Revue

Table ronde : Pourquoi la formation en philosophie avec les enfants compte-t-elle ?

Une table ronde avait été organisée au colloque dans le chantier sur la formation, et on avait demandé à quatre intervenants, tous formateurs, de donner leur point de vue sur l’importance de la formation pour les praticiens de terrain

Intervention 1 : Michel Tozzi, didacticien de l’apprentissage du philosopher

Une formation est nécessaire, car faire philosopher s’apprend, et rend plus légitime. Elle doit être différenciée suivant les catégories de formés. La formation aux habiletés cognitives du philosopher est indispensable. Je développerai six principes pour la formation : l’isomorphisme et la progression ; l’analyse de sa pratique ; l’alternance stage/terrain ; la compréhension et le maniement des processus de pensée du philosopher ; la posture de non-jugement ; et celle de retrait sur le fond.

Une formation nécessaire

Pourquoi la formation en philosophie avec les enfants compte-t-elle ? Parce que l’on ne peut animer des ateliers philo, avec les enfants comme avec des adultes (café philo par exemple), sans formation. Animer un atelier philo avec des enfants s‘apprend, même quand on est professeur de philosophie, car cela exige des compétences spécifiques, d’une part en animation et gestion de groupe, d’autre part en compétences à faire philosopher. Si on ne les possède pas (et qui les possède au départ ?), il faut s’y former…
D’autant que la principale objection faite aux animateurs, notamment des autorités académiques (Inspection de philosophie, universitaires), c’est qu’ils manquent de formation philosophique, aussi bien sur les philosophes que sur la philosophie générale. La plupart n’ont en effet fait de philosophie qu’en classe terminale… et il y a longtemps. Les professeurs de philosophie, qui ont en principe cette formation, n’ont de leur côté aucune formation théorique et pratique à la discussion à visée philosophique, aux ateliers philo, surtout avec les enfants et les adolescents, qui ne sont pas leur auditoire habituel… C’est donc tout le monde qui a besoin de formation.
Cette formation est aussi nécessaire parce que nombre d’animateurs de philosophie avec les enfants, devant ces critiques vigoureuses, ne se sentent pas eux-mêmes légitimes, s’interrogent sur la réelle philosophicité de leur pratique, et ont besoin de formation pour asseoir leur crédibilité aux yeux des institutions, des « philosophes » et à leurs propres yeux…

Une formation pour qui ?

Je distinguerais trois types de stagiaires, pour moduler la formation selon la catégorie :

2.1. Ceux qui ne sont déjà ni animateurs, ni formateurs, ni enseignants, ont à se familiariser avec la prise en main et la gestion d’un groupe, constitué d’enfants ou d’adolescents ; se préparer à la pratique d’animation de ce groupe, sous forme d’échange d’idées ; à une animation donc sous la forme d’une discussion, par un échange qui soit démocratique, donnant largement la parole aux enfants de façon équilibrée ; échange d’idées qui doit avant tout avoir une visée philosophique, objectif qu’il faut bien se clarifier à soi-même…

2.2. Les animateurs qui sont par ailleurs déjà formateurs ont une pratique de l’animation, de la gestion d’un groupe, de la régulation des conflits qui le traversent. C’est moins d’une formation à l’animation dont ils ont besoin, que de repères pour que leur animation devienne philosophique.
Ce qui fait qu’un simple échange devient philosophique (il ne l’est jamais spontanément), c’est une certaine exigence de précision et de rigueur de la pensée dans la dynamique des échanges, qui s’exprime à travers certaines habiletés :

2.1.1. savoir de quoi l’on parle, c’est-à-dire tenter de préciser les mots utilisés, en philosophie on parle de conceptualiser des notions : passer d’une notion abstraite et vague (ex. la vérité, la liberté), à un concept configuré, dont on détermine avec précision les contours, la définition, en le distinguant par exemple de notions proches (ex. « La liberté, c’est la loi que l’on se donne à soi-même ») ;

2.1.2. envisager à propos de ces notions (ex. l’identité) des questions (ex. « Qui suis-je ?), qu’il faut élaborer et déployer sous forme de problèmes (ex. « Comment à la fois rester le même et changer ?), qu’il faut examiner pour tenter de les résoudre : on parle en philosophie de problématisation.

2.1.3. savoir justifier le fondement de ses assertions, en argumentant rationnellement une thèse, une objection, la réponse à une objection ;

2.1.4. savoir interpréter philosophiquement un texte, une image… La formation consistera alors à clarifier pour les stagiaires ces diverses compétences, de façon qu’ils comprennent les exigences intellectuelles du philosopher, afin de les faire mettre en œuvre par les jeunes.

2.3. Quant aux enseignants de philosophie, ils ont une formation académique philosophique, qui consiste en la maîtrise du contenu d’un certain nombre d’auteurs et d’œuvres philosophiques, de la technique de la dissertation et du commentaire de textes, et d’un certain habitus réflexif sur des notions et des problèmes philosophiques.
Mais professeurs de lycée, ils ne connaissent pas les élèves du 1er degré et du collège, ils n’ont pas l’expérience de groupes d’enfants ou d’adolescents avec leurs conflits. Leur formation ne comprend pas l’animation psycho-sociologique d’une réunion, ni l’apprentissage de discussions auxquelles il faut donner une visée philosophique. Ils connaissent peu la posture de retrait sur les contenus d’un « Socrate ignorant », et sont nombreux encore à pratiquer le cours magistral, qui donne peu la parole aux élèves. Ils ne sont pas tous au clair sur les processus intellectuels de pensée, qu’ils n’ont pas forcément explicités, parce que leur formation n’a pas intégré une approche par compétences.
Certes ils reconnaissent immédiatement le « manque de conceptualisation ou de problématisation » dans une copie, mais ne peuvent pas toujours expliquer clairement aux élèves en quoi cela consiste. Beaucoup sont par ailleurs globalement réticents à la philosophie avec les enfants, qu’ils jugent prématurée et peu philosophique. Certains, plus ouverts à cette pratique, hésitent à se lancer.
Ceux qui s’y mettent devront modifier leur représentation d’une philosophie pratique, et l’atelier philo les amènera à déplacer leur posture d’enseignant vers celle d’animateur. C’est à un remaniement de leur identité professionnelle qu’il faudra procéder, changement qui n’est pas évident. C’est à cet accompagnement que la formation devra procéder…

