Revue

Présentation d'une pratique d'atelier philo à partir de photos de presse

I. Historique et contexte de mise en oeuvre1

Alors que nous évoquions nos pratiques et nos champs de recherche respectifs avec une collègue directrice d'école enseignante en CM1, la discussion porta sur un projet de lecture de photos de presse associé à un travail d'écriture. À partir d'un choix de photos libres de droits, un apprentissage de lecture d'images visait tout à la fois l'acculturation à la sémantique de l'image, et la rédaction d'écrits d'un genre encore non arrêté, d'ordre onirique, critique. Ces écrits, évoquant la réception et l'interprétation de l'image, pourraient être confrontés avec ceux de spécialistes de la photo, de journalistes en l'occurrence, chose qui ne s'est pas faite encore.

Poursuivant un travail de rédaction de thèse sur la pratique des ateliers philo, "lieux d'initiation au discernement moral", je souhaitais travailler avec des élèves de 9/10 ans pour étudier d'une part leurs performances sur le rapport entre le langage et la pensée, et d'autre part mesurer la pertinence d'aborder l'instruction morale par le biais d'ateliers philosophiques. Je n'intervenais juste à présent qu'avec des élèves plus jeunes (CP-CE1), sans régularité. L'espacement entre les ateliers philo nécessitait de remobiliser les élèves par rapport à la compréhension et à l'univers conceptuel de la question.

J'ai proposé alors à ma collègue d'associer la pratique d'ateliers philo à ce dispositif, afin d'offrir aux élèves un champ de réflexion nouveau ouvrant sur la portée symbolique de photos de presse sélectionnées. Il s'agirait donc, après avoir réalisé une lecture technique où seraient approfondies les notions de plan, cadre, champ, hors champ, sujet, personnage, de point de vue etc., de réfléchir dans un registre philosophique sur la signification de la photographie. Nous souhaitions voir si le rapport à l'image photographique pouvait être progressivement modifié par la pratique de la réflexion philosophique d'un atelier philo. Les élèves resteraient-ils collés à la partie visible de l'image, ou chercheraient-ils à aller au-delà du visible ? Les questions d'ordre technique se suffiraient-elles à elles-mêmes, ou la technique serait-elle évoquée comme le moyen de porter un message signifiant ? La photo se lit-elle comme une série d'évidences, ou génère-t-elle un questionnement autre qu'anecdotique ?

II. Les ateliers philo au service du discernement moral

La philosophie à l'école primaire n'est pas constituée en un programme et n'est pas inscrite dans le curriculum. On peut le regretter, mais c'est aussi une chance pour les enseignants qui veulent sortir des sentiers battus. Elle constitue un domaine d'exploration et d'interrogation du sens des apprentissages, de leur mise en oeuvre, et de manière plus large du sens de l'école. Du fait de sa transversalité, elle peut trouver sa place dans les diverses disciplines ; aussi avons-nous pensé l'inscrire dans le cadre de l'instruction morale et civique.

Au cycle 3, pour ce qui relève de la morale, nous sommes passés d'une logique d'éducation à une logique d'instruction2, puisque la discipline s'intitule désormais instruction civique et morale. D'aucuns pensent qu'il y aurait un paradoxe à articuler philosophie et instruction morale, la première se présentant comme une réflexion sur les pratiques, les savoirs et les représentations, la seconde comme peu discursive, mais affective et comportementale. Comme l'indique François Galichet3, c'est bien par la pratique du philosopher que les croyances s'élaborent, de développent, se confrontent, s'interrogent, se contestent et se perfectionnent. Ne voulant pas nous limiter à une pratique d'inculcation de règles morales, nous nous référons aux travaux de Marie-France Daniel dans le prolongement de Matthew Lipman : la classe, comme communauté de recherche, interroge sous la conduite de l'enseignant les principes moraux pour mieux les appréhender. "L'éducation devient morale lorsqu'elle habilite l'enfant à transcender les règles ponctuelles, à prendre conscience des dilemmes moraux, et à rechercher en sa conscience individuelle les fondements de ses actions"4. Bien que la dimension expérientielle y soit réduite, il serait dommage de réduire l'instruction civique et morale des programmes de 2008 à un catalogue de règles à enseigner aux élèves. Même si ne paraît plus en toutes lettres le "débat réglé" hebdomadaire de trente minutes, pour que les élèves découvrent les principes de la morale, le maître, au nom de la liberté pédagogique, utilisera selon son bon vouloir la discussion à visée philosophique ou l'atelier philo. Puisque les élèves doivent acquérir un comportement responsable et devenir plus autonomes, nous pensons que ces compétences se développeront d'autant mieux par l'exercice de la pensée critique, l'identification de certains concepts clés, le questionnement dans un registre philosophique sur les questions relatives à la liberté, la justice, les droits et les devoirs. Le discernement moral envisagé comme la capacité à choisir, à nommer, à se situer dans un ensemble de règles où le bien pour soi est mis en discussion avec le bien de tous servira de visée et de cadre à la préparation et à la conduite des ateliers philo.

