Revue

Communication sur « A quelle(s) condition(s) une formation en distanciel peut-elle être formatrice ? »

Une recherche temporellement située, ancrée dans l’expérience difficile du confinement

Le poids du contexte

La période du 1er confinement en France (mars-mai 2020) a provoqué, à cause des modes de diffusion du coronavirus, une crainte des « proximités géographiques » et entraîné des politiques publiques de « distanciation sociale » (gestes-barrières, masque etc.). Or la distance physique engendre la distance sociale : « Les approches de la proximité nous ont appris depuis longtemps que la mise à distance des personnes n’a pas uniquement des effets géographiques ou spatiaux, mais qu’elle conduit à une perte des échanges et des repères ». C’est pourquoi se mettent alors en place des « proximités organisées » : « La proximité organisée n’est pas d’essence géographique mais relationnelle, et correspond à la capacité qu’offre une organisation de faire interagir ses membres ». L’enjeu est alors de savoir si et comment on peut faire société à distance. C’est sur ce fond de contexte sociétal mondial que s’est accélérée pendant cette période l’utilisation croissante des formations en distanciel.

Il faut composer avec ce fait, qui ira croissant, compte tenu de certains avantages de cette technologie, qui permet de former à distance, afin de se positionner sur cette tendance sociétale lourde. Et notamment pédagogiquement, quand on est organisme de formation. Il faut partir de ce contexte pandémique pour comprendre certains enjeux actuels, certaines résistances. Les formations en distanciel ne sont certes pas nouvelles, utilisées depuis longtemps dans des universités (FAD, Mooc .…) et des organismes de formation (CNED par exemple). Mais dans cette période difficile du confinement, dans le contexte conjoncturel du temps suspendu de la pandémie, ce type de formation s'est, comme le télétravail, considérablement accru, avec un effet de seuil et d'entraînement, comme alternative à un présentiel interrompu. Elles ont de fait été imposées aux enseignants pour assurer dans l'enseignement une "continuité pédagogique", et dans nombre d'organismes de formation pour survivre. Beaucoup les ont alors subies et non choisies, et ce sans formation préalable (les formateurs étaient eux-mêmes en apprentissage technique, d’où la gêne d’une « surcharge cognitive »), dans le tâtonnement, les essais et erreurs, très insécurisants, ce qui leur a donné une connotation défavorable, et provoqué des attitudes réactionnelles.

Des courants opposés technophiles et technophobes sur la formation en distanciel

Lorsqu’un nouvel outil technologique surgit dans l’humanité (ici les logiciels de communications de groupe à distance dans la formation, que nous appellerons formation en distanciel), on peut observer deux tendances contradictoires :

  • le courant technophile, séduit par l’irruption d’une nouveauté et par ses nombreuses potentialités qui étendent le pouvoir humain ; il fait fond sur l’« utopie numérique » californienne et l’ « utopie de la pédagogie numérique » (ensemble des procédés technologiques – outils, techniques, supports – utilisés dans le cadre de dispositifs d’apprentissage »).

  • Et le courant technophobe, dérangé de sa « zone de confort », méfiant vis-à vis de cette innovation, qui en pointe les limites, les dangers, voire les dérives.

Le premier est prêt spontanément à adopter, acheter, s’investir dans ce nouvel espace ouvert, sans beaucoup d’esprit critique, tant les avantages lui sautent aux yeux et semblent indiscutables, les réticents étant des « has been ». Le second résiste au changement, demande à voir, freine des quatre fers, ne voit que les inconvénients, et lui donne une portée sociopolitique défavorable, soupçonnant des intérêts cachés, notamment financiers, sécuritaires, et même un enjeu civilisationnel, traitant le premier d’irresponsable et d’anti-humaniste (« Je ne veux pas de cette société-là » !). Il condamne les « dérives du "solutionnisme numérique", cette idéologie consistant à croire qu'internet offre une solution clé en main pour tous nos problèmes » (ML). Ce courant s’appuie sur le sentiment d’une perte (celui du « réel » que constitue le présentiel), d’un deuil à faire dans le distanciel.