Quelle formation ?

Je pense que la formation doit se construire autour de six principes structurants :

3.1. Le principe d’isomorphisme et la progression des apprentissages

  • La meilleure formation pour nous, c’est celle qui fait vivre aux stagiaires ce qu’ils feront eux-mêmes vivre aux élèves (principe d’isomorphisme). Concrètement, si l’on veut former de futurs animateurs à l‘animation d’une discussion à visée philosophique avec des groupes d’enfants ou d’adolescents, il faut d’abord leur faire vivre eux-mêmes des discussions à visée philosophique, pour leur faire comprendre les tenants et aboutissants de la situation, la logique des acteurs.
    S’il y a des rôles distincts dans le dispositif (ex. président de séance, reformulateur, synthétiseur…), il est important de tenir tour à tour ces rôles, car on ne vit pas de la même façon chacune de ces fonctions, et ils développent des compétences différentes (ex. le président apprend à gérer démocratiquement la prise de parole, le reformulateur apprend à bien écouter et redire ce qui vient d’être dit etc.).
    Certes les stagiaires ne sont pas, comme dans une classe ou une animation périscolaire, en position eux-mêmes d’animateurs, mais cela leur permet d’appréhender de l’intérieur la position du participant (ou de tel ou tel rôle) à une discussion, que l’on oublie dès que l’on est « de l’autre côté », en position d’animateur…
  • La deuxième phase est, un peu physiquement en dehors du cercle de participants, d’observer soi-même la fonction d’animateur de l’extérieur, pour repérer avec recul les « gestes professionnels » de l’animateur, sa « boite à outils » d’animateur de discussions philosophiques (ex. questionner, demander une définition, un argument…).
  • Une troisième phase est d’animer soi-même une discussion entre adultes, pour se mettre à l’épreuve dans un climat serein.
  • Reste alors à expérimenter soi-même sur le terrain l’animation d’une discussion à visée philosophique. L’intérêt d’intervenir d’abord en binôme, c’est que quand l’un anime, l’autre peut l’observer et lui faire un retour. On peut ensuite animer tout seul.
    On remarquera la progression proposée, d’immersion graduelle, de la participation à l’observation à l’animation, en session puis sur le terrain, en binôme puis seul.
    La formation doit aussi être continue – « piqûres de rappel » (ex. session d’approfondissement sur les processus de pensée, session d’analyse des pratiques), car certaines difficultés sont récurrentes, et il en surgit de nouvelles à travailler, selon les publics, les lieux, la taille et la nature des groupes etc.

3.2. La nécessité d’analyser sa pratique
Vivre une situation est formateur, analyser ce vécu l’est tout autant. Car il ne suffit pas de vivre pour comprendre ce que l’on a vécu. Le nez sur le guidon, parfois dans l’émotion, on manque de recul pour comprendre. C’est le détour de l’analyse qui va éclairer les situations, toujours complexes. La posture d’observateur est un des moyens de se distancier, de prendre conscience de certains éléments significatifs, et de pouvoir les renvoyer au groupe. Analyser est un processus d’accompagnement, qui doit suivre toute situation vécue (et d’abord les discussions proposées). Cette analyse consiste à prélever de l’information sur des éléments-clés et à l’interpréter, parfois avec une grille de lecture (ex. le président oublie-t-il certains élèves dans la répartition de la parole ; le reformulateur déforme-t-il les propos ? Y a-t-il eu dans la séance un effort de conceptualisation ?).
Il peut y avoir plusieurs observateurs, spécialisés sur tel ou tel rôle (ex. le synthétiseur), tel ou tel objet (ex. la répartition de la parole dans le groupe), tel ou tel processus de pensée (ex. la problématisation)… Plus les observations sont ciblées et fines, plus la compréhension de la situation s’enrichit.

3.3. Le principe de l’alternance entre formation en stage et travail sur le terrain
Il nous semble formateur d’alterner les sessions de formation et les essais sur le terrain. Les sessions de formation ont pour objectifs de montrer l’intérêt de faire philosopher les enfants, d’expliciter les compétences du philosopher, d’expérimenter des discussions philosophiques et d’en vidéoscoper, d’apprendre à les analyser, de repérer les difficultés auxquelles on est confronté et d’examiner les moyens de les surmonter.
L’intérêt de l’expérimentation sur le terrain est de se confronter aux situations réelles et aux difficultés inévitables du débutant, de tester ce que l’on a appris en stage, et de commencer à capitaliser une expérience.
Le retour en stage permet d’analyser ses essais. La formation étant collective, elle est un lieu de réassurance qui permet de sortir de sa solitude, car les difficultés se recoupent, et on peut mutualiser des idées de pratique pour les surmonter. On y complète aussi sa formation, par de nouvelles animations et analyses.