III. L'empreinte de l'égocentrisme sur la relation langage et pensée

1) L'égocentrisme piagétien

Piaget, en étudiant les différents stades du développement de l'intelligence, a mis en évidence l'égocentrisme de l'enfant. Après l'avoir défini nous verrons quels sont ses effets sur le développement du langage et de la pensée, et sur la manière dont le jugement moral vient aux enfants.

L'enfant, avant d'atteindre le stade de la pensée opératoire formelle, va devoir s'affranchir de l'égocentrisme intellectuel, ensemble des attitudes précritiques et préobjectives de la connaissance (sur la nature, les autres et soi). C'est une sorte d'illusion systématique et inconsciente qui se manifeste par la difficulté à changer de système d'interprétation et de perspective. Mode d'aperception spontané, naturel à tout individu et ne requerrant aucune explication préalable, l'égocentrisme constitue une sorte de centration première de la pensée, une innocence de l'esprit, au sens d'une absence de toute relativité intellectuelle et de tout système rationnel de référence. S'ignorant lui-même, l'esprit égocentrique ne parvient pas à la conscience de sa personnalité. On peut mesurer l'égocentrisme intellectuel à l'irréversibilité de la pensée.

2) L'égocentrisme verbal

Piaget rappelle que l'égocentrisme intellectuel conditionne l'égocentrisme verbal puisque les recherches menées sur ce dernier doivent être remplacées par l'analyse du mécanisme opératoire lui-même de l'action et de la pensée, c'est-à-dire du moteur intime du développement intellectuel. Le langage, mode d'expression de la pensée, va être marqué de cette empreinte.

Avant 7/8 ans les élèves, sous l'emprise de l'égocentrisme, ne sont pas maîtres de leur pensée, puisqu'ils ne distinguent pas leur point de vue de celui d'autrui. La pensée non socialisée ne peut permettre un discours où l'enfant prend en compte les propos entendus pour les mettre en relation avec les siens propres, et faire évoluer une représentation. L'enfant prenant pour sien ce qui a été dit par d'autres ne peut assumer d'être auteur de ses paroles et de ses pensées. Il en résulte une juxtaposition d'échanges où chacun parle pour soi-même. Les discussions ne peuvent être que fragmentées, courtes, sans engager vraiment la réflexion sur le plan causal : les idées de cause et de conséquence ne peuvent pragmatiquement être travaillées.

C'est vers 7/8 ans que Piaget situe l'apparition d'un stade logique au cours duquel se généralise le phénomène de la réflexion comprise comme "la tendance à unifier les croyances et les opinions, à les systématiser pour éviter entre elles les contradictions"5. C'est à cet âge qu'il faut situer les stades supérieurs de la conversation proprement dite. Avec le langage socialisé apparaît le besoin de travailler en commun. L'enfant parvient à se faire écouter de son interlocuteur et à agir sur lui, c'est-à-dire à apprendre quelque chose. L'enfant parle donc cette fois du point de vue de son interlocuteur, l'effort d'objectivité est visible. À partir de cet âge on peut parler d'une compréhension réelle entre enfants. C'est à ce moment que l'on peut faire la distinction entre les enfants qui croient dire vrai et ceux qui cherchent à dire vrai.

Au fur et à mesure que les actions se coordonnent entre elles, cette coordination, à la fois individuelle et sociale, se traduit simultanément par la composition réversible des actions qui les transforme en opérations, et par la réciprocité interindividuelle des opérations de chacun, qui constitue la coopération. C'est ce double processus qui décentre l'individu, eu égard à son égocentrisme initial. Du point de vue de la pensée, l'enfant est dans sa période égocentrique, sous la domination de la pensée adulte représentant la vérité indiscutée et indiscutable. Le respect pour la supériorité de l'adulte diminuant, l'interrogation va se muer en discussion. La discussion devient possible du fait de la décentration, la prise en compte effective du point de vue de l'interlocuteur. L'enfant parvient à objectiver, à analyser les propos.

Jusqu'à 11/12 ans subsiste un syncrétisme verbal où des associations de propos vont à l'encontre de la logique par un surcroît de subjectivité. Certes la discussion est possible, la pensée permet aux interlocuteurs de se situer mutuellement, mais les performances langagières sont encore limitées par le syncrétisme verbal (synthèse subjective pour laquelle il manque l'analyse). Ainsi, même en fin d'école primaire, les travaux de Piaget doivent nous inciter à une certaine modestie et clairvoyance quant à la pratique effective de la philosophie.

Il apparaît donc que les capacités langagières des élèves de CM1, bien que relevant du stade du langage socialisé, sont limitées par le syncrétisme verbal où, du fait d'un manque d'analyse, un point de vue ne pourra être suffisamment explicité, la pensée de l'enfant étant soumise à un point de vue englobant qui n'a logiquement pas de lien conclusif apparent.

