Revue

Pour un droit de philosopher dans l'éducation

Manifeste à signer et à faire signer (voir l'éditorial)

L'école est inscrite, aujourd'hui, dans un vaste mouvement de transformation. Si l'on veut que celui-ci soit démocratique, il faut s'appuyer sur les pratiques qui luttent contre l'exclusion. C'est le cas du développement actuel de pratiques philosophiques innovantes. Celles-ci s'inscrivent dans une demande sociale plus large, qui se traduit par l'émergence de nouvelles pratiques philosophiques dans les cafés, l'animation socio-culturelle, voire les entreprises! Dans le système éducatif, à l'heure où chacun s'interroge sur le désinvestissement inquiétant de nombreux élèves, ces expérimentations suscitent une formidable adhésion de la part de jeunes et d'enseignants. Elles rencontrent un intérêt croissant de la part de responsables administratifs et pédagogiques.

La tradition française cantonne la philosophie à la classe terminale

Or :

  1. Le colloque tenu les 25 et 26 avril 2001 à Paris a permis de vérifier que de nombreuses pratiques de philosophie à l'école primaire, en collège, dans l'enseignement spécialisé, en lycée professionnel existent désormais en France.
  2. Plus largement, le rapport de l'UNESCO de 1999 montre combien ces pratiques se développent et sont encouragées dans le monde entier.
  3. Ces pratiques sont indispensables dans une démocratie moderne : - elles accompagnent l'émergence de sujets qui se construisent dans la maîtrise d'un échange visant à l'élaboration d'une pensée réflexive;
    - elles développent une socialisation finalisée par une préoccupation éthique et une citoyenneté active et critique;
    - elles promeuvent, dans un contexte de crise de sens de l'école, un rapport non dogmatique au savoir et une relation plus coopérative à la parole, au pouvoir et à la loi.
  4. Ces pratiques se fondent : - sur le besoin de chaque individu à cheminer dans sa pensée personnelle, qui se construit par étapes et avec les autres;
    - sur un droit de philosopher que chacun peut revendiquer et que les institutions éducatives se doivent d'assurer.

Prenant acte de ces quatre points, nous demandons :

  1. Le soutien administratif et pédagogique aux expériences existantes.
  2. Un développement de l'information et de la formation initiale et continue des personnels éducatifs sur l'intérêt et le fonctionnement de discussions philosophiques.
  3. La mise en place et le renforcement de partenariats largement ouverts sur ces pratiques.
  4. La multiplication des possibilités d'intervention de professeurs de philosophie et de philosophes volontaires ailleurs qu'en classe terminale.

Nous demandons à cet effet aux ministres des Affaires sociales, de l'Agriculture, de l'Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports, de la Justice et de la Recherche notamment, de créer au plus tôt un groupe de travail national formé de praticiens, formateurs, chercheurs représentatifs de ces pratiques, et largement ouvert à des personnalités et professionnels extérieurs concernés. Celui-ci aurait pour objectif :

  1. De recenser et d'analyser les expériences actuellement menées;
  2. De faire le point sur les pratiques des pays étrangers en la matière;
  3. De proposer des formations, recherches et partenariats susceptibles de les développer;
  4. De suggérer aux ministres concernés une série de mesures favorisant une large introduction de cette dimension philosophique à tous les niveaux de l'enseignement, de la formation et de l'animation.

Pour le collectif : Alain Berestetsky, Jean-Charles Pettier et Michel Tozzi.

Télécharger l'article