3.4. La compréhension et le maniement des processus de pensée constitutifs du philosopher
Ce qui est indispensable pour se lancer, c’est la compréhension des habiletés de pensée, des exigences intellectuelles à mettre en œuvre, des compétences qui caractérisent une façon philosophique de penser, que nous nommons le philosopher : conceptualiser, problématiser, argumenter, interpréter… Il faut se les approprier. Car ce sont elles qui garantissent la mise en œuvre d’une discussion à visée philosophique.
Il peut certes être utile de connaître les grands domaines de la philosophie (métaphysique, épistémologie, éthique, politique, esthétique), pour situer dans quel(s) champ(s) philosophique(s) on pose et traite une question. De même les grands courants philosophiques, ce qui les caractérise en propre et les oppose entre eux : par exemple le stoïcisme et l’épicurisme, pour des formes différentes de sagesse ; les théories de la connaissance de Platon, Descartes ou Kant ; les oppositions entre idéalisme (Platon) et matérialisme (Marx), ou entre l’empirisme (Hume) et le rationalisme (Spinoza). Pour les questions d’ordre éthique, il est utile de distinguer l’éthique de la vie bonne (Aristote) ; l’utilitarisme (Bentham et Smith) ; le déontologisme (Kant) ; le minimalisme (Owen) etc.
Il est aussi éclairant d’avoir rencontré quelques grands problèmes philosophiques autour de notions essentielles (la vérité, la liberté, le temps, la violence etc.), et la façon dont les philosophes les ont construits et ont tenté de les résoudre. Ou d’avoir réfléchi sur quelques oppositions permettant de penser : légal/légitime (la loi est légale mais peut parfois paraître illégitime) ; possible/souhaitable (ce peut être techniquement possible mais non moralement souhaitable) ; exemple/preuve ; possible/probable/certain ; universel/singulier ; transcendant/immanent ; virtuel/réel etc.
Mais ce n’est pas une condition sine qua non pour l’animateur débutant, un élément indispensable pour démarrer. C’est souhaitable plus tard, un plus dans l’animation, car cela permet de situer ce que disent les élèves par rapport aux grands références philosophiques, et de leur donner quelques repères philosophiques.

3.5. Le non-jugement de l’animateur/trice
Le jugement critique d’autrui sur nos idées est souvent mal perçu, car nos idées sont intimément liées à notre personne. Le conflit sociocognitif peut prendre alors une tonalité affective : critiquer nos idées apparait comme s’en prendre à notre personne. On essaye bien dans une discussion à visée philosophique d’apprendre à distinguer une personne de ses idées, mais cela demande un effort auquel tout le monde n’est pas prêt, surtout à l’adolescence où toute critique peut apparaître comme une agression personnelle, que ce soit de la part des pairs, car il faut « garder la face », que de l’animateur ou l’enseignant. Face à celui-ci, représentant l’autorité, on remarque des attitudes de révolte, de soumission ou de silence, peu favorables à la liberté de la pensée.
D’où l’intérêt d’une attitude de non-jugement, qui libère le jeune de la pression évaluative, rompant avec l’attente scolaire de l’enseignant qui veut, quand il questionne, une bonne réponse. S’ouvre alors un espace de confiance, « hors menace », où la parole n’est ni dans la conformité au scolairement correct, ni dans le « rentre dedans » pour s’affirmer en s’opposant. L’élève va pouvoir alors s’exprimer sans crainte et dire vraiment ce qu’il pense.

3.6. Une posture de retrait sur le fond de l’animateur/trice
En cohérence avec le point précédent, il est utile pour l’animateur/trice de garder sur le fond de la discussion une attitude de neutralité, car prendre parti sur une idée exprimée influencerait les échanges. Cette posture méthodologique de non-jugement et de retrait (Jouer le « maître ignorant » comme Socrate) n’est pas spontanée pour certains, se situant d’ordinaire dans la classe comme le « sujet supposé savoir ». Elle se travaille, en développant une culture de la question et non de la réponse.
L’animateur ne disant pas son point de vue personnel, il évite l’alignement des élèves sur celui du maître ou son rejet réactif, ouvrant l’espace d’une pensée libérée. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’intervient pas ou peu. Mais ses interventions portent plutôt sur la progression du débat, en recentrant les propos lorsque l’on dérive, en faisant des mini synthèses sur lesquelles rebondir, en ouvrant par des questions un autre aspect de la question non traité jusqu’ici. Et surtout sa vigilance porte sur la mise en œuvre des habiletés cognitives : essaye-t-on de définir les notions, de faire des distinctions conceptuelles, de problématiser la question, de donner des arguments ? etc., processus qui garantissent le développement d’une pensée autonome.

Intervention 2 : Anne Herla, chargée de cours en didactique de la philosophie à l’Université de Liège et coordinatrice de la Fabrique philosophique (ULiège/PhiloCité).