3) Le jugement moral chez Piaget

Piaget a reconstitué la genèse que les enfants entretiennent avec le rapport à la règle. Ils passent successivement par différents stades où la règle conçue et pensée en dehors d'eux (hétéronome) et transmise par imprégnation, réputée sacrée et cependant mal respectée, va devenir progressivement par la mutualisation, une règle autonome. Ce n'est que vers 10 ans, à la moitié du second stade de la coopération et durant le stade de la codification des règles, que la conscience de la règle passe radicalement de l'hétéronomie à l'autonomie. La règle apparaît comme le résultat d'une libre décision, et comme digne de respect dans la mesure où elle est mutuellement consentie. Ainsi l'enfant accédant à la démocratie se libère de la théocratie et de la gérontocratie. Il ne conçoit plus les règles comme éternelles et comprend leur genèse comme le ferait un adulte.

Mais ce n'est que vers 11/12 ans que Piaget considère que l'on est en présence d'une réalité sociale rationnellement et moralement organisée, à partir du moment où se met en place la coopération et la codification des règles. Ce n'est qu'à ce moment que se conçoit l'universalité de la morale et que l'on prend en compte la générosité dans ses rapports avec ses partenaires. Le respect mutuel, condition nécessaire de l'autonomie, libère les enfants des opinions imposées, au profit de la cohérence interne et du contrôle réciproque (point de vue intellectuel) ; il remplace les normes d'autorité par la réciprocité (point de vue moral). Lors de la phase de codification, l'enfant prend conscience de la raison d'être des lois, la règle devenant pour lui la condition nécessaire d'une vie sociale.

Vers 12/13 ans, le principe de proposition de loi propre à la démocratie est bien intégré, où l'on a le droit d'introduire une nouvelle loi par voie légale. Piaget note que c'est à ce moment que l'enfant peut accéder à la philosophie de l'histoire. En cessant de croire à l'éternité passée des règles et à leur origine adulte, il accède à une nouvelle compréhension de l'histoire qui peut être nouvellement interrogée.

IV. Articulation atelier philo et sémiologie de la photo de presse

1) Pourquoi travailler avec l'image de presse ?

Qu'entendons-nous par photo de presse ? Il s'agit de toute photo mise à disposition de la presse écrite ou télévisée par un auteur, ses ayants droits, ou un agent web. Ce n'est pas nécessairement une photo d'actualité telle que la conçoit le sens commun, c'est-à-dire une photo contemporaine prise à l'occasion d'événements venant juste de se dérouler. La photo peut être ancienne, avoir le statut de photo d'art et/ou d'actualité. L'usage qui sera fait de cette photo libre de droits au moment de sa diffusion pour une période d'un mois, échappe totalement à ses diffuseurs qui ne peuvent réclamer de droits d'auteurs pendant cette période.

Les enfants ne choisissent pas l'actualité du monde contemporain, qu'elle soit proche ou éloignée. Assaillis d'images, leur cerveau ne reste pas passif car il enregistre de manière inopinée celles qui les marquent. Ces images qui proviennent d'écrans télévisuels ou informatiques influent sur leur manière de voir et de penser les événements relatés. Il s'agit d'images animées accompagnées d'un enregistrement sonore. Les images fixes nombreuses aussi, proviennent de documents divers tels que la publicité, la presse enfantine et adulte, la littérature de jeunesse, les manuels d'apprentissage. Toutes sont associées à un écrit plus ou moins long et explicite.

2) Arrêt sur image

Dans une démarche réflexive, à l'opposé de l'immédiateté et de l'éphémère, le pari a été pris d'exercer le regard pendant une séance de trente minutes pour identifier la technique de la construction et de la composition d'une photo de presse. L'observation d'images n'est pas nouvelle si on se souvient des fameux tableaux d'élocution affichés sur les murs de la classe sur des thématiques d'histoire, de sciences par exemple. Toutefois ces panneaux étaient constitués de nombreux éléments figuratifs afin de développer un savoir dans une logique encyclopédique. C'était aussi le moyen d'acculturer les élèves sur des sujets non évoqués dans le milieu familial où la télévision n'avait pas encore sa place. Alors qu'il fallait imaginer le monde à découvrir, aujourd'hui les images parviennent aux enfants souvent avant le lexique. Le temps et l'espace se sont réduits considérablement, ce qui altère la notion d'espace proche ou lointain. Situer les images dans un rapport espace-temps, montrées à l'écran relève de la gageure pour un enfant qui ne dissocie pas forcément les images de synthèse des images réelles, celles qui relèvent d'une fiction (feuilleton) ou de la réalité (documentaire, informations). La photographie, objet rare et fascinant à ses débuts, est devenue tout à fait banale aujourd'hui. Avec le développement de la téléphonie, tout un chacun a constamment un appareil photo à sa disposition. Alors qu'il fallait repousser le moment pour voir le résultat et utiliser les moyens d'acheminement terrestre pour la partager, la visualisation et la communication de la photo sont instantanées. Il faut donc (ré)apprendre à regarder et à penser l'image.

3) Critères de sélection des photos

Tout comme on a connu dans les années 80 un renouveau de la didactique de la lecture, il est nécessaire de repenser l'apprentissage de la lecture d'image. Aussi, tout comme en lecture certains didacticiens ont préconisé d'apprendre à lire avec des textes résistants6, concevant l'apprentissage de la lecture comme un vecteur de développement de la pensée, nous faisons l'hypothèse que la résistance d'une photo sera vecteur non pas d'un apprentissage d'une lecture de surface, mais d'une lecture de profondeur.

