Comment envisager une progression relative au raffinement de la pensée ?
La pertinence de la conception "spiralaire" de l'apprentissage de Bruner a été mis en évidence par la contribution de S. Queval (Diotime n° 46, 2010), qui nous semble effectivement pointer du doigt de nombreux aspects essentiels de la progressivité de l'apprentissage du philosopher.
Dans cet article, nous voudrions proposer des éléments visant à approfondir cette approche, en présentant quelques notions et arguments qui nous semblent en accord avec la métaphore de la spirale, mais, de plus, mettent en lumière certaines conditions sans lesquelles la pratique de l'enseignement du philosopher ne nous semblent pas compatible avec la possibilité d'une progression de la pensée.
Pour réfléchir à la question de la progressivité de l'apprentissage du philosopher, nous avons décidé de prendre appui sur un corpus que nous connaissons bien : les Essais de Montaigne. Pourquoi les Essais ? Précisément parce que ces essais nous donnent à voir le cheminement d'une pensée qui philosophe en acte. Ils sont donc susceptibles de nous renseigner sur les conditions de possibilité d'une progressivité de la pensée.
Que nous apprennent donc les Essais de Montaigne quant aux conditions d'une progressivité de l'apprentissage du philosopher ?
La régularité de l'exercice
Le premier point sur lequel les Essais nous permettent d'insister est celui de l'importance accordée à l'exercice : "Je voudrois (...) qu'on nous apprinst à manier un cheval, ou un luth, ou la voix, sans nous y exercer, comme ceux icy nous veulent apprendre à bien juger et à bien parler, sans nous exercer ny à parler, ny à juger" (Montaigne, 1969, p. 200). Autrement dit, c'est seulement à travers la pratique régulière de l'exercice que le progrès est envisageable en matière d'apprentissage. Dire que l'apprentissage du philosopher doit être "spiralaire" n'explique donc pas seulement l'intérêt d'aborder de manière récurrente les mêmes thèmes, mais aussi la nécessité irréductible de pratiquer régulièrement le même type d'exercice à savoir, philosopher.
Nous pouvons convoquer ici le principe aristotélicien de l'hexis (Aristote, 1967), principe selon lequel seul l'exercice régulier et soutenu nous permet de maîtriser et de faire nôtre ce qui de prime abord nous était étranger. L'exemple de la forge est à ce titre un paradigme révélateur. De même que c'est en forgeant qu'on devient forgeron, c'est en philosophant qu'on devient philosophe. Mais de même que ce n'est pas en forgeant une fois par mois que l'on devient forgeron, ce n'est pas non plus en faisant exceptionnellement philosopher ses élèves que l'on peut prétendre former des esprits critiques. L'expérience casuelle ne saurait être constructive.
L'importance de l'exercice dans les processus d'apprentissage a également été exploitée par les travaux de Dewey, l'un des principaux pédagogues de l'éducation nouvelle, dans son fameux crédo pédagogique : "learning by doing". Principe repris par la plupart des pédagogies dites "actives", puisque leur point de vue considère que c'est l'activité qui permet à l'enfant de se constituer et d'intégrer des savoirs : "le savoir coupé de l'action réfléchie est un savoir mort" (Dewey, 1967, p. 186).
À ce titre, force est de remarquer que le principe de mimésis (Aristote, 1990) ne suffit pas à garantir la progression de la pensée des élèves. Sans quoi sensiblement tous les élèves de classe terminale ayant bénéficié de cours de philosophie seraient philosophes ! L'argument qui veut que l'enseignant, par la seule monstration du déploiement philosophique de sa propre pensée lors des cours magistraux, parvient à former des philosophes, ne nous semble pas recevable. Il ne suffit pas d'entendre philosopher pour apprendre à philosopher, il faut encore et surtout s'atteler à la tâche et philosopher soi-même.