Tenir compte des contextes

Les besoins de formation en philosophie pour enfants sont spécifiques aux contextes d’apprentissage et aux publics concernés. Pour ma part, j’ai eu l’occasion de former trois types de publics très différents : des étudiant·es de Master didactique, futur·es professeur.es de Philosophie et Citoyennneté, qui sortent de cinq ans de philosophie et sont très à l’aise avec la discipline, mais plutôt éloigné·es du public-cible (élèves du secondaire supérieur) ; des étudiant·es de Haute École (futur·es instituteurs·trices) ou des professeurs en réorientation[1] n’ayant pour ainsi dire aucune formation en philosophie (tout au plus quelques cours) et se montrant parfois méfiant·es vis-à-vis de cette matière ; des participant·es au Certificat universitaire en Pratiques Philosophiques (ULiège/PhiloCité), rarement philosophes de formation, mais très motivé·es par les aspects pratiques de la discipline.
En fonction de ces particularités, on portera une attention plus aiguë sur telle ou telle difficulté. Mais il me semble que l’on peut tout de même pointer huit pièges dans lesquels peuvent tomber les novices et que toute formation, quel que soit son public, entend déjouer. Il me suffit d’observer les écueils sur lesquels butent les étudiant·es lors de leur premier stage, avant toute initiation à la philosophie pratique, pour mesurer l’écart entre un néophyte et quelqu’un qui détient au moins quelques clés didactiques… et quelques bonnes heures de pratique à son compteur ! [2]

Huit pièges à déjouer en formation

Voici quelques pièges. La liste n’est pas exhaustive. Un certain nombre de tensions dialectiques apparaissent entre les remédiations possibles : animer relève d’un art subtil de l’équilibre !

2.1. Un premier piège, qui guette plus particulièrement les philosophes de formation, consiste à vouloir préserver toute l’exigence de leur discipline favorite – souvent au nom du droit de tout élève à accéder à la culture – au risque d’accentuer le caractère austère et abstrait de la matière. Habitué·es à une philosophie de haut vol, les étudiant·es ne perçoivent plus la nécessité de l’ancrer dans la réalité concrète des élèves. Il s’agit alors, en formation, de travailler l’ancrage dans des supports communs qui soient concrets, ludiques ou artistiques, mais aussi d’attirer l’attention sur l’importance de se baser sur l’expérience des élèves, de valoriser le plaisir dans l’échange, de soigner le climat affectif[3].

2.2. Un deuxième écueil consiste à tenir le crachoir quatre-vingts pour cent du temps, en mimant le mode ex-cathedra du professeur en amphi. Il faut alors leur apprendre à parler moins et à écouter mieux, travailler leur attention à ce qui surgit, les exercer à problématiser sur le vif : faire avec les humains qu’ils ont en face d’eux, et non avec les idées qu’ils ont en tête. Il existe des exercices d’écoute, de reformulation et de relance très utiles pour faire une réelle place à l’autre [4], et des méthodes basées sur l’analyse de vidéos d’animations pour s’entrainer à saisir le kaïros[5].

2.3. Mais le piège inverse existe aussi : parler trop peu, n’assumer aucune directivité et laisser aller la discussion en tous sens, être trop effacé parce qu’on se sent tout simplement perdu dans le flot de paroles. Une première mesure utile consiste alors à imposer des prises de parole plus courtes. Mais il sera surtout nécessaire d’apprendre à décoder les habiletés de pensée et les positionnements idéologiques présents dans la discussion, à travailler des questions de relance pour creuser et structurer, et à prendre note au tableau pour garder la trace du chemin parcouru. Tout cela peut aider à mettre de l’ordre dans les idées et à guider en douceur le groupe. Ce décryptage est utile même pour les étudiants « philosophes », qui n’ont en réalité pas l’habitude d’utiliser ce cadre d’analyse pour expliciter ce qui est en train de se passer au sein d’une discussion[6].

2.4. Cependant, guider en douceur ne revient pas à conserver à tout moment la position de sachant. C’est sur la forme et non sur le fond qu’il s’agit de tenir les rennes. Cela suppose de passer du « mode radio » au « mode réseau » (place à la réciprocité, l’improvisation, l’accordage affectif[7]) et de transformer son rapport au savoir en s’envisageant comme un co-chercheur dans une communauté de recherche, à égalité avec les autres. Cette posture est bien différente de celle que l’on demande au futur enseignant d’adopter en dehors des temps de discussion philosophique, et il n’est pas toujours simple de jongler avec ces « casquettes » (prof et animateur), en particulier lorsque l’on est instituteur par exemple, et que l’on enseigne différentes disciplines au même public sur une même journée[8].

2.5. Notons que se défaire du rôle de sachant n’implique pas de délaisser l’histoire de la philosophie pour autant ; c’est là un autre risque que l’on court, surtout si l’on n’a peu de formation dans le domaine : négliger les ressources de la tradition comme moteur de la pensée du groupe et de l’animateur·trice. Il peut dès lors être très utile en formation de transmettre des repères simples, clairs et structurants (notions de base, mind map, corolles conceptuelles, fiches thématiques, grands courants, argumentaires, etc.) et de travailler collectivement les plans de discussion en les enrichissant de références éclairantes à des auteurs et autrices[9].

2.6. Ce rapport exigeant à la pensée et à son histoire permet d’éviter un autre piège : celui de laisser dire n’importe quoi (tout se vaut, « il n’y a pas de mauvaise réponse », relativisme), là où il faudrait au contraire se rendre capable d’exiger des arguments et de les peser, de repérer les sophismes, de déceler les erreurs de raisonnement pour aider à les rectifier, mais aussi, sur un plan plus idéologique, d’être en mesure de mettre en question des propos blessants, intolérants, sexistes, racistes, classistes… Bref, d’assumer une certaine responsabilité quant à la validation des arguments qui circulent, sans se dérober.