Tout lecteur ou téléspectateur ne sait pas ce qu'il va lire ou entendre en ouvrant son journal ou en regardant un écran. La surprise qui prévaut dans cette situation devient un principe directeur dans notre dispositif. Il s'agit aussi de choisir une photo résistante, non facile et plurielle. Une bonne photo n'est pas forcément populaire et soulève des questions. Ce sera le travail du philosophe de traduire les questions diverses en questionnement philosophique. Il va falloir faire un travail en deux temps. Le premier avec le sélectionneur et le second avec l'enseignant en assistant si c'est possible au temps de lecture d'image réalisé en classe.

Du fait que les photos soient choisies par une personne non impliquée directement dans les activités d'enseignement, au-delà de la surprise de leur découverte, une quinzaine de jours avant l'exercice, cela évite les choix réalisés en fonction d'a priori personnels, culturels. Pour ce qui relève de l'atelier philosophique, le sujet étant déroutant parfois ou non explicite, il va falloir comme les élèves passer par une démarche de décryptage où l'identification du sujet n'est pas suffisante en soi. La technique du photographe entre dans la dimension photographique. Elle détermine le regard, la lecture de l'image, l'interprétation et le sens de celle-ci. Autrement dit, la dimension philosophique d'une image ne tient pas seulement à son sujet mais aussi aux moyens qui portent cette image. Aussi est-il préférable de s'informer sur le photographe, son oeuvre, et de le situer dans les courants de la photographie.

Les photos doivent contenir des éléments de la sémiologie de l'image qui fasse progresser les élèves. Les points d'attention pour chacune des photos ont été l'instant décisif (Louis-Marie Préau), la mise en valeur du sujet (Willy Ronis), la mise en scène, vue de l'esprit (Shadi Gadirian), l'accident technique (Denise Colomb).

4) Des photos qui racontent des histoires aux photos qui racontent notre histoire ; ou du singulier à l'universel

==> "Le héron et l'aigrette" (Louis-Marie Préau).

Le projet a été amorcé par la visite d'une exposition de photos animalières où la classe a été prise en charge par M. Gorvan, commissaire de l'exposition, afin d'identifier des critères d'une bonne photo animalière. Les élèves ont été initiés aux techniques de la photo (zoom) et ont pris contact avec le photographe, qui via une vidéo, explique sa démarche et ses techniques d'approche. Plusieurs photos ont retenu l'attention des élèves. Mais ce qui m'a permis d'initier le premier atelier photo fut l'histoire racontée aux élèves concernant les rapports que les animaux peuvent entretenir entre eux par le biais du langage au sujet de leur nourriture et de leur survie. Conduit avec toute la classe le lendemain, après avoir identifié l'objet de la philosophie et le rôle des différents intervenants, nous avons porté notre attention sur la photo de présentation de l'exposition. La scénarisation a été assez rapidement reprise par les élèves. Comment deux animaux se partagent ou non un territoire pour assurer leur survie ouvre le questionnement sur la loi de la nature, puis sur une comparaison entre la loi de la nature et la loi des hommes. Étaient sous-entendues la distinction homme/animal et la régulation des rapports que les uns et les autres ont la possibilité de concevoir et de mettre en oeuvre.

==> La seconde photo était en hommage à Willy Ronis.

La photo, document historique, se réfère aux événements de 1936. Nous sommes dans le champ du politique. Il est bien question de rapports de forces sociales dans le refus des ouvrières de chez Citroën de ce qui peut s'apparenter à de l'exploitation. Qu'est-ce qui est injuste dans cette situation ? Qu'est-ce que la justice sociale ? L'homme est-il un loup pour l'homme ? Quelles limites peut-on imposer aux riches et aux puissants ? Comment dissocier le légitime et le légal ? La loi est-elle juste ? Y a-t-il un ordre social ? Doit-on accepter la place qui est la nôtre ? D'un point de vue philosophique, dans le champ du discernement, il interroge le travail des femmes (leur émancipation), la liberté d'expression, la désobéissance, le pouvoir des idées et de la parole, un système économique avec le rapport de pouvoir employeur/employé régulé par la loi.


C'est le premier atelier où un enfant va tenir le rôle du maître de la parole. Cela a l'avantage pour l'enseignant de se concentrer sur les propos des élèves. Le travail préalable de lecture d'image est visible dans les premiers propos. D'ailleurs il sert d'amorce à l'atelier. Les propos ne peuvent s'ancrer que dans l'aspect technique et contextuel de la photo.

==> La troisième photo est de Shadi Gadirian.