Notons qu'il s'agit d'ailleurs là de l'un des reproches fondamentaux que Socrate adresse aux sophistes. Le philosophe veut dénoncer l'imposture des sophistes qui prétendent être des maîtres de philosophie, alors qu'à aucun moment ils ne font philosopher leurs disciples. Ce qui explique pourquoi lorsque Phèdre lui confie son envie d'apprendre par coeur le texte de Lysias, Socrate lui propose à la place d'interroger ensemble le texte, entamant ainsi avec lui une réelle démarche de réflexion philosophique (Platon, 1989). La critique de l'écriture qui l'associe à la notion de pharmakon, parce que faisant acte d'autorité, elle peut devenir un frein à la réflexion (ibid.), contient en germe celle du cours de philosophie lui-même. Rien ne garantit les bienfaits du cours de philosophie, si ce n'est la mise en exercice des élèves.
Certes, l'imitation ne devient pas un principe pédagogiquement nul pour autant. L'enseignant véhicule bien un modèle qui d'une certaine manière sert d'exemple et de repère pour les élèves1. Un pouvoir formateur de l'exemplarité du maître qui n'a sans doute pas échappé à Socrate, ni à Montaigne, puisque ceux-ci donnent à voir des pensées qui se construisent en acte et non des philosophies déjà constituées en système : ils nous montrent comment philosopher. Ainsi, le principe de mimésis nous semble certes nécessaire à la mise en place d'une progressivité dans l'apprentissage du philosopher, mais pas suffisant pour autant. Il doit se voir compléter par celui de l'hexis qui aménage un espace à l'exercice régulier des élèves au philosopher.
Cependant, pour que l'exercice puisse être fructueux, il doit présenter un effort de "contextualisation".
La contextualisation
La "contextualisation" est un terme que nous empruntons à Paolo Freire (2006). Rappelons brièvement sa méthode d'alphabétisation à destination d'adultes (Freire, 1973) : celle-ci consistait à organiser un débat entre ces adultes afin de faire émerger un concept, concept dont la composition syllabique était alors exposée et chacun devait ensuite chercher d'autres mots composés à partir de ces différentes syllabes. Le succès de cette méthode qui parvenait à apprendre à lire à des adultes en quelques mois, a été attribué à cette première phase de l'apprentissage : le débat. Car ce dernier permettait aux adultes d'inscrire l'apprentissage de la lecture dans une perspective existentielle propre à chacun, et d'investir derrière chaque concept, neutre en apparence, un sens et une signification personnels : "Ces hommes particuliers et concrets se découvrent eux-mêmes, à la faveur de la discussion, comme artisans de culture" (Wefford, préface de P. Freire, 1973, p. 13). Ainsi, la "contextualisation" désigne précisément cet effort produit par l'enseignant de prendre l'apprenant et ses centres d'intérêt comme point de départ, et de ne construire qu'à partir de là un cheminement avec lui vers d'autres savoirs.
Or, c'est précisément ce que nous donnent à voir les Essais : chaque essai n'est motivé que par la curiosité de Montaigne lui-même, inspiré à partir de faits qui peuvent sembler anodins, et qui le sont d'ailleurs à l'origine, mais qui l'interpellent et qu'il désire approfondir parce que tel est son bon vouloir. Là réside la condition du plaisir à philosopher : dans le choix du sujet à investir. D'où la diversité et la richesse des thèmes abordés par Montaigne : l'ivrognerie, les senteurs, la ressemblance entre père et fils, les boiteux, les coches, le dormir...
D'ailleurs, de nombreux enseignants pratiquant la philosophie avec les enfants les laissent libres de proposer les thèmes sur lesquels ils vont travailler. Et de fait, pourquoi les priver du plaisir d'avoir la chance de parler de ce qui les intéresse eux ? L'exigence de contextualisation rappelle que l'apprentissage, pas seulement du philosopher mais en général, est au service de l'émancipation des élèves : c'est donc en fonction d'eux, de leurs préoccupations, de leurs intérêts, de leurs besoins et de leurs aspirations que l'enseignant doit envisager l'enseignement du philosopher et réfléchir aux supports qui sont susceptibles de les interpeller.