Cette problématique binaire sous forme d’alternative, suivant le schéma simpliste : « Pour ou contre le distanciel », ne rend pas le dialogue facile, et il faut se mettre en capacité d’entendre les uns et les autres. Car il est bien difficile, le nez sur le guidon, d’y voir clair entre le bon grain et l’ivraie, le propre de l’innovation technologique étant de bousculer les habitudes, de déplacer les points de vue, de modifier notre emprise sur le monde et autrui, pour le meilleur et pour le pire.

En philosophie par exemple, comparez le technophobe M. Heidegger, pour lequel la technique, dans sa nature et son développement, est un « arraisonnement » de la nature qui témoigne de « l’oubli de l’être », d’où l’appel à un retour aux présocratiques ; et M. Serres, louant les outils du numérique et l’habileté de Petite Poucette !

Il est trop tôt, par manque de recul, pour déterminer dans cette irruption ce qui relève de :

  • la rupture des manières habituelles de faire (ce qui désoriente), et de la nécessité d’un nouvel apprentissage demandant des efforts, qui provoquent des résistances au changement compréhensibles.

  • ce qui va socialement être progressivement intégré, notamment par les digitals natives, en s’appuyant sur les avantages de l’outil, et donnera lieu à d’autres habitudes sociétales (M. Serres) ;

  • et ce qui structurellement, dans la nature de l’outil et de ce qu’induisent ses usages communicationnels et pédagogiques (M. Heidegger), pose véritablement problème pour une formation de qualité.

C’est cette indétermination d’une part de la nature de l’outil, d’autre part de ses usages, qui provoque une controverse animée entre les formateurs eux-mêmes. D’où la nécessité de mener l’enquête, et d’abord auprès des formateurs. Il ne s’agit pas pour nous de trancher pour les uns et contre les autres. Nous pensons personnellement que le distanciel ne remplacera pas le présentiel et ne doit pas le remplacer, mais qu’il y aura de plus en plus de formations hybrides, incluant aussi de l’asynchrone. Il faut donc examiner les argumentaires contradictoires, leur bien fondé, de façon à dégager un certain nombre de conditions auxquelles le distanciel (expression que nous retiendrons pour raccourcir l’expression « formation en distanciel ») peut être pédagogiquement formatif. Nous nous plaçons ici d’un point de vue pédagogique, car il s’agit de formation : il nous faut prendre toute la mesure des changements opérés par le distanciel pour construire une pratique la plus formative possible.

Une méthode de recherche

Pour y voir plus clair sur les représentations et les

pratiques, un questionnaire a été élaboré dans le cadre de l’association SEVE à destination de formateurs, résumé ci-dessous.

« En fonction de votre expérience :

Avez-vous évolué dans votre analyse positive ou négative du distanciel au fur et à mesure de votre pratique (pourquoi et en quoi ?) ?

Quels sont les intérêts du distanciel (distinguer les niveaux d’analyse) ?

Quelles sont ses limites (et à quel niveau) ?

Quelles sont ses dérives (et sur quels plans) ?

En quoi le distanciel peut spécifiquement poser problème dans les différentes formations de SEVE (formation de base, modules d’approfondissement, formations professionnelles envisagées ?)

Que permet le présentiel que ne permet pas le distanciel (entrez dans les détails) ?

Que permet le distanciel que ne permet pas le présentiel (entrez dans les détails) ?

Comment pallier les différents problèmes posés par le distanciel par rapport au présentiel ?

Que faut-il changer ou adapter dans le distanciel quand on veut faire « comme » en présentiel ?

Quelles différences (et ressemblances) entre préparer une formation en présentiel et distanciel ? La mener ? L’évaluer ?

Quels sont les différents outils que vous avez utilisés en distanciel : type de plateforme ou de service visio, fonctionnalités, outils complémentaires, supports, modalités pédagogiques etc. ? Avantages et inconvénients ?

Quelles sont les difficultés spécifiques auxquelles vous avez été confrontés dans une formation en distanciel ? Comment les surmonter ?

Et les stagiaires ? Que pensent-ils du distanciel d’après vos retours ? Quelles sont leurs difficultés ? Qu’est-ce qui peut les aider à les surmonter ?

Que devient le corps dans le distanciel ? Le groupe ? L’espace ? Le temps ?

Faut-il identifier ou non distanciel et virtuel ?