2.7. La corde est raide alors entre cette nécessité de soupeser la validité des arguments et la tentation parfois de moraliser, qui constitue pourtant un septième piège. Se positionner pour clore le débat, avoir le dernier mot, être normatif, c’est le premier réflexe de survie du professeur qui fait face à des propos qu’il juge inconvenants. Plutôt que de cultiver une posture moralisatrice, il s’agit alors d’apprendre à interroger les évidences plutôt qu’à les assener, à déceler les présupposés, à adopter une posture d’accompagnement et de questionnement, en gardant à l’esprit que nous n’avons pas la mission de « civiliser » les élèves, mais de les faire se poser des questions et découvrir d’autres points de vue, et d’instiller ne fut-ce qu’une once de doute dans leurs certitudes.

2.8. Enfin, proche du piège du « sachant », mais plus axé sur la maitrise des règles et la distribution des responsabilités, existe également le piège de confisquer le pouvoir. La posture que l’on tendra alors à transmettre en formation consiste à partager les rôles (qui sont des micro-pouvoirs), à faire confiance aux élèves, à déléguer progressivement un ensemble de tâches (appelés aussi « métiers ») en veillant à en étayer l’apprentissage, à encourager la coopération entre élèves[10]. Ce partage du pouvoir n’est pas une mince affaire ; il convoque une réflexion profonde sur le rapport professeur-élève et sur l’institution scolaire dans son ensemble, qu’il engage à transformer en profondeur.

Changer de paradigme : un défi

Aucune de ces attitudes n’est tout à fait banale à l’école ; aucune n’est spontanée chez les étudiant·es ; elles sont quasi absentes de la formation initiale, voire contraires à certains principes pédagogiques classiques (maitrise, planification, valorisation de la hiérarchie, tolérance relativiste mêlée de dressage moral, etc.). Former à la pratique philosophique est crucial pour changer de modèle. Mais même si, en tant que formateur·trice, on est convaincu de l’intérêt de ce modèle alternatif, il ne faut pas oublier qu’à l’école nous avons affaire à un public captif qui n’a rien demandé et peut être choqué par la culture du dialogue philosophique, perçue comme allant à l’encontre de ses propres valeurs. Immergés dans les nôtres, nous ne voyons plus que c’est une modalité d’échange très singulière qui peut chambouler les élèves[11]. Loin d’être toujours une discussion gentillette et consensuelle où tout le monde est heureux de participer, la discussion philosophique, quand elle fonctionne à plein régime, peut constituer une véritable mise en crise : en plus d’être un discours d’une complexité affolante, c’est du feu, des tripes, des larmes. C’est donc extrêmement difficile à manier. Raison de plus pour ne pas négliger la formation qui y prépare, sans s’illusionner non plus sur les innombrables défis qu’il y aura à relever, quelle que soit la qualité de la formation reçue.

Intervention 3 : Chiara Pastorini, philosophe praticienne, animatrice et formatrice en philosophie pour enfants

La formation, une nécessité, pas une option

En tant qu’animateurs d’ateliers philosophiques, nous avons une grande responsabilité car nous guidons les enfants dans une exploration de leur pensée, de leurs valeurs et de leur manière de comprendre le monde. En encourageant les enfants à penser par eux-mêmes dès leur plus jeune âge, nous participons à former des citoyens autonomes, ouverts et capables d’engager un dialogue constructif avec les autres. Une formation en philosophie pour enfants n’est donc pas une option, c’est une nécessité.
D’abord pour que l’animateur intègre les « fondamentaux », c’est-à-dire les éléments qui constituent les bases de la pratique :

  • La posture de l’animateur (neutre, bienveillante, sécurisante, pas autoritaire/verticale…).
  • Le cadre (disposition en cercle, règles, espace de liberté, point de repère…).
  • Les objectifs (aider les enfants à penser par eux-mêmes, développer l’empathie, la coopération, la tolérance, intégrer les règles, la confiance en soi…)

Ensuite, se former est nécessaire pour satisfaire une certaine exigence philosophique, pour réussir à travailler avec les enfants des habilités de pensée comme la conceptualisation, la problématisation, l’argumentation etc.
Comprendre ce qu’est une question philosophique, comment la formuler et comment aider les enfants à le faire ne sont pas des compétences innées ni spontanées. Elles demandent un apprentissage et des efforts.
Les enfants posent des questions profondes, parfois déroutantes, et sans formation, on risque de les orienter involontairement vers des réponses préconçues ou de les décourager de réfléchir par eux-mêmes. Une bonne formation nous apprend à accueillir leurs interrogations avec ouverture, à poser des questions qui éveillent leur curiosité, et à les accompagner dans l’art délicat du raisonnement.
Se former, c’est aussi apprendre à créer un espace où chaque enfant se sente entendu et valorisé, quel que soit son point de vue. C’est cultiver l’écoute active, la reformulation, et la capacité de rebondir sur leurs idées sans les juger moralement. Se former à la philosophie pour enfants permet donc de s’appuyer sur la curiosité philosophique innée de ces derniers, tout en leur donnant les outils pour la développer.
Avec Les petites Lumières, le projet d’initiation à la philosophie pour les enfants et les adolescents que j’ai créé en 2014, j’ai conçu une méthode qui combine les discussions à visée philosophique avec des pratiques artistiques.

Pourquoi se former à cette méthode dite « holistique »?