Cet effort de contextualisation, d'inscription de l'apprentissage dans ce qui fait sens pour l'apprenant, nous permet de revenir sur les deux derniers modèles proposés par l'Acireph (2010) pour penser la progressivité : l'escalier et le placard. L'escalier présente la progressivité comme "une série d'étapes successives", la première marche devant être la "plus accessible" pour permettre aux élèves d'accéder à la seconde et ainsi de suite vers une complexité croissante. Et l'Acireph de préciser : "encore faut-il pouvoir définir ce qui est le plus accessible pour les élèves". Or, il ne peut en aucun cas s'agir d'une "définition", comme si à tel âge la première marche devait nécessairement être la même pour tous. Il s'agit tout au plus d'un travail de repérage et d'écoute de la part de l'enseignant. Car cette première marche, c'est sans doute aux élèves eux-mêmes de la dessiner. Tout comme les suivantes d'ailleurs, puisque la manière dont va être traité le sujet dépend des enjeux que les élèves vont y projeter. En ce sens, ce sont vraisemblablement les élèves qui construisent l'escalier sous le regard attentif du maître d'oeuvre, qui veille simplement à ce que l'édifice soit solide.
D'où le leurre de la répétition. Quand bien même un même thème serait abordé chaque année depuis la maternelle jusqu'à la classe terminale, il ne devrait jamais être traité de la même manière. Et ce, pas seulement parce que nous changeons et que nous serions amenés à changer d'avis sur un même sujet précis, mais aussi parce que nous avons la possibilité d'investir différemment tous les thèmes qui relèvent de la philosophie. Et il ne s'agit pas seulement là de varier les supports de l'investigation philosophique vers des supports de plus en plus élaborés, mais bien le contenu. Car si l'on reprend le thème de "l'amitié", ce seul mot peut à lui seul conduire à une infinité d'investigations philosophiques pour peu que l'on respecte également la liberté de penser des élèves. En effet, le thème de "l'amitié" peut être traité en lien avec "l'amour" et "le bonheur", mais aussi en lien avec les notions de "différence", de "pardon" etc. Autant de mises en relation avec quantité d'autres notions qui permettent de mettre en lumière chaque fois un aspect différent du même thème, sans pour autant qu'il y ait une obligation quant au contenu de l'investigation du thème de "l'amitié". C'est pourquoi l'image du placard est elle aussi intéressante car on peut envisager une progressivité qui consisterait à ranger chaque fois les mêmes éléments selon un ordre et une logique différente, et ainsi poser ensemble des éléments que l'on n'avait jamais rapprochés, et en distinguer d'autres qui nous semblaient pourtant bien proches les uns des autres.
D'où l'idée qu'il ne peut y avoir un manuel expliquant où doit nécessairement aboutir la réflexion des élèves de telle classe. Précisément, il arrive bien souvent que sous prétexte de faire de la philosophie avec ses élèves, le professeur a déjà tracé à l'avance les distinctions conceptuelles qu'il attend, chacune avec des contenus précis. Et finalement, le pseudo-philosopher se résume à un jeu de devinette : les élèves doivent deviner ce que l'enseignant a préparé, et quelle signification il met derrière chaque terme. Et cette préparation pourra d'ailleurs être réutilisée l'année suivante et donner lieu, à peu de choses près, au même cours.
L'effort de contextualisation nous semble donc non seulement être la condition de l'efficacité du philosopher, mais il permet aussi de comprendre l'inachèvement intrinsèque de la quête philosophique.
L'investigation infinie
Les Essais montrent que l'on n'a jamais fini de philosopher. Non seulement parce qu'il se propose toujours à nous un nouveau sujet, mais aussi parce que même sans cela, l'homme, comme toute chose, étant soumis au changement, l'investigation philosophique l'est aussi. La métaphysique de Montaigne s'inscrit dans une tradition de pensée toute héraclitéenne : de même qu'on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve, on ne produit jamais deux fois la même réflexion. Notre expérience est plus riche, nous avons appris de nouvelles choses, nous découvrons un point de vue auquel nous n'avions pas songé, que ce soit à travers les rencontres, les discussions, mais aussi à travers l'art sous toutes ses formes. De sorte que c'est la nature humaine, à la fois inconstante et évolutive, qui garantit l'inachèvement du philosopher. Cette approche du philosopher répond au portrait du philosophe tel qu'il nous a été dépeint par Platon dans le Banquet : un daimôn toujours à mi-chemin entre la sagesse et l'ignorance (Hadot, 1995). Portrait d'un philosophe qui ne peut que tendre vers la sagesse sans jamais l'atteindre pleinement.