Quelles sont d’après vous les conditions à réunir pour qu’une formation en distanciel soit réellement formatrice ? Du point de vue des formateurs, des stagiaires, de l’association SEVE ? Du point de vue matériel, technique, logistique, humain, pédagogique, didactique etc. ? Du point de vue de chaque module de la formation de base, des modules d’approfondissement, des formations professionnelles ?

Il ne s’agit pas ici d’une recherche universitaire, au sens

d’hypothèses de recherche et de méthodologies quantitatives et/ou qualitatives de validation (ou d’invalidation). Mais plutôt d’une enquête de terrain. On voit ici par exemple, au centre de la controverse, l’insistance d’un comparatif entre présentiel et distanciel, et l’orientation pédagogique du questionnaire. Ce questionnaire est qualitatif, non quantitatif. Il tend à recueillir des représentations et des points de vue tirés de la pratique de cette nouvelle modalité technologique. Il ne vise pas à l’exhaustivité, mais d’une part à faire un état des lieux de la rhétorique qu’il suscite, et d’autre part à procéder à un recensement, à partir des pratiques de formateurs expérimentés, de conditions pédagogiquement formatrices. Il a été rempli par une quinzaine de formateurs (deux heures en moyenne), tous praticiens de cette nouvelle modalité du distanciel, avec de fortes exigences pédagogiques.

Critiques frontales du distanciel

Le distanciel n'est pas idéologiquement neutre. Il relève pour certains d'une orientation politique.… Il y a différents types d’arguments critiques sollicités dans la controverse, de registres différents.

Arguments politiques

Le distanciel relève d’une orientation résolument technophile dans un contexte néo-libéral, présentant l’outil technologique de façon positive sans restriction, comme un moyen susceptible de résoudre des problèmes posés dans la formation. (Exemple : former en même temps des gens qui sont dans des lieux différents). Il n’y a pas en effet, comme l’a montré Mac Luhan, d’outil neutre, mais toujours (re)structurant, modélisant : le distanciel structure ainsi différemment l’espace, le temps, le groupe, le corps, les relations interpersonnelles… Il est symptomatique d’une façon sociétale de traiter la formation d’une façon technique, minorisant le rôle humain, interpersonnel, humaniste de l’acte formatif et de la situation de formation. Et d’une façon plus générale et plus essentielle, le distanciel en dit beaucoup sur la modification sociétale des rapports humains, en les dépersonnalisant par l’abus d’outils techniques (Processus d’aliénation).

Le distanciel « exclut d'emblée ceux qui sont incapables de se servir d'internet (outil participant d'une évolution trop rapide de la société pour certains), ou qui ne possèdent pas d'ordinateur équipé d'une webcam, de smartphone ou de tablette. Bref, numériser la pratique du distanciel renforce les effets de la fracture numérique ». Il y a là un aspect anti démocratique du distanciel.

Arguments économiques et financiers

Les outils en distanciel procurent à leurs inventeurs et diffuseurs, souvent privés, de substantiels revenus sur le marché du numérique. « Si Jitsi est un logiciel libre, Zoom est une société dont le but avéré est le profit ». Ceux-ci cherchent à investir le domaine public pour vendre leur matériel. Il y a donc de gros intérêts en jeu.

C’est par exemple un moyen pour les établissements publics de faire des économies :

  • de personnels, en réduisant le nombre de formateurs, et en normalisant les formations dispensées. Une conférence enregistrée peut par exemple être dupliquée plusieurs fois, sans que la présence du formateur (et souvent sa rémunération) soit requise(s).

  • de lieux de formation, de déplacement, de restauration, d’hébergement ; le distanciel réduit les coûts de la formation pour l’institution, le formateur, les formés. C’est un moyen utile d’amortir un investissement.

D’où le risque de vouloir tout remplacer par du distanciel pour des raisons essentiellement économiques.