Shadi Gadirian, photographe iranienne mondialement connue, initie une réflexion sur la condition de la femme dans un pays où les artistes doivent jouer avec la censure et l'esprit tatillon des gouvernants. L'humour est la modalité choisie pour mettre en scène des femmes voilées associées à des objets contemporains. Est-ce le même esprit qui porte les deux photos proposées aux élèves ? Peu consensuelles, elles contiennent une dimension esthétique forte en opposition avec une dimension narrative quasiment nulle. Enigmatiques, leur résistance fait fonctionner l'imaginaire et incite les élèves à interroger l'intention du photographe, le contexte et la raison d'être de ces photos. Les objets photographiés (un casque et une grenade), renvoient directement à la thématique de la guerre. La pertinence de la photographe vient du fait que ses photos ont le pouvoir de parler de la guerre sans la montrer.
Dans le registre de la philosophie, et notamment de l'éducation morale, la thématique de la guerre va permettre d'interroger les rapports humains, l'obéissance à la loi d'une nation. Qu'en est-il de la liberté individuelle par rapport à l'obligation nationale ? Dans quelle mesure le contrat social oblige-t-il la perte de liberté individuelle au profit d'une liberté collective ? Que signifie donner sa vie pour son pays ? Au nom de quelles valeurs peut-on accepter de tuer un homme et au nom de quelles valeurs refusera-t-on de le faire ? Où est l'Homme dans la guerre ? Est-ce courageux de se battre ? Est-ce courageux de refuser le combat ? Suivra-t-on la loi de sa propre conscience morale (loi autonome) avant la loi sociale (hétéronome). C'est ainsi que s'est posée la question du courage.

==> La quatrième photo est une scène de rue aux Antilles (Denise Colomb).

Denise Colomb a réalisé deux grands reportages en Martinique, en Guadeloupe et en Haïti, en 1948 et 1958. Elle a photographié en couleur et en noir et blanc. Ces deux reportages constituent l'ensemble thématique le plus important dans le fonds Denise Colomb - plus de 9 000 négatifs -, en dehors de son travail consacré aux portraits d'artistes. Ces deux dates (1948-1958) encadrent symboliquement la grande période d'activité de Denise Colomb, pendant laquelle elle exprime le mieux sa vision humaniste. La photo travaillée avec les élèves a connu un accident technique : la réticulation. Au moment du développement, la température de l'eau mal ajustée provoque une rétractation de la gélatine qui recouvre la pellicule, qui au tirage donne un aspect moucheté à l'ensemble de l'image. L'esthétique de la photo change. Est-ce une photo ratée ? Denise Colomb choisit de l'exposer, la réticulation apportant une dimension esthétique et, par conséquent, réflexive nouvelle. L'histoire de cet accident photographique peut nous amener dans le champ philosophique à interroger la valeur de la vie. Sachant que la science permet d'identifier un handicap avant la naissance, identifions les questions qui se posent à l'équipe médicale et à la famille. L'énumération a permis d'évoquer les différents points de vue des acteurs en présence par des questions de fait et des questions philosophiques sur l'origine de la vie, la nécessité de sa préservation, la distinction entre vie humaine et vie animale.

V. Analyse des enregistrements

Les séances ont été enregistrées pour analyse selon plusieurs points de vue.

Comme le dit Piaget, on constate que l'enfant parvient à se faire écouter de son interlocuteur et à agir sur lui, c'est-à-dire à apprendre quelque chose. L'enfant parle donc cette fois du point de vue de son interlocuteur, l'effort d'objectivité est visible. Effectivement avec les élèves de cette classe de CM1, on peut parler d'une compréhension réelle entre enfants. Du fait que l'on peut s'assurer que les élèves cherchent à dire vrai et non pas croient dire vrai, nous pouvons penser qu'une des conditions nécessaires pour entrer dans la démarche du philosopher est en place.

La prise en compte des points de vue est réelle, même si elle ne se fait pas d'emblée. Plus le dilemme est radical, plus on a de chance d'avoir une pluralité de points de vue. Il faut pourvoir formuler une problématique en peu de mots, qui renvoie à des éléments de réponse variés proches de l'univers encyclopédique des élèves.

- Enseignant : à votre avis qui est le plus courageux ? On est en train de poser un problème qui est extrêmement important. Qui est le plus courageux, celui qui obéit aux ordres, on va dire d'un officier, qui tire et tue les autres, ou celui qui désobéit aux ordres et décide de ne pas tirer ? Qui est le plus courageux ?

- Martin : je trouve quand même que c'est très courageux, c'est très dur d'aller attaquer. On peut être prisonnier et on peut mourir. J'ai vu un reportage à la télé, Calypso ou un truc comme ça [apocalypse] où on voyait des prisonniers qui mourraient de faim. On voyait leur corps, on voyait tous les os qui sortaient. La tête était un peu aplatie. C'était un peu horrible.

- Tom : ils ont eu le courage de la faire. Euh non.

- Enseignant : Tu veux dire que les soldats sont courageux ?

- Tom : oui

- Enseignant : Tout homme qui fait la guerre est courageux ?

- Tom : oui.

- Anaïs : c'est celui qui n'obéit pas parce que s'ils vont à la guerre, ils peuvent se faire tirer dessus, il y en a peut-être de leur camp qui quelquefois quand ils n'obéissent pas et bien on les tue, leurs chefs les tuent.

- Paul : on n'est pas obligé d'être courageux, ça dépend si le pays est grand. Parce que si on se bat contre l'Asie, alors là ça sera contre un pays plus grand et là ça sera plus dur.

