Tout enseignant de philosophie, animateur d'ateliers philosophiques, formateur ou autre, intéressé par le travail de compétences philosophique rencontre des difficultés qu'il est possible de travailler par ce qu'on pourrait appeler des "exercices intermédiaires". Ces derniers permettent de mettre en oeuvre les différentes compétences philosophiques, de les travailler et d'évaluer les difficultés des élèves. Ce même type d'exercices peut être utilisé dans les plus petites classes comme outil préparatoire aux compétences réflexives.
Dans cette perspective, nous proposons de fournir aux enseignants un certain nombre d'exercices, en commençant avec les deux exercices ci-dessous.
I/ Jugement moral
A) Explication de l'exercice
Nous sommes censés nous aider les uns les autres. C'est à la fois une injonction morale et une garantie pratique de réciprocité. Cette obligation constitue pour bonne part le ciment de toute famille ou groupement social. Pourtant, nous ne respectons pas toujours cette règle de base, d'une part parce qu'elle est impossible à appliquer sans limite, d'autre part parce que nous n'en avons pas toujours les moyens. Cet exercice tente justement d'explorer ces limites.
Plusieurs raisons de ne pas aider quelqu'un sont énoncées. L'élève doit décider pour chacune d'entre elle si elle est valable ou pas, en expliquant la raison de cette décision.
B) Exercice
Répondre par l'affirmative ou par la négative aux diverses questions suivantes et argumenter sa réponse.
Dois-je aider une personne ?
- Qui ne veut pas que je l'aide.
- Qui ne demande pas que je l'aide.
- Qui ne fait pas d'effort par elle-même.
- Que ses proches n'aident pas.
- Qui n'aide pas les autres.
- Que je ne connais pas.
- Lorsque je n'ai pas le temps.
- Qui a l'air inquiétante.
- Qui est riche.
- Qui ne sait pas qu'elle a un problème.
- Que j'aurais du mal à aider.
- Qui pourrait se vexer.
- Qui a peur de moi.
- Qui me fait peur.
- Qui m'a fait du mal.
- Lorsque d'autres pourraient l'aider.
- Lorsque je n'ai pas envie.
- Lorsqu'on me l'a interdit.
II/ Affirmations catégoriques
A) Explication de l'exercice
Notre pensée utilise naturellement de nombreuses affirmations universelles et décrète de la même manière divers impératifs catégoriques, en particulier dans le domaine de l'éthique. Ces schémas généraux nous sont utiles, voire nécessaires, et ne doivent donc pas nous effrayer. En même temps, comme tout principe a priori, comme toute loi, ces affirmations représentent le danger d'une pensée rigide, qui ne connaît plus l'exception ou le cas particulier. Pour cette raison, il est crucial d'apprendre à problématiser afin de se garder de la démesure et utiliser l'universel de manière appropriée.
Diverses propositions affirmatives universelles et injonctions morales relativement banales ou courantes sont présentées sous forme de liste. L'élève doit les examiner et déterminer pourquoi ou dans quelle mesure elles peuvent être refusées. Pour cela il doit produire un argument ou une preuve, ou encore fournir l'exemple d'une exception à cette règle générale et en tirer une conséquence. Ces arguments seront ensuite évalués selon leur degré de pertinence et de force.
B) Exercice
Trouver une objection à l'affirmation suivante :
- L'être humain est bon.
- Les gens sont méchants.
- Il faut se méfier des étrangers.
- Les étrangers ne sont pas comme nous.
- Les filles sont différentes des garçons.
- Les garçons sont plus forts que les filles.
- Les enfants en savent moins que les adultes.
- Il faut travailler à l'école.
- Il faut travailler pour gagner ta vie.
- Ceux qui redoublent sont nuls.
- On est mieux chez soi.
- Il ne faut pas se faire remarquer.
- Il ne faut pas critiquer ses camarades.
- Il faut être gentil.
- Il ne faut pas se moquer.
- Il ne faut pas exagérer.
- Il faut obéir à la loi.
- Il faut respecter tout le monde.