Revue

L'heure de morale en Alsace et Lorraine

En 1801, un accord intervient à Paris entre les représentants de Bonaparte et le pape Pie VII, lequel reconnaît la République Française. Le Clergé est alors rémunéré par l'État. Ce concordat est appliqué jusqu'à la séparation des Églises et de l'État en 1905, sauf en Alsace et en Lorraine. En effet, en 1905, ces deux régions sont sous domination allemande. Lorsqu'elles redeviennent françaises, elles sont donc toujours soumises au concordat de 1801. Ainsi, l'enseignement de la religion à l'école se fait toujours en Alsace et en Lorraine. Les élèves qui ne suivent pas cet enseignement participent au cours de morale.

Ce caractère d'exception n'apparaît pas dans les instructions officielles. Cette absence de directive autorise, en quelque sorte officieusement, l'utilisation de cette heure de morale à des fins diverses... Étant remplaçante durant sept ans, j'ai pu en observer !

- Certains enseignants donnent des cours de soutien scolaire, en lecture ou en maths, aux élèves en difficulté.

- Ce petit effectif d'élèves peut aussi permettre un accès plus facile à la B.C.D., à l'atelier informatique...

- D'autres enseignants donnent des leçons de choses sur la vie des insectes, l'alimentation de l'homme (comment doit-on se nourrir ?), la propreté à table, cela peut même aller jusqu'au thème de la vaccination.

- Enfin, il y a ceux qui abordent la morale en faisant réfléchir les enfants sur des thèmes transversaux tels que respecter, communiquer, tolérer...

Mes pratiques actuelles sont de ce quatrième type. De manière générale, j'essaie d'utiliser des supports initiaux variés (bande dessinée, affiche, texte métaphorique, sketch à jouer par les enfants...).

UN EXEMPLE

Voici l'exemple d'une séquence que j'ai menée avec un groupe d'enfants de CE2 et de CM1 (8-10 ans) à partir de l'affiche ci-dessous : " Coopérer ça enrichit la vie "1.

Les enfants découvrent l'affiche, la partie écrite étant dans un premier temps cachée. Après un temps d'observation, ils décrivent ce qu'ils voient. Ceci prête à débat et fait émerger le thème, la nécessité de coopérer.

Les enfants découvrent alors l'affiche dans sa globalité. Je leur demande ensuite de raconter des histoires vécues concernant ce thème.

Durant toute la séquence, je prends note de ce qui est dit ; j'en fais un résumé que j'écris au tableau :

" Si tu coopères, tu en seras gagnant ! En effet si tu agis dans ton coin, que tu veux toujours " tirer la ficelle " à toi, tu n'arriveras pas à obtenir ce que tu veux. Dans la vie, il faut faire des concessions pour pouvoir s'entendre, vivre avec les autres. Coopérer, ça enrichit la vie ! "

Les enfants recopient le texte et l'illustrent : ils se dessinent en train de coopérer ou/et ne pas coopérer ; dans ce cas ils en font apparaître les conséquences néfastes.

Cette approche du cours de morale est sans doute discutable. Les objectifs de ces cours n'étant pas officiellement définis, je restais dans le vague et j'en ai donc fait ma propre interprétation. Par ailleurs je m'interroge...

Les cours de morale ne viennent-ils pas en partie concurrencer les cours d'éducation civique (qui eux apparaissent clairement dans les instructions officielles) ?

Dans ce cas, quels sont les intérêts et les limites de ces cours de morale ?

Faut-il imposer des valeurs ou les proposer ?

N'y a-t-il pas un risque de confrontation des valeurs véhiculées, par le biais de ces cours de morale, avec les valeurs données par les parents. Quelle est la pertinence de ces cours ?


(1) Non-violence, Actualité BP 241, 45 202 Montargis Cedex

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