Plutôt que de se limiter à la seule compétence réflexive de l’enfant, la méthode adopte une vision holistique qui considère l’enfant dans sa globalité : corps et esprit, perception et rationalité. Elle place le corps sensoriel et perceptif au centre des processus de pensée, valorisant ainsi son rôle dans le développement réflexif. Le geste créatif du corps devient une véritable source d’exploration philosophique, et les participants en sont les principaux acteurs. Cette approche, qui s’appuie sur des expériences corporelles et sensorielles, enrichit les capacités comme : définir un concept, identifier une problématique, construire un argument, poser une question philosophique, etc. Ces compétences, travaillées lors des discussions philosophiques, trouvent ici un complément essentiel. Tandis que la discussion sollicite principalement la réflexion rationnelle et intellectuelle, les pratiques artistiques ou corporelles mobilisent la personne dans son ensemble, en incluant la dimension sensori-motrice.
Cette approche globale favorise le développement cognitif en stimulant les sens, le mouvement et l’apprentissage par l’expérience.
Grâce à des activités artistiques ou corporelles, l’enfant rencontre des contraintes – celles de la matière, des outils ou de son propre corps – tout en découvrant des potentialités. Il s’interroge, invente des solutions, surmonte des défis et déploie sa créativité. Cette démarche le transforme en acteur de son apprentissage, conjuguant réflexion intellectuelle et exploration sensorielle. En prenant confiance en lui et en s’amusant, il se construit comme un être pensant, motivé par le plaisir d’apprendre.
Les pratiques artistiques offrent également un moyen d’exprimer ses émotions de manière différente, souvent plus accessible. En apprenant à identifier, nommer et partager ses émotions, l’enfant développe une meilleure compréhension de lui-même, et par extension, des autres. Cela renforce des interactions constructives et une coopération harmonieuse avec ses pairs.
De plus, l’approche holistique présente deux avantages spécifiques. Elle permet aux enfants timides, qui hésitent parfois à s’exprimer verbalement, de trouver une autre forme de communication à travers la création. Et elle aide les enfants ayant des difficultés à se concentrer à canaliser leur énergie en s’impliquant physiquement et émotionnellement dans l’activité. Dans ces deux cas, partir de la réalisation créative constitue une porte d’entrée vers la réflexion. En décrivant l’œuvre, puis en répondant à des questions posées par l’animateur, les enfants progressent dans leur capacité à verbaliser et à approfondir leurs pensées.

Intervention 4 : Christophe Point, Maître de conférence, Université Grenoble Alpes.

Introduction

Penser la question de la formation à la philosophie peut s’avérer être une entreprise risquée, surtout si on dirige son attention uniquement sur la question disciplinaire. Pour quelles raisons la philosophie comme discipline, c’est-à-dire en tant qu’ensemble d’éléments culturels identifiant un style littéraire particulier, et bien souvent occidental, aurait-il de la valeur ? Ou pourquoi aurait-il plus de valeur que telle discipline ou tel autre contenu culturel pour les enfants ? On le voit, cette question, prise dans cette perspective, mène vite à la guerre des programmes scolaires. Pour notre part, nous préférons aborder cette question par la voie des savoir-faire et de l’activité même qu’est le fait de philosopher. « Pourquoi former les enfants au « philosopher » ? » nous semble être une meilleure question.

Philosopher : une éducation au dialogue

A cette nouvelle question, notre réponse n’insiste pas sur le développement de la pensée critique, la capacité à éviter les pièges de raisonnement, l’acquisition de concepts pointus, car la liste de tous ces bénéfices serait bien trop longue à faire. De plus, chaque élément de cette liste diviserait les philosophes et les pédagogues entre eux. Philosopher, est-ce vraiment acquérir une pensée d’excellence ? Est-ce véritablement faire preuve d’esprit critique, et dans ce cas de quel esprit critique parle-t-on précisément ? On voit là aussi de nombreux débats venir, comme les nuages annonçant les orages dans les ciels d’été. Non, ma réponse à cette question sera ici plus simple, et elle se fonde sur un sentiment que je sens partagé par tous ceux et celles que je connais et qui travaille dans le domaine de la philosophie avec les enfants. En un mot, il me semble que former les enfants au « philosopher », c’est avant tout leur offrir une éducation au dialogue.
Les philosophes sont des grands bavards, et même quand ils ne disent rien, leurs silences sont significatifs et apportent l’occasion aux commentateurs et commentatrices de noircir de nombreuses pages ou de participer à de nombreux colloques et séminaires. Mais, même au-delà de ce travail d’écriture, qui permet un dialogue entre les auteurs et les époques, cette aisance à dialoguer et cette passion pour ces moments d’échanges oraux caractérisent assez bien, je pense, les philosophes, et particulièrement, ceux et celles qui travaillent avec les enfants. Cela dit, la nature de cette éducation au dialogue peut varier, même au-delà de ses formes pédagogiques (en cercle, en petits groupes, en binôme, en classe entière, etc.). Cette variation peut se lire au moins à partir de trois formes de dialogues historiquement valorisés par la tradition philosophique.
La première est celle de la discussion. C’est le dialogue sérieux des savants et des scientifiques, de tous ceux et celles qui mettent leur rationalité au service d’une tâche précise : explorer la complexité d’un objet, le sujet de la discussion, le « ce-dont-on-parle ». L’argumentation, la problématisation et l’ensemble des habiletés de l’esprit critique ont évidemment toute leur place ici. La parole est alors souvent distribuée, et son usage plus réfléchi, car elle devient l’outil de la pensée collective. Ceux et celles qui affectionnent cette forme de dialogue s’ingénieront à l’apprendre aux enfants, notamment en donnant des rôles, des étapes dans la discussion, ou encore des exercices poursuivant la réflexion sur tel ou tel objet.
La seconde est celle de la conversation. Nous sommes là entre amis, comme au temps des salons des philosophes des Lumières. Le plaisir d’échanger est ici évident, on veut connaître l’opinion de l’autre car on l’estime et on l’apprécie, et tant pis si la conversation va « à sauts et à gambades » d’un objet à l’autre. Ce n’est pas du bavardage, car nous sommes engagés pleinement dans ces échanges, et ce n’est pas non plus de la poésie car on cherche à se faire comprendre le mieux possible. Plaire et instruire sont étroitement liés dans ces échanges de parole où la liberté est reine. Ceux et celles qui chérissent ces dialogues veulent partager cela avec les enfants et leur offrir ces espaces de liberté, « ces oasis de pensées », hors du monde où nous nous écoutons avec chaleur et humanité.
La troisième est celle de la délibération. Dans cette dernière forme de dialogue, nous cherchons à résoudre un problème et à prendre une décision entre pairs. Chacun et chacune est estimé comme un interlocuteur et interlocutrice valable, et sa contribution aux échanges est nécessaire pour enrichir la profondeur et la légitimité de la parole collective. Auréolée de leur importance politique, c’est la citoyenneté et la démocratie qui s’invitent dans le cercle des enfants. On parlera ici comme les adultes, ceux et celles qui gouvernent, ceux et celles qui agissent sur ce qu’il faut faire, en espérant un jour avoir le droit de leur ressembler. La parole de l’enfant édifiera, de débats en conseils d’école, le socle commun d’un vivre-ensemble entre égaux, sous le regard bienveillant ou critique du philosophe. Or, discuter, converser ou délibérer, ces trois formes de dialogue s’apprennent, et c’est justement cela qui compte, notamment en éthique.