Il nous semble dès lors important de préciser les deux premiers modèles proposés par l'Acireph (Diotime n° 46, 2010), pour penser les différents types de progressivité. En effet, le modèle de la poupée russe permet de penser la progressivité de l'apprentissage du philosopher comme une succession d'obstacles à lever pour parvenir à saisir un objet. Ajoutons cependant, que l'objet ne sera jamais pleinement saisi et qu'à chaque fois qu'un obstacle sera levé, il y en aura toujours un nouveau qui sera posé2. Il y aura donc toujours une poupée plus petite à l'intérieur de celle que l'on vient de découvrir. Une image qui correspond d'ailleurs bien à l'idée d'un raffinement progressif de la pensée et qui permet d'entrevoir autrement celle du "mécano". Car si le "mécano" est censé "construire un objet à partir d'éléments donnés et qu'il faut assembler dans un ordre précis" (Acireph), de fait, les mécanos n'ont jamais réellement fini de construire leurs objets : car plus ils avancent dans la construction de celui-ci, plus ils découvrent de nouveaux éléments susceptibles de remplacer les anciens, de meilleures structures, de meilleurs outils. Ils déconstruisent et reconstruisent sans cesse en vue d'une meilleure performance. De sorte que même ce qui semble relever de la construction mécanique implique bien souvent plus de créativité qu'il n'y paraît, car la créativité y est sans-cesse interpellée.
Où l'on peut voir, à cet égard, que la progression de la pensée n'est pas linéaire. C'est pourquoi nous voudrions dénoncer ici un deuxième leurre, en plus de celui de la répétition, celui d'une possible non-progression de la pensée.
Le leurre de l'idée d'une non-progression de la pensée
On pourrait penser que le risque de ne pas établir un programme définissant étape par étape une progression assurée de la pensée vers un résultat identifiable serait qu'il n'y en ait aucune. C'est cette idée que nous voudrions déloger, car à partir du moment où on essaye de philosopher, la pensée progresse nécessairement, même si cette progression ne prend pas la forme que l'on attendrait. La progression de la pensée qui philosophe ne peut être envisagée de manière linéaire comme les pas d'une marche en avant. Dans son schéma, le modèle de la progressivité doit comprendre l'erreur, l'errance, l'imprécision et la confusion. C'est d'ailleurs ce que révèlent les Essais. La pensée de Montaigne ne suit pas une progression linéaire, ni même structurée. Et pourtant, Montaigne philosophe !
La philosophie se traduit par le genre littéraire de l'essai, ce qui nous semble révélateur de la nature même du philosopher : une pensée qui philosophe n'est jamais qu'une pensée qui essaie de philosopher ou qui s'essaye à philosopher (Conche, 2004). Un essai présente donc nécessairement des pensées "brouillons", des digressions, des contradictions, des propos hors-sujet et d'autres sur lesquels on revient parce qu'après examen, ils ne nous semblent plus pertinents. Et c'est en ce sens que Montaigne rappelle d'emblée que ses écrits sont de "bonne foy" (Montaigne, 1969, p. 35), c'est-à-dire que ce qu'ils nous donnent à voir, c'est la progressivité "simple, naturelle et ordinaire" de la pensée, "sans contantion et artifice", c'est-à-dire sans structure ou organisation qui lui aurait été apposées a posteriori.