On remarque que l'opposition des points de vue n'est pas une fin en soi. Il s'agit de voir ce qui est interrogé au-delà du débat d'opposition. Nous ne sommes pas dans la juxtaposition de propos qui aboutiraient à une réflexion stérile. Le propos de Martin dans sa forme synthétique résume la difficulté de la discussion et la recherche non pas de consensus mais de cohérence pour soi. En ce sens le discernement moral articulé aux ateliers philo peut être pensé comme une quête de vérité pour soi.

- Martin : ils sont courageux, déjà celui qui va à la guerre, il met sa vie en danger. Puis l'autre aussi il la met en danger. Il est courageux parce qu'il sait qu'il peut se faire prendre. Celui qui va tirer, il peut toujours se faire tirer dessus, ou se faire kidnapper ou se faire harceler.

Effectivement, jusqu'à 11/12 ans subsiste un syncrétisme verbal où des associations de propos vont à l'encontre de la logique par un surcroît de subjectivité. Certes la discussion est possible, la pensée permet aux interlocuteurs de se situer mutuellement, mais les performances langagières sont encore limitées par le syncrétisme verbal (synthèse subjective pour laquelle il manque l'analyse). On constate une difficulté à nommer explicitement un concept général, ce qui motive en profondeur un point de vue, ce qui peut faire système. Intuitivement les élèves de CM1 peuvent prendre position, mais l'argument qui fédère leur point de vue peut être défaillant.

- Enseignant : ils contestent la loi ?

- Baptiste : oui.

- Enseignant : c'est pas bien de contester la loi ?

- Baptiste : non.

- Enseignant : tu peux dire pourquoi c'est pas bien de contester la loi.

- Baptiste : par exemple, il y a un président qui dit on va faire d'autres choses. C'est ça faire la grève.

Cela n'empêche pas de manière radicale la discussion philosophique. La vigilance de l'enseignant s'impose et par un étayage, il peut nommer, désigner pour l'élève ce qui fait défaut.

VI. Articulation discussion photographique et discussion philosophique

1) Le philosopher et les atelier philo

Donne-t-on priorité à la photo ou à la philosophie ? Les élèves se sont vite accoutumés au dispositif qui s'amorce par la lecture d'image. Ils ne connaissent pas leur programme, et cette découverte chemin faisant alimente peut-être la motivation pour cette activité. Du côté de la philosophie, il en est de même. Contrairement aux leçons de morale traditionnelles, l'enseignant ne nomme pas le sujet à l'avance (le droit, les devoirs, la justice, la justice sociale, la loi). Il n'est pas nécessaire et il serait même néfaste de nommer les concepts au préalable, les élèves cherchant à se conformer à ce qui pourrait être attendu du maître. C'est en travaillant la question que les élèves repèrent peu à peu les enjeux conceptuels et philosophiques de celle-ci. C'est en relevant les concepts en jeu que l'enseignant peut faire une évaluation de la pertinence de la discussion.

Le champ lexical relevé dans ce passage qui se situe aux deux tiers de la discussion qui dure 25 minutes montre une forte fréquence de termes qui attestent de l'adéquation entre l'objet de la discussion "Est-ce que c'est bien de faire la grève ?", et les concepts que l'on souhaite voir apparaître dans le questionnement philosophique.

- Baptiste : non c'est pas bien qu'elles fassent la grève, parce que au lieu de s'énerver après tout le monde, faudrait qu'elles demandent soit une augmentation soit des heures en moins à leur patron, et s'il accepte pas il faut pas qu'elles fassent la grève quand même, il faut qu'elles aillent en parler avec quelqu'un qui vient ...pour la loi.

- Enseignant : avec quelqu'un qui vient changer la loi ?

- Baptiste acquiesce.

- Enseignant : la dame qui vient parler devant les ouvrières, Mme Colas vous l'a dit, c'est une syndicaliste. Un syndicat, ce sont des gens qui s'organisent dans l'entreprise, pour qu'il y ait plus de justice. Est-ce que c'est bien qu'il y ait des gens qui puissent faire la grève ? Est-ce que c'est bien le droit de grève ?

- Martin : Ça me paraît juste moi.

- Enseignant : pourquoi ?

- Martin : parce que si on ne débat pas on ne va pas avoir. Si on ne débat pas on ne va pas l'avoir

- Enseignant : eh oui ! On ne peut pas obtenir ce que l'on veut.

- Baptiste : pour moi c'est injuste parce qu'il y a des gens qui travaillent autant et ils sont dans la même galère qu'eux et ils continuent de travailler pour autant.

Identifier ce qui fait problème, aller au coeur du problème tient de la collaboration entre la classe qui échange et du maître qui a proposé un dilemme et qui reste vigilant à identifier les thèses en jeu en sachant les formuler, en les ajustant à un niveau de compréhension ad hoc.

- Enseignant : oui, effectivement. C'est la loi du plus fort qui marche dans la nature.

- Elève : si il y avait eu deux oiseaux comme l'aigrette, ça aurait marché...