Arguments sécuritaires

Le présentiel est relativement sécure (il peut y avoir enregistrement clandestin ou des oreilles à la porte !). Mais le distanciel peut être piégeant : des intrus peuvent s'introduire et saboter la séance (d'où un tri nécessaire par la salle d'attente), des informations sur les personnes peuvent fuiter, des données revendues à des commerciaux (reproche fait notamment à Zoom, très utilisé), ou diffusées par malveillance. Les parents, nécessaires pour la connexion avec de jeunes enfants, peuvent rester et observer la séance, ce qui peut être gênant pour la libre parole des enfants.…

Au colloque international sur les Nouvelles Pratiques Philosophiques, qui s’est tenu en distanciel en novembre 2020, nous avons été envahis par des trolls grossiers que nous avons dû éliminer un à un !

De plus l’utilisation d’un appareil numérique a un coût pour son propriétaire, et des conséquences écologiques : « Selon une étude de Greenpeace, on estime qu'Internet devrait utiliser en 2020 20% de la consommation mondiale en électricité ».

Arguments sanitaires

Il y a les problèmes d'attention quand la formation dure très longtemps ; une fatigue générale (maux de tête, douleurs rachidiennes - mal de dos - liés à des problèmes de posture) et une fatigue numérique : inconfort oculaire et perturbation visuelle, survenant au bout de deux heures d'utilisation de l'appareil numérique (fatigue et sécheresse des yeux). On signale aussi l’insomnie, la fonte des muscles, le sentiment d’isolement, le décrochage, l’anxiété, ou encore l’effet miroir de la visio-conférence qui peut dégrader l’estime de soi.

Arguments logistiques

Les problèmes matériels sont très (trop) nombreux, et parfois dissuasifs (Ex. difficultés de connexion, réseau instable.…). Il faudrait ici distinguer ceux, améliorables, dus à une technologie nouvelle, insuffisamment stabilisée, et ceux qui sont structurels, lié à l’outil lui-même. Mais il y aura toujours des gens qui auront des difficultés à se connecter, à partager des documents etc. (Inégalité d'accès, zones encore « blanches » ; illectronisme, fracture numérique intergénérationnelle).

Arguments pédagogiques

Le plus facile à organiser à distance (et donc la grande tentation, qui peut être considérée comme une dérive pédagogique du point de vue des pédagogies actives) est la conférence : un seul formateur pour un grand nombre d’apprenants, sans avoir à faire du sur-mesure tenant compte des besoins exprimés et de la dynamique d’un groupe, et avec très peu d’interventions des participants, sinon par des questions-réponses. C’est le niveau zéro de la pédagogie active, surtout quand elle n’est pas intégrée dans un panel différencié de méthodes. Cet argument provient d’ailleurs souvent de personnes ignorant les potentialités pédagogiques des plateformes en ligne.

En résumé, il y a de fortes raisons de se méfier du distanciel.

Les spécificités du distanciel, et son différentiel d'avec le présentiel

Si on doit poser la question des limites de l'outil, il faut aussi s'interroger sur les possibilités nouvelles qu'il ouvre. Deux exemples : l'inscription de son prénom dans le tchat (fonction "converser") détermine un ordre de passage objectif, peu contestable, et on voit dans combien de tours de parole on pourra intervenir, ce qui diminue le stress d'avoir été oublié. Ou le fait de fermer soi-même son micro quand on a parlé pour laisser la parole aux autres, aide à mieux écouter, sans rappel à l'ordre de l'animateur.…

Quelques avantages du distanciel

  • Économie du temps de déplacement et de l’argent de l’hébergement pour les stagiaires.

  • Economie du temps de déplacement pour les formateurs, moins fatigués.

  • Economie d’argent pour l’institution dispensant la formation.

  • Les stagiaires peuvent provenir de toute la France et même de l’étranger : des groupes sont plus faciles à constituer sans la limite de la proximité géographique.

  • Espace de travail et d’expression privilégié pour certaines personnalités dont la puissance est amoindrie par la présence physique du groupe.

  • Réintégration des mondes numériques – inadéquatement nommés virtuels --, dans notre réel entendu comme « ce qui existe » et dont le numérique est un « mode » spécifique. Réintégration qui permet d’être pleinement acteur de ce qui se passe là et d’étendre cette puissance de l’agir à différents champs de nos expériences.

  • Education à la technique par son utilisation même – comme chemin vers l’objectif premier de la formation (par exemple à l’animation philo). Cette voie permet de comprendre, en les vivant et en les réfléchissant, les enjeux – sécuritaires, mais aussi démocratiques – de ce pharmakon (Stiegler).