Philosopher pour transmettre une éthique de la démocratie

Apprendre ces formes de dialogue compte, car, dans le domaine de l’éducation à l’éthique, un principe d’Archimède fait désormais largement consensus parmi les chercheurs et chercheuses. C’est l’idée que le dialogue est l’un des moyens les plus importants que nous possédons pour résoudre collectivement nos problèmes éthiques quotidien. Ainsi, de mon point de vue, ce ne sont ni l’introspection, ni les lois qui peuvent nous servir d’appui pour éduquer les enfants à l’éthique, mais la capacité à dialoguer, même lorsque nous sommes face à des situations de crise. Si les humains ne se parlent plus pour savoir comment agir dans ces situations problématiques, alors tout espoir d’une éthique commune disparait. Savoir dialoguer ensemble est la première des compétences éthiques.
Et cet enjeu dépasse largement le petit cercle des préoccupations des philosophes. En effet, l’horizon de toute éducation à l’éthique est politique, car celle-ci engage la façon dont les humains vont agir ensemble et sur la base de quels critères ces actions collectives seront jugées souhaitables ou détestables. Si les personnes d’un pays considèrent que tout dialogue entre eux est inutile pour résoudre leurs problèmes éthiques, alors c’est l’idée même de la démocratie qui devient peu à peu inutile, fragile ou absurde. Cette inquiétude fut celle d’un philosophe et pédagogue américain nommé John Dewey. Il passa presque toute sa vie à définir la démocratie, la promouvoir et réfléchir aux moyens de la rendre possible et vivante. Mais, dans l’un de ses derniers écrits, à quatre-vingts ans, vieux et fatigué par une vie entière de lutte, il trouve encore les mots pour exprimer cette idée avec simplicité :

Je suis enclin à croire que le cœur et la garantie ultime de la démocratie résident dans les libres rencontres entre voisins au coin de la rue pour discuter de ce qui se lit dans les journaux non censurés, et dans des réunions entre amis pouvant avoir lieu aux domiciles de chacun pour converser librement les uns avec les autres (Dewey 1939, 227).

C’est pour garder cet idéal démocratique au plus profond de nos cœurs que former les enfants à la philosophie compte pour moi. Apprenons-leur cet art du dialogue, dès le plus jeune âge, pour les convaincre par la pratique qu’ils sont tous et toutes des interlocuteurs valables, précieux et enrichissants les uns pour les autres. Quelle que soit leur origine sociale, ethnique, leur genre ou leur orientation sexuelle, chaque enfant peut ainsi avoir le droit de rêver à une future société plus démocratique par ce moyen. Et en ce début d’année 2025, je crois que je n’ai pas besoin de rappeler à quel point dans le monde des adultes cet idéal démocratique est menacé et ne constitue plus une évidence pour un nombre grandissant de nos gouvernements. Inverser cette tendance est donc, selon moi, la plus noble tâche que les pratiques du dialogue philosophique associées à une philosophie politique de l’éducation peuvent se donner.

Conclusion

Enfin, nous ne pouvons conclure notre propos sans remarquer que la question « Pourquoi se former en philosophie avec les enfants compte ? » peut également se lire dans un autre sens, celui où les enfants seraient des partenaires et non plus des sujets d’une formation en philosophie. Pourquoi un adulte désirant se former en philosophie le ferait-il aidé par des enfants ? Pourquoi ce type d’accompagnement compterait-il ? Une hypothèse serait ici de dire que, peut-être qu’en dialoguant avec les enfants, nous réapprenons nous aussi la philosophie, d’une autre manière qu’en la lisant dans des livres académiques. La philosophie pour enfants serait ainsi pour les adultes une invitation à découvrir une autre philosophie que celle qu’ils ou elles connaissent. Ou, pour le dire dans les mots du philosophe et pédagogue Paulo Freire : « personne n’éduque autrui, personne ne s’éduque seul, les hommes s’éduquent ensemble par l’intermédiaire du monde ».