- Enseignant : ah, peut-être. Imaginons qu'à la place des deux oiseaux, on ait deux enfants. Deux hommes. Comment ça se passerait ?

2) La question du discernement moral

L'enfant de 10 ans est-il capable de jugement moral ? Est-il soumis à une règle hétéronome qu'il considère comme sacrée et immuable, ou bien s'accorde-t-il un droit d'action sur la règle qu'il comprend d'autant mieux qu'il se donne le pouvoir d'agir sur elle ? L'atelier philo à partir de la photo de Willy Ronis, grève dans les usines Citroën nous a permis à travers la question "Est-ce que c'est bien de faire la grève ?", de penser l'évolution de la justice sociale par le biais du changement de la loi et par le débat. Autrement dit, le débat est pensé comme le moyen de réguler les rapports de force et la loi pensée comme non immuable.

- Baptiste : non c'est pas bien qu'elles fassent la grève, parce que au lieu de s'énerver après tout le monde, faudrait qu'elles demandent soit une augmentation soit des heures en moins à leur patron et si il accepte pas il faut pas qu'elles fassent la grève quand même, il faut qu'elles aillent en parler avec quelqu'un qui vient ...pour la loi.

- Emma : moi je dirais plutôt que c'est juste quand vraiment y'a un gros souci et pas un souci qui n'est pas important.

- Enseignant : tu veux dire qu'il y a de bonnes raisons de faire la grève et de moins bonnes raisons de faire la grève.

- Martin : Je vous avais dit tout à l'heure ce que je pense, mais que ce soit un gros problème ou un petit problème, ça ne change rien.

- Enseignant : c'est normal qu'on ait le droit de faire la grève ?

- Martin : oui.

Piaget considère que l'on est en présence d'une réalité sociale rationnellement et moralement organisée, à partir du moment où se met en place la coopération et la codification des règles, autrement dit vers 11/12 ans. Ce n'est qu'à ce moment que se conçoit l'universalité de la morale et de que l'on prend en compte la générosité dans ses rapports avec ses partenaires. Lors de la phase de codification, l'enfant prend conscience de la raison d'être des lois, la règle devenant pour lui la condition nécessaire d'une vie sociale.

Vers 12/13 ans le principe de proposition de loi propre à la démocratie est bien intégré, où l'on a le droit d'introduire une nouvelle loi par voie légale. Piaget note que c'est à ce moment que l'enfant peut accéder à la philosophie de l'histoire. En cessant de croire à l'éternité passée des règles et à leur origine adulte, il accède à une nouvelle compréhension de l'histoire qui peut être nouvellement interrogée.

Nous ne sommes pas suffisamment avancés dans l'étude de nos entretiens qui ne sont pas assez nombreux pour contester ou affirmer ce dernier point. Cependant les différents débats montrent bien la capacité des élèves de CM1 à interroger les règles sociales non pas d'un seul point de vue interne, mais d'un point de vue généralisé, pour tout homme. Les rapports sociaux sont pensés comme complexes. Les enjeux sont identifiés, et même si les élèves ne nomment pas clairement la tension entre bien pour soi et bien pour tous, la prise en compte de l'autre en tant qu'humain ayant des intérêts propres et légitimes est réelle. Autrui résiste à ma liberté d'agir et de penser. Que signifie respecter autrui ? Au nom de quoi dois-je le faire. Dans quel but ? Pour quelles raisons ? Autant de questions qui surgissent de manière confuse à travers les différentes situations proposées. Les élèves ont bien identifié que leurs actes les rappellent à une conscience morale, et que parfois dans un contexte qu'ils parviennent à mettre en scène à la manière d'un photographe, ils sont confrontés à un dilemme moral. L'intérêt de ce travail réside dans le fait qu'ils élaborent eux-mêmes la situation qui permet d'illustrer la compréhension qu'ils se font du problème.

- Julien : je trouve que c'est bien de rendre hommage aux soldats, parce que la guerre c'est pas toujours simple puis ... Puis il y a des gens qui vont y aller et qui meurent au début. Ils vont pas connaître la guerre.

- Martin : je ne sais pas trop ce que c'est que de tuer quelqu'un, parce qu'on ne l'a jamais fait et j'espère qu'on ne le fera pas. En fait il y a des gens qui sont morts et d'autres qui sont vivants. C'est pas très... C'est comme si nous on tuait une vie, on tuait des gens, je veux dire, c'est comme si on tuait une personne un être vivant.

- Lucas : imaginons un soldat français qui a un frère avec une petite copine qui habite en Russie, il veut habiter chez elle. A la guerre il peut se retrouver face à son père ou son frère. On pourrait tuer quelqu'un de sa famille et voila.

Les photos partent du réel, elles parlent d'une réalité qui peut être reliée à celle des élèves de toute la classe. Elles racontent des histoires, même lorsqu'elles n'ont pas de dimension narrative (Shadi Gadirian). Même si dans une logique d'étude sémiologique, l'enseignant limite les élèves à ce que l'on voit et non pas à "ce qu'on dirait", il n'en demeure pas moins que rapidement une dimension narrative se met en place car les photos, comme les contes, sont des mises en scène des rapports et des sentiments humains.

