Dossier coordonné par Noëlle Delbrassine, doctorante à l'Université de Liège sur l'histoire de la philosophie en philosophie avec les enfants (voir Diotime n° 85)
Problématiser, argumenter, conceptualiser, éveiller l'esprit critique et la conscience citoyenne. Voilà ce que la philosophie pour enfants et adolescent.e.s se donne généralement pour objectifs. Mais où situer l'Histoire de la philosophie ? Que devient-elle au beau milieu de ces multiples habiletés de pensée (pour reprendre les termes de Matthew Lipman) ? L'actualité, la littérature jeunesse et les productions de la culture populaire (dessins animés, chansons, programmes télévisés, jeux de société et jeux vidéo) sont autant de supports divertissants et inépuisables pour la réflexion philosophique avec le jeune public. Mais ose-ton encore prononcer les noms de Platon, Rousseau, Kant, Hegel ou Nietzsche ? N'aborde-t-on jamais leurs textes ? Parle-t-on encore de stoïcisme, d'épicurisme ou d'idéalisme en classe ? La plupart du temps, il faut bien reconnaître que ces références découragent ou intimident - tant les jeunes que les adultes. Et, finalement, pourquoi "s'encombrer" de l'Histoire de la philosophie avec un public aussi jeune ?
Certains, pourtant, s'y essaient. Le Service de Didactique du département de philosophie de l'Université de Liège (Belgique) a souhaité consacrer deux journées à ces questions : les mercredi 4 et jeudi 5 mars 2020 ont été l'occasion d'une recherche collective, au croisement entre la théorie et la pratique. Dans une atmosphère conviviale et stimulante, cinq interventions se sont succédé, chacune accompagnée d'une forme de mise en pratique et d'un temps de réflexion collective. Instituteurs et institutrices primaires, professeur.e.s de l'enseignement secondaire et supérieur, animateurs et animatrices philo, chercheurs et chercheuses, étudiant.e.s, ou tout simplement passionné.e.s de philosophie se sont réunis à l'ULiège pour échanger, réfléchir, critiquer et tester de nouvelles manières d'aborder l'Histoire de la philosophie lorsque l'on destine celle-ci au jeune public.
Dans le dossier qui suit, un compte-rendu de chaque intervention vous est partagé - les temps de pratique, plus difficiles à "faire revivre" par le papier et l'écran, n'y seront hélas qu'effleurés. Des pratiques-philo à la ludo-pédagogie, en passant par Montaigne, Rousseau, Kojève, les mythes de Platon ou la philosophie-jeunesse : ces références et ancrages philosophiques variés ont contribué à la richesse de ces deux journées dont nous souhaitons maintenant vous ouvrir les coulisses.