L’étude du différentiel du distanciel par rapport au présentiel a un avantage : il révèle beaucoup d’éléments constitutifs du présentiel, qui passent inaperçus lorsque l’on est immergé en situation présentielle, mais qui apparaissent dès que l’on analyse et compare avec le distanciel. Inversement les caractéristiques du distanciel sont mises en évidence assez spontanément lorsqu’on le compare à la situation habituelle du présentiel.

Se posent alors dans cette comparaison un certain nombre de

questions assez clivantes : sur le rapport à la technique, à la relation et l’interrelation, la groupalité, l’émotion, l’intérêt des informalités, la temporalité, la spatialité, la corporéité, la sensorialité,

Ces questions sont au cœur du 1er rapport que j’ai rendu, que l’on trouve longuement développées sur mon padlet.

Peut-être faut-il abandonner la pensée binaire du meilleur et du pire, et penser en termes de « mondes ». Dans quel monde sommes-nous avec le présentiel et le distanciel ? Comment y faisons-nous monde, groupe, formation ? Quelles sont les possibilités, les potentialités de l’un et de l’autre ?

Car avec le distanciel, nous sommes dans un autre « réel », un autre monde. Il nous fait accéder, faire l’expérience et permet de théoriser une autre façon d’« être-au-monde » : celle analogue, sans être identique, à celui de quelqu’un qui ne sent pas, ne touche pas, ne goûte pas, et parfois qui est aveugle ou muet. On peut y voir certes un appauvrissement regrettable, mais aussi une opportunité à saisir. Un roman est la quasi-expérience, comme dit Ricoeur, d’une autre vie, un « réel fictionnel », non sans images ou émotions : qui regretterait l’existence des romans, en disant que ce n’est pas du « vrai réel » ? Il nous prive certes en lisant du réel quotidien, mais nous ouvre un autre monde. Et ce par l’« outil » de l’écriture et l’ouverture à l’imaginaire.

On peut vivre le distanciel comme un réel déficitaire, en avoir une lecture défectologique, à cause de ce qu’il a « en moins » (le corps, la « présence » …), et se contenter d'un mimétisme en prenant le présentiel pour idéal (La problématique devenant : comment faire du distanciel comme du présentiel avec le moins de déperdition possible ?).

On peut aussi l'envisager comme un autre réel, avec ses spécificités propres, qui ouvre aussi à d’autres mondes… Et même des choses en plus : la réduction de l’empreinte écologique par économie de tous les déplacements ; le maintien de la communication quand elle est devenue impossible, et la satisfaction de ne pas se sentir abandonné ; la possibilité de « sortir de chez soi » et de son isolement tout en restant chez soi ; la quasi-magie pour un œil neuf de réunir en même temps des gens qui sont dans des lieux différents. L’outil rend ainsi possible ce qui est impossible pour notre corps, l’ubiquité : le formateur est dans plusieurs endroits à la fois.

De même on peut avoir une lecture déficitaire du présentiel : il engendre de la fatigue et parfois du stress s’il faut se déplacer, avec du temps perdu en voyage, des frais éventuels de restauration et d’hébergement, une assignation temporelle car il est synchrone etc.

Et si l’on cessait de penser de cette façon évaluative binaire ? Si l’on essayait de combiner les avantages de chacun, par exemple en pensant formation hybride, avec à la fois du présentiel et du distanciel, du synchrone et de l’asynchrone etc. ?

Conclusion

Dans le second rapport, je réponds à la question :

A quelle(s) condition(s) une formation en distanciel peut-elle être formatrice ?

Il est temps de penser à élaborer une didactique du distanciel pédagogique, prenant en compte sa spécificité communicationnelle et ses qualités fonctionnelles. Et de la spécifier autour du distanciel philosophique, tel que vécu dans un atelier philo ou un café philo ? Une des questions centrales de ce point de vue consiste à se demander si la modification de la structure communicationnelle opérée par le distanciel a des conséquences sur le contenu des échanges, la qualité de la réflexion philosophique commune… Et à réfléchir par exemple à la façon dont un échange réflexif se construit en distanciel ?

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