L'erreur, voire le non-philosophique, fait partie intégrante de la progressivité de l'apprentissage du philosopher. Des moments qui ne semblent pas relever du philosopher et qui pourtant y conduisent aussi certainement que le fait de prendre conscience de sa propre ignorance fait naître le besoin de connaître et de chercher. Et nous ne faisons que rappeler ici la valeur pédagogique de l'expérience (vécue) de sa propre ignorance, de ses propres limites, lacunes et difficultés. D'où le recours, par Socrate, tantôt à l'elenchos, tantôt à la déclaration d'ignorance, deux ruses pédagogiques qui ouvrent la pensée à la possibilité et au besoin d'une investigation philosophique (Dorion, 2004).
Aussi, nécessairement, dès qu'il y a du philosopher, il y a et y aura toujours de l'erreur et de l'impropre. L'idée d'une progression de la pensée implique une évolution où le moment de l'erreur est dépassé vers un autre moment, qui devient à son tour une erreur et ainsi de suite à l'infini. Dès lors, comment et pourquoi sanctionner par une note un élément vital à la progression de la pensée ? D'autant qu'une note n'indiquerait en rien à l'élève ce qu'il doit faire pour progresser. Une évaluation dite "sommative" risquerait donc fort de décourager ceux dont le raisonnement ne permettrait justement pas de comprendre les enjeux pédagogiques de la note. Cependant, il ne faut pas croire que l'évaluation n'est pas omniprésente dans l'attitude de l'enseignant : lorsqu'il hoche la tête en signe d'approbation, lorsqu'il reprend ou ne reprend pas l'idée de l'un des élèves, lorsqu'il en interpelle un autre en particulier... C'est cette évaluation qu'il faut travailler pour qu'elle devienne explicitement "formative", et donc le moteur d'une progressivité interne à la discussion. Par son geste pédagogique et évaluateur, l'enseignant participe lui aussi pleinement de la progressivité de l'apprentissage qu'il met en place.
Conclusion
Penser la progressivité, notamment selon l'approche "spiralaire" de Bruner et en complément de la présentation critique de S. Queval (Diotime n° 46, 2010), nous a donc conduit à mettre en avant l'importance de la régularité de l'exercice et de la contextualisation dans la mise en place de l'apprentissage du philosopher. Deux éléments qui, d'après nous, assurent en retour une progressivité quasi-illimitée. D'une certaine manière, il s'agit ici de réaffirmer une certaine foi en l'efficacité propre et intrinsèque du philosopher, qui veut que, si l'on bénéficie de la bienveillance d'un maître, alors on ne peut que progresser. Certes ce progrès est inégal et prend des formes inattendues, puisqu'on le retrouve jusque dans l'expérience de la non-progression de sa propre pensée. Non-progression qui ne signe pas toujours l'échec de l'apprentissage, en tout cas pas en philosophie. Tout dépend de ce que l'enseignant amène l'élève à en faire.
Enfin, nous avons bien conscience que le progrès ne se joue pas uniquement sur le raffinement et la complexification de la pensée. Il est plus vaste et porte sur la psyché toute entière : l'élève progresse également dans le sens où il apprend à gérer émotionnellement les conflits qu'il éprouve, et l'attachement qu'il porte à ses propres convictions. L'apprentissage du philosopher propose "un cheminement qui à chaque échange nous rend plus humain" (Auriac-Slusarczyk, 2010). Car dans le philosopher, c'est réellement l'humanité de l'enfant qui est interpellée : on lui demande ce qu'il ferait dans telle ou telle situation, ce qu'il pense de tel personnage, de telle réaction, de telle opinion et pourquoi. Le philosopher lui demande de se projeter vers le monde qu'il va devoir habiter et avec lequel il va composer. Il lui demande d'anticiper la personne qu'il veut devenir. Or, ce travail d'anticipation de soi vers le monde, vers ce que l'on veut devenir est sans doute le lieu privilégié d'une ouverture de la pensée à l'éthique (Jorro, 2009).
(1) C'est d'ailleurs sur ce principe d'efficacité que repose l'analyse du rôle du maitre dans la DVP de P. Usclat (2008).
(2) De même, pour l'image de l'escalier : on peut considérer qu'il y aura toujours une nouvelle marche à construire.