  • Citton, Y. (2014). Pour une écologie de l’attention, Paris, Seuil.
  • Connac, S. (2009). Apprendre avec les pédagogies coopératives. Démarches et outils pour l’école, Paris, ESF.
  • Delille V., Frieden N., Herla A., Jeanmart G. (2017). « La pensée à l’œuvre dans une discussion philosophique : l’écouter, l’entendre, l’exploiter. Former à l’animation par l’observation minutieuse d’une DVDP filmée » in Paroles de philosophes en herbe : Regards croisés de chercheurs sur une discussion sur la justice en CM2 (dir. Simon, J.P. & Tozzi, M.), Grenoble, ELLUG, coll. « Langues, gestes, paroles ».
  • Dewey J. (1939). Creative Democracy—The Task Before Us. Volume 14. Southern Illinois University Press.
  • Frieden, N . (2012). « Ambiguïtés de la maïeutique. Réflexion sur le cours dialogué », Diotime n° 54, octobre 2012.
  • Gagnon, M. & Yergeau, S. (2016). La pratique du dialogue philosophique au secondaire. Vers une dialogique entre théories et pratiques, Presses Universitaires de Laval.
  • Hawken, J. (2020). La philosophie avec les enfants. Pour une pédagogie sensorielle, Paris, Lambert-Lucas, « Didac-philo ».
  • Herla, A. (2016). « Histoire de la philosophie et pratique philosophique : usages fertiles », Diotime, n°68, avril 2016.
  • Jeanmart, G. (2015). « L’écoute : un exercice de diagnostic », Diotime, n° 65, juillet 2015.
  • Tozzi, M. (2019). « La discussion à visée philosophique », in Perspectives didactiques en philosophie. Éclairages théoriques et historiques, pistes pratiques (Dir. Tozzi), Paris, Lambert-Lucas, « Didac-philo ».
Notes
  1. En Belgique francophone, lors de l’instauration du cours de Philosophie et Citoyenneté dans les écoles officielles en lieu et place d’une heure hebdomadaire de cours de Religion ou de Morale, de nombreux professeurs de ces disciplines ont décidé de se « reconvertir » en professeurs de Philosophie et citoyenneté, souvent contraints par la situation. ↩︎

  2. Notons que le réseau libre catholique en Fédération Wallonie Bruxelles (environ 60% des élèves y sont scolarisés au secondaire) a quant à lui choisi de dispenser l’Education à la philosophie et à la citoyenneté (partageant le même référentiel de compétences que le Cours de Philosophie et citoyenneté) de manière transversale, au sein d’autres matières, par des enseignant·es d’autres disciplines et sans la moindre formation imposée. Comme si, précisément, former à la philosophie pour enfant ne comptait pas. ↩︎

  3. Pour creuser cette question, cf. Hawken, J. (2020). La philosophie avec les enfants. Pour une pédagogie sensorielle, Paris, Lambert-Lucas, « Didac-philo », en particulier p. 96-184. ↩︎

  4. Jeanmart, G. (2015). « L’écoute : un exercice de diagnostic », Diotime, n° 65, juillet 2015. Consulté le 12 avril : https://www.philocite.eu/blog/wpcontent/uploads/2017/11/GJeanmart_Lecoute_Un_exercice_de_diagnostic.pdf ↩︎

  5. Delille V., Frieden N., Herla A., Jeanmart G. (2017). « La pensée à l’œuvre dans une discussion philosophique : l’écouter, l’entendre, l’exploiter. Former à l’animation par l’observation minutieuse d’une DVDP filmée » in Paroles de philosophes en herbe : Regards croisés de chercheurs sur une discussion sur la justice en CM2 (dir. SIMON J.P., TOZZI M.), Grenoble, ELLUG, coll. « Langues, gestes, paroles ». ↩︎

  6. Sur l’analyse des habiletés de pensée, cf. Gagnon, M. & Yergeau, S. (2016). La pratique du dialogue philosophique au secondaire. Vers une dialogique entre théories et pratiques, Presses Universitaires de Laval, p. 114-137. ↩︎

  7. Citton, Y. (2014). Pour une écologie de l’attention, Paris, Seuil, p. 126-132. ↩︎

  8. Sur cette difficulté à « changer de casquette », cf. Frieden, N . (2012). « Ambiguités de la maïeutique. Réflexion sur le cours dialogué », Diotime n° 54, octobre 2012, consulté le 12 avril 2025 : https://diotime.lafabriquephilosophique.be/numeros/054/018/ ↩︎

  9. Herla, A. (2016). « Histoire de la philosophie et pratique philosophique : usages fertiles », Diotime, n°68, avril 2016, consulté le 12 avril 2025 : https://diotime.lafabriquephilosophique.be/numeros/068/021/ ↩︎

  10. Sur ces aspects, je renvoie à tout le travail de Michel Tozzi et Sylvain Connac, en particulier : Tozzi, M. (2019). « La discussion à visée philosophique », in Perspectives didactiques en philosophie. Éclairages théoriques et historiques, pistes pratiques (Dir. Tozzi), Paris, Lambert-Lucas, « Didac-philo », p. 165-180, ainsi que Connac, S. (2009). Apprendre avec les pédagogies coopératives. Démarches et outils pour l’école, Paris, ESF. ↩︎

  11. Compère, A. (2025), « Un cours de philo qui compte : la légitimation de l’enseignement de la philosophie, entre les bienfaits paradoxaux de l’acculturation et de l’émancipation », Diotime, n° 98, octobre 2025. ↩︎

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