 LA CONFERENCE : "Adam et Eve. La condition humaine".

  • Conférence-débat avec François Flahault (philosophe, directeur de recherche au CNRS).
  • Repas des membres du bureau de l'association avec le conférencier

Dimanche après-midi 14H30 -17H

La fête se terminera par des lectures sur le thème de l'humain et de l'inhumain.

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