- Enseignant : qu'est-ce que M. Gorvan a pu vous dire par rapport à cette photo ?

- Elève : que les oiseaux se parlaient.

- Enseignant : que les oiseaux se parlaient. Oui, qu'est-ce qu'il a dit d'autre ? Ils se parlaient à propos de quoi ?

- Elève : Ils pêchaient des poissons.

De ces petites histoires, singulières, on arrive aux grandes histoires, aux grandes questions de l'humanité. Du singulier à l'universel. Exercer le discernement moral. Chercher à savoir où est le bien commun. A partir de quelle idée de l'homme va-t-on pouvoir penser les rapports humains.

- Baptiste : Et puis aussi avant dans les villages on n'avait pas le droit que les petites filles aillent à l'école, parce qu'en fait on leur disait qu'elles n'étaient pas digne d'apprendre et puis donc voila.

- Enseignant : j'en choisis un parmi vous. Dis-moi pourquoi c'est pas bien la loi du plus fort ?

- Elève : on peut avoir mal.

- Elève : faut pas battre les plus petits.

- Enseignant : pourquoi, il ne faut pas les battre ?

- Elève : parce qu'ils sont plus petits que nous et on peut faire plus mal qu'on a voulu faire.

- Elève : (inaudible)

- Enseignant : tu peux me redire un peu tout ça pour qu'on entende.

- Elève : on n'aimerait pas qu'un plus grand nous fasse ce qu'on fait au plus petit.

Eviter d'être moralisateur tout en offrant des pistes. Permettre à l'enfant de trouver progressivement son chemin, ses repères. Ne pas concevoir le discernement moral dans une logique applicationniste. Et pourtant il s'agit bien d'éduquer un enfant.

Enseignant : je vais conclure, Je vais reformuler. On a commencé à parler de la photo. On a décrit la photo et on s'est intéressé à cette femme, à ce qu'elle faisait et on s'est posé la question "Est-ce que c'est bien de faire la grève ?". Et la plupart d'entre vous disaient au départ "Non, ce n'est pas bien de faire la grève", parce qu'on perd de l'argent, parce que ceci parce que cela. Et on s'est aussi posé la question "Est-ce que c'est bien de désobéir à la loi ?" Et la plupart d'entre vous ont dit aussi que ce n'est pas bien de désobéir à la loi. Et après on s'est intéressé à cette femme et on s'est demandé pourquoi elle faisait ça. Et on s'est dit elles travaillent beaucoup dans des conditions de travail difficiles. Et alors on s'est posé la question de savoir si c'était bien de faire la grève. Et là on discuté sur plusieurs choses et là effectivement, il y en a qui on dit que c'était bien de faire la grève, pourquoi, parce que ça permettait... plus de justice, ça permettait aux plus faibles d'être défendus et d'empêcher les patrons de faire ce qu'ils veulent. D'ailleurs Martin a dit quelle que soit la raison, après tout c'est nécessaire et c'est une bonne chose. On a évoqué les droits de la femme et vous avez donné quelques exemples où on voit comment aujourd'hui les femmes ont plus de droits qu'autrefois. Elles sont à égalité avec les hommes.

Il s'agit donc de penser le discernement moral comme une quête de vérité pour soi. L'atelier philo est bien le lieu où cela est possible. Interroger les certitudes. Se trouver dans l'incertitude. Découvrir des questions pour lesquelles la réponse est toujours à construire. Sortir du paradigme de la bonne réponse pour passer à celui de la réponse bonne. Regarder et penser le monde à partir de ses propres références, de ses propres filtres puis les interroger. Pour cela il faut aussi prendre le temps de s'arrêter, de regarder le monde en images. Regarder le monde pour pouvoir le penser. Penser le monde pour pouvoir se penser. Le discernement moral ouvrerait-t-il la porte de l'intériorité et de la spiritualité ?


(1) Les acteurs de cette pratique sont :

  • les élèves de la classe de CM1 de l'Ecole St-Jean-Baptiste, à Mouilleron-le-Captif (85).
  • Mme Colas, professeur des écoles, maître associé à la formation, chef d'établissement. Conduite des apprentissages dans le domaine de la sémiologie de l'image et des apprentissages afférents.
  • M. Gorvan, Commissaire d'expositions, directeur artistique de l'atelier photogalerie, formateur image photographie vidéo pour les journalistes reporters. Sélection des photos.
  • M. Legal, professeur des écoles, formateur d'enseignants (institut missionné l'Aubépine), doctorant en philosophie. Conduite de l'atelier philo.

(2) Qu'apprend-on à l'école élémentaire, les nouveaux programmes, CNDP éditions, 2008.

(3) Galichet F., La philosophie à l'école, Milan 2007.

(4) Daniel M.-F. La philosophie et les enfants. Les modèles de Lipman et de Dewey. De Boeck et Belin, 1997, p.212.

(5) Piaget J., Le langage et la pensée chez l'enfant, p.94.

(6) Tauveron C., Lire la littérature à l'école, Hatier, 2002.

(7) http://www.atelier-photogalerie.fr/

(8) http://www.institut-aubepine